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Les Américains privés de campagne électorale?

Le grand show télévisé de l’impeachment a commencé


Les Américains privés de campagne électorale?
A la bourse de New York, des traders regardent la retransmission de l'interrogatoire de l'ancien diplomate en Ukraine William Taylor © Richard Drew/AP/SIPA Numéro de reportage: AP22398703_000005

Le grand show télévisé de l’impeachment a commencé. Reste à voir si les démocrates en tireront profit en 2020.


La Chambre des représentants a entamé les auditions publiques afin de destituer le président, après le vote d’une résolution sur la procédure à suivre. Lors du vote, aucun Républicain ne s’est joint aux rangs Démocrates. Parmi ces derniers deux seulement n’ont pas suivi leur parti. Lors de la procédure de destitution à l’encontre Bill Clinton, pas moins de 31 Démocrates avaient rejoint le camp républicain. Et le vote intervenait à l’issue du rapport d’un procureur spécial. En 2019, les élus Démocrates instruiront eux-mêmes le dossier, à charge uniquement.

Des sénateurs démocrates, ceux qui vont donc devoir « juger » si Trump est « coupable », ont lancé des campagnes de recueils de fonds sur base de leur soutien à la procédure de destitution. Ils ont donc déjà tranché, avant le « procès ». Quant à la sénatrice Kamala Harris, candidate à la présidence, elle sait que Trump est coupable : « Comme ancienne procureure, je reconnais un aveu quand je le vois. Il (Trump) l’a fait aux yeux de tous. Il nous a fourni les preuves »! [tooltips content= »https://www.washingtonexaminer.com/news/kamala-harris-on-impeaching-trump-as-a-former-prosecutor-i-know-a-confession-when-i-see-it »](1)[/tooltips] La justice sera assurément bien rendue par ces élus qui ne cherchent même plus à préserver les apparences de la justice.

Un jeu dangereux aussi pour Biden

Il y a quelques mois, Nancy Pelosi avait pourtant mis en garde contre les dangers de division de la Nation[tooltips content= »Washington Post, 6 mars 2019″](2)[/tooltips] : « Je ne suis pas en faveur de l’impeachment. Cela divise inutilement le pays. A moins qu’il y ait quelque chose de vraiment accablant et  bipartisan, je ne pense pas que nous devons prendre ce chemin parce que cela divise le pays et cela n’en vaut pas la peine ». Sages paroles, vites oubliées.

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La cheffe des Démocrates a-t-elle paniqué devant les conséquences potentiellement dévastatrices pour Joe Biden, bien davantage que pour Trump du dossier ukrainien ? Pour l’instant, la presse tire à boulets bleus (la couleur des Démocrates) sur le président et épargne Joe Biden, mais, imaginons la passe d’armes  au cours d’un face à face télévisé :

– Biden : « Vous avez cherché à obtenir un avantage politique en faisant appel à un chef d’Etat étranger ».

– Trump : « J’ai cherché à démontrer votre corruption, l’utilisation de votre fonction de Vice-président pour favoriser votre fils qui a reçu 600 000 dollars par an pour trois réunions.

Quel serait l’argument le plus convaincant ? Qui emporterait ce duel ?

Comme des juristes américains ont tenté de le démontrer sans parvenir à se faire entendre dans les journaux les plus prestigieux, les pères fondateurs de la Constitution américaine n’ont certainement pas voulu que la destitution devienne une affaire aussi partisane et qu’elle puisse s’appliquer dans le cas de la « faute » qui est reprochée à Donald Trump.

Les démocrates ne peuvent-ils donc pas battre Trump à la régulière?

Même s’il s’avérait que ce dernier avait lié l’aide américaine à l’Ukraine à l’ouverture d’une enquête sur Hunter Biden, à moins d’un an de l’élection, il appartiendrait au peuple américain de le juger sur ce point comme sur d’autres et pas à un parlement, par définition hautement politisé.

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Et de qui se moque-t-on lorsque l’on critique la diplomatie parallèle de Rudy Giuliani, l’avocat du président, comme si aucun président, américain (ou français), n’avait  jamais contourné les circuits officiels de la politique étrangère ?

C’est à l’initiative de Trump que le Congrès a autorisé la livraison d’armes létales (des missiles antichars Javellin) à l’Ukraine, ce que Biden préconisait en tant que Vice-président mais que Obama s’était toujours refusé de valider ! Autrement dit, les Démocrates reprocheraient à Trump d’avoir « mis en danger la sécurité nationale », alors qu’il n’était aucunement obligé de prendre cette décision. Dans le système américain, c’est le président – et lui seul – qui conduit la politique étrangère.

Nous allons donc assister pendant quelques semaines au défilé d’une série de fonctionnaires, Démocrates ou frustrés, les deux se combinant parfaitement, pour dénigrer le président élu. Comme on n’a rien ignoré des taches sur la robe de Monica Lewinsky lors de l’injuste impeachment de Bill Clinton, on connaitra tout des conversations, texto et courriels diplomatiques, censés être confidentiels.

La vérité est sans doute que les Démocrates doutent de pouvoir battre Trump à la régulière en 2020. Tous leurs candidats ont désormais d’énormes faiblesses.  Comme l’a écrit justement, mais pour s’en réjouir, Martin Watterberg dans le Washington Post, « Une procédure d’impeachment même sans condamnation aide quand même le parti d’opposition en mettant en évidence les écarts du président en place » [tooltips content= »https://www.washingtonpost.com/politics/2019/10/24/would-not-guilty-impeachment-verdict-help-trump/ »](3)[/tooltips] Et l’éditorialiste du New York Times, David Leonhardt, de l’approuver [tooltips content= »Courriel aux abonnés, 1/11/2019″](4)[/tooltips]. Les choses sont claires et les camps bien définis.



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Sénateur honoraire belge, ex-secrétaire général de Médecins sans frontières, ex-président de l’International Crisis Group

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