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Contrôle au faciès: la légende noire de la police française

Macron était hier invité de "Brut" et a évoqué la police


Contrôle au faciès: la légende noire de la police française
Emmanuel Macron lors de son interview accordée au média Brut © BERTRAND GUAY / AFP

Des groupes ethniques sont-ils plus délinquants que les autres? Épineuse question.


Dans l’entretien qu’il a accordé à Brut, Emmanuel Macron a abordé la question des « contrôles au faciès ». Cette formule sous entend que la police est raciste dans la mesure où elle contrôle plus fréquemment les Noirs et les Arabes que les Blancs. Le président de la République n’a pas disculpé la police, il n’a pas récusé l’idée que la police était intrinsèquement raciste. Il a seulement annoncé la création de deux plates-formes en ligne, l’une où il sera possible de signaler toute forme de discrimination (logement, travail…) ; et l’autre consacrée aux contrôles dans la rue, avec un numéro d’appel. Ceci afin de « rétablir la confiance » a dit le Président.

En 2009, Fabien Jobard et René Lévy, deux chercheurs du CNRS, ont mené une étude destinée à prouver que les contrôles étaient menés « au faciès », c’est-à-dire « non pas sur ce que les gens font, mais sur ce qu’ils sont, ou paraissent être ». Les chercheurs ont constaté qu’à Gare du Nord, à Chatelet…, les Noirs et les Arabes étaient plus systématiquement contrôlés que les Blancs. Entre trois et quatre fois plus environ. Forts de ces statistiques, les deux auteurs de l’étude en ont conclu que les contrôles de population représentaient une forme de « délinquance policière ». 

Proportionnalité raciale

Cette grave accusation a été relayée en 2017, par le Défenseur des Droits. Cette institution – connue pour ses positions complaisantes – a produit une enquête qui a confirmé que les Noirs et les Arabes étaient contrôlés plus fréquemment que les autres catégories ethniques de la population. 

Derrière cette idée que la police contrôle « trop » les Noirs et les Arabes, on trouve l’idée que les contrôles de police devraient s’effectuer au prorata de la composition ethnique de la population[tooltips content= »Mesurer les discriminations selon l’apparence : une analyse des contrôles d’identité à Paris Fabien Jobard, René Lévy, John Lamberth, Sophie Névanen, Population 2012/3 (Vol. 67), pages 423 à 451″](1)[/tooltips]. Une idée qui n’est pas spécifiquement française. Heather Mac Donald, universitaire américaine, spécialiste de la police, rapporte dans son livre War on Cops (la Guerre contre les Flics, non traduit en français) qu’en août 2013, un juge du district de New York, Shira Scheindlin, a fait sien l’argument de la « proportionnalité raciale » et a déclaré que les contrôles au faciès du New York Police Département étaient illégaux. 

Quelques trimestres plus tard, les contrôles menés en 2015 ne représentaient plus que 90% des contrôles qui étaient menés en 2011. La conséquence de ce retrait policier, souligne Heather Mac Donald, est que la circulation des armes a repris de plus belle. Une augmentation significative des règlements de comptes dans les rues de New York a été constatée. 

Plus récemment, le meurtre de George Floyd (mort asphyxié sous le genou d’un policier en mai 2020) a occasionné une remise en cause massive du comportement de la police. Si bien que là encore, les statistiques criminelles américaines ont fait état d’un ralentissement de l’activité policière. Les contrôles en général ont chuté et plus encore les contrôles de Noirs. Là encore, le résultat ne s’est pas fait attendre. Pour les seuls mois de juin et juillet 2020, les États-Unis ont enregistré 710 meurtres de plus et 2 800 fusillades de rues en plus. « Dans toutes les villes des États, les fusillades ont repris de plus belle peu après que les manifestations aient pris à partie les policiers les incitant à baisser les bras » écrit Paul Cassel, professeur à l’université de l’Utah. 

Une question qui a amené Zemmour devant le tribunal

La question des contrôles de police « égalitaristes » pose en réalité la question de la répartition de la délinquance dans les sociétés multiculturelles. Autrement dit, la délinquance est-elle également répartie entre les Blancs, les Noirs, les Arabes, les Asiatiques, les Latinos etc ?

Il est difficile de répondre à cette question en France, car ce type de statistiques ethniques est interdit. Eric Zemmour a été condamné par la justice pour avoir affirmé que dans les prisons françaises, les Noirs et les Arabes étaient surreprésentés par rapport à la taille de leur communauté dans la population française. En France, seul le Conseil supérieur de l’audiovisuel a le droit de dire que les Noirs et les Arabes sont sous représentés à la télévision tant en nombre que dans des rôles positifs. Et Delphine Ernotte, présidente de l’audiovisuel public, s’est engagée à faire un effort.

En revanche, dans les pays ou les statistiques ethniques sont autorisées, les chiffres sont hélas imparables. « À Los Angeles, par exemple, les Noirs commettent 42% de tous les vols et 34% de tous les délits, alors qu’ils représentent 10 pour cent de la population de la ville. Les Blancs commettent 5% des cambriolages et 13% des escroqueries, et pourtant ils représentent 29%, de la population de Los Angeles » indique Heather Mac Donald.

Autre exemple, à New York en 2018, 73% des victimes de fusillades entre gangs étaient noires, alors que les résidents noirs ne représentent que 24% de la population de la ville. À l’échelon national, les Afro-Américains âgés de 10 à 34 ans courent le risque de mourir assassinés par d’autres Noirs treize fois plus souvent qu’un Blanc de la même tranche d’âge. Un sondage Gallup de 2015 indiquait déjà que la demande de police en provenance des quartiers ou la population est majoritairement noire est deux fois plus élevée que dans les quartiers blancs[tooltips content= »Cité in There is no epidemic of fatal police shootings against unarmed Black Americans, Heather Mac Donald, usatoday.com, 6 juillet 2020″](2)[/tooltips].

Dire que la police est raciste, ça on peut

Autrement dit, si l’activité de la police de Los Angeles ou de New York devait être organisée sur des bases égalitaristes et non en fonction de la population criminelle, la délinquance se développerait au-delà de tout contrôle.

En Grande Bretagne aussi, les statistiques 2018 confirment que la criminalité est inégalement répartie entre les communautés : les Noirs britanniques sont trois fois plus nombreux que les Blancs à commettre des délits et à être arrêtés par la police. Et les femmes noires sont aux prises avec la police deux fois plus souvent que les femmes blanches. 

En France, l’interdiction des statistiques ethniques empêche d’évoquer la surreprésentation de certains groupes ethniques dans la population carcérale ou la surexpression de certains groupes ethniques dans le nombre de délits commis sur le territoire national. En revanche, il est permis de publier des études qui accusent la police de racisme.

Ici, un aparté est nécessaire : tout corps social comporte des brebis galeuses et la police ne fait pas exception. En revanche, il est particulièrement grave d’accuser des fonctionnaires de l’État de comportement raciste systématique.

Il n’est pas interdit de penser que cette accusation de racisme contre la police, accusation récurrente et sans preuve statistique, est une forme de guerre livrée par des gangs ethniques et les narco-trafiquants – avec l’appui de l’extrême gauche, des people et des médias – ait pour finalité de débarrasser les banlieues de toute présence policière. 

Si tel était le cas, le soutien objectif – et peut être subjectif – que les intellectuels progressistes, les people et certains médias apportent – sous prétexte d’antiracisme – à la frange criminelle de certains groupes ethniques mériterait d’être pénalisée à tous les sens du terme. 



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