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Karabakh: un an après le déclenchement de la guerre, le conflit couve toujours


Karabakh: un an après le déclenchement de la guerre, le conflit couve toujours
Des habitants de Ganja après un bombardement arménien, le 11 octobre 2020 © Sputnik/SIPA Numéro de reportage: 00985451_000029.

Depuis presque un an et le conflit qui a eu lieu entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, le Karabakh est revenu dans le giron azerbaïdjanais conformément au droit international et aux résolutions des Nations-Unies. Pour l’Azerbaïdjan le contentieux est donc pour l’essentiel résolu et rien n’empêche plus la normalisation des relations entre Erevan et Bakou. Or, malgré une volonté de Bakou d’avancer sur le chemin de la paix, plusieurs embûches se sont opposées à l’avancée du dialogue et à la normalisation des relations entre les deux pays.

Des discriminations qui perdurent

La question du sort des disparus de la première guerre de Karabakh (terminée en 1994) reste au cœur des préoccupations de l’Azerbaïdjan : 3 890 personnes n’ont plus jamais donné signe de vie. Parmi d’autres sujets majeurs, les discriminations qui continuent d’avoir lieu dans les territoires restants aux Arméniens contre les ressortissants azerbaïdjanais et qui ne sont que la perpétuation d’une politique que Bakou considère comme systématique depuis presque trente ans. Ces discriminations contreviennent avant tout à la Convention Internationale sur l’Elimination de toutes les formes de Discrimination Raciale (CIEDR) [1]. Azerbaïdjanais et Arméniens étant signataires de ce texte, ils sont donc contraints de le respecter. Ainsi, l’Azerbaïdjan a récemment saisi la Cour Internationale de Justice en introduisant une instance contre l’Arménie et en priant la cour d’indiquer des mesures conservatoires afin de faire cesser cela.

L’Azerbaïdjan affirme que «l’Arménie poursuit, par des moyens aussi bien directs qu’indirects, sa politique de nettoyage ethnique » et qu’ « elle inciterait clairement à la haine et à la violence ethnique contre les Azerbaidjanais par les propos haineux qu’elle tient et la propagande raciste qu’elle diffuse, y compris aux plus hauts niveaux de l’Etat» [2]. Il faut rappeler que le premier conflit de Karabakh a été précédé par l’expulsion manu militari à partir de novembre 1987 des citoyens arméniens d’origine et de cultures azerbaidjanaises. 

L’Azerbaïdjan décidé à porter l’affaire à la Haye

Se référant au conflit qui a éclaté en septembre 2020, le requérant poursuit que « l’Arménie s’en est prise une fois de plus aux Azerbaïdjanais en leur réservant un traitement brutal, motivé par la haine ethnique ». Bakou va plus loin encore et accuse également l’Arménie d’avoir, par « ses politiques et ses actes de nettoyage ethnique, d’annihilation culturelle et de provocation à la haine contre les Azerbaïdjanais, … systématiquement porté atteinte aux droits et aux libertés des Azerbaïdjanais, ainsi qu’aux droits propres de l’Azerbaïdjan, en violation de la CIEDR » [3].

Malgré de nombreuses demandes, l’Azerbaïdjan n’est pas parvenu à faire reconnaître aucun de ces méfaits, à l’amiable, avec l’Arménie ou d’obtenir des réparations. Pourtant, comme l’a souligné l’ambassadeur d’Azerbaïdjan en France récemment, Rahman Mustafayev, « l’aboutissement d’un procès dans une Cour internationale et la traduction en justice des responsables arméniens s’ils sont confondus constitue une des priorités de notre action dans l’après-guerre ». Aussi a-t-il décidé de porter l’affaire à la Cour Internationale de Justice à la Haye afin de faire appliquer le droit international. 

Pour cela, l’Azerbaïdjan invoque comme base de compétence de la Cour l’article 22 de la CIEDR, à laquelle les deux Etats sont parties et qui stipule : « tout différend entre deux ou plusieurs Etats parties touchant l’interprétation ou l’application de la présente Convention qui n’aura pas été réglé par voie de négociation ou au moyen des procédures expressément prévues par ladite Convention sera porté, à la requête de toute partie au différend, devant la Cour internationale de Justice pour qu’elle statue à son sujet, à moins que les parties au différend ne conviennent d’un autre mode de règlement. »

La Cour devra trancher sur le fond prochainement, et à Bakou on espère qu’une décision favorable ne restera pas, comme par le passé, lettre morte.  


[1] https://www.ohchr.org/fr/professionalinterest/pages/cerd.aspx

[2] https://www.icj-cij.org/public/files/case-related/181/181-20210923-PRE-01-00-FR.pdf

[3] Texté cité.



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est chercheur en sciences politiques associé à l’ULB (Bruxelles) et à l’UQAM (Montréal). Publications récentes: "Les Emirats Arabes Unis à la conquête du monde" (2021, MAX MILO), "Les nouvelles menaces mondiales: La grande pandémie du déni" (2021, Mardaga).

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