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Ukraine : Les nazis, ces grands démocrates


On a beaucoup glosé sur les nazis ukrainiens qui ont contribué à renverser le tigre en papier Ianoukovitch. Les plus rationalistes d’entre nous croient rêver en entendant Vladimir Poutine dénoncer des « néo-fascistes antisémites » pendant que Bernard Henri-Lévy porte aux nues les libéraux alliés de l’Occident place Maïdan. On a beau avoir conscience de vivre dans un monde renversé, cette coalition euro-libéro-facho nous met cul par-dessus tête.

Difficile de juger in abstracto lorsqu’on crie au loup nazi tous les quatre matins dans notre République de France. Il n’empêche, en dehors de tout parti pris poutinien, les faits sont têtus : Secteur droit et Svoboda (« Liberté ») rassemblent une bonne partie des opposants ukrainiens qui ont pris le pouvoir à Kiev. Secteur droit, la roue solaire sur ses boucliers, affiche clairement la couleur : il faut « nettoyer » ou « éliminer » les Russes de Crimée, région où ils sont majoritaires. D’un coup d’un seul, les justifications du Kremlin à la protection de la Crimée prennent tout leur sens : protéger les populations russes de ces zigs n’est sans doute pas du luxe. Imprécations, esthétique crypto-nazie, appels à la déportation ou au meurtre, SD ne fait pas vraiment dans la dentelle…

Mais que dire de son rival et néanmoins proche partenaire Svoboda, réputé moins extrémiste ? Ce parti identitaire, qui entend également remettre la main sur la Crimée, n’avance pas franchement masqué. Ses membres montrent une nostalgie certaine pour ce qu’ils estiment être les heures les plus glorieuses de l’histoire ukrainienne. Comprenez les années 1940 durant lesquelles, alliés du Reich hitlérien, les nervis du nationaliste ukrainien Stepan Bandera constituaient la division SS-Galicie pour faire la nique aux troupes soviétiques de l’Oncle Jo. Les vétérans de cette petite unité combattante ne s’y trompent d’ailleurs pas : en mai 2010, ils ont décerné une croix d’or à Oleh Tiahnybok, le chef charismatique de Svoboda.  Vous me direz, le port d’insignes militaires est un loisir comme un autre… Mais leurs excentricités folklos ne s’arrêtent pas là : à la nuit tombée, bombers, Doc et symboles SS ponctuent les défilés des gros bras de Svoboda.

Le cocasse, c’est que ces musclés – nettement moins affables que ceux du Club Dorothée – se piquent aussi de penser, flanqués de Yurii Mykhal’chyshyn, la petite trentaine, député et ancien candidat à la mairie de Lvov.  En 2005, ce petit prodige, qui se rêve en intellectuel organique de l’extrême droite ukrainienne, avait créé le « Joseph Goebbels Political Research center » pour régénérer la pensée « nationale-socialiste » ukrainienne. N’allez surtout pas croire qu’il s’agit d’un énième nazillon négationniste : Mykhal’chyshyn admet l’existence de la Shoah comme… « l’un des épisodes les plus éclatants de la civilisation européenne » qui « réchauffe le cœur des Palestiniens, lesquels espèrent qu’il se reproduise » (sic). Dans le lobby pro-Maïdan de Paris, il ne s’est pour l’instant pas trouvé grand monde pour juger ce discours « nauséabond »…



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est journaliste.

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