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Dieu sait que je n’ai pas l’habitude de parler de « démocratie ». Je parle de ce que je connais, moi. Or, voilà que grâce à l’ami Régis Soubrouillard (quel joli nom pour l’époque !) de Marianne2.fr, mon attention est soudain attirée sur un problème plutôt nouveau pour moi : « Faut-il en finir avec les commentaires de blogs ? »

Je croyais savoir qu’un blog, un site, et toute cette sorte de choses, c’était une communauté choisie. Qu’on écrivait pour des gens qui faisaient la démarche de vous lire – avec éventuellement le droit de réagir. Eh bien pas du tout ! Figurez-vous que pour certains collègues zinfluents « l’afflux de commentaires sur les blogs complique la tâche des blogueurs » (ibid.).

Mais au secours! S’ils ne veulent pas qu’on leur réponde, ces gens-là n’ont qu’à faire comme l’ami Jules Renard : écrire un Journal intime destiné à la postérité (ou, à défaut, à la posthumité).

Vous me direz que Jules n’avait pas le choix. Eh bien si! Il aurait pu publier son Journal dans un journal – ou un hebdo ou un mensuel – et s’attendre du coup à avoir des réactions. D’ailleurs il y en a, y compris la mienne – moi qui n’ai découvert ce chef-d’œuvre que sur le tard.

Mais revenons à l’inessentiel. Ce qui me troue le cul, c’est ce nouveau concept d’ »interactivité unilatérale ». Hé les jeunes, il faut choisir ! Si tu parles aux gens, la moindre des politesses, c’est de leur donner le droit de répondre. J’ai dit « politesse », pas « démocratie ». Pas besoin de 500 signatures de notables pour créer un site, sinon Causeur n’existerait pas ! – du moins je l’espère.

Bref, le commentaire est un suffrage non pas universel mais censitaire et consultatif. Laissez-moi rire des démocrates qui n’acceptent même pas ce mode d’expression, pourtant ultra-filtré par nature même. Bien sûr il y a des glands(e)s qui postent portnawak – et en plus sans rapport avec l’article dont auquel. Sans me vanter, j’ai même été le premier sur ce site non pas à en souffrir, mais à m’en plaindre. Est-ce une raison pour faire taire la populace ou plutôt, en son sein, le « petit troupeau » qui vous a déjà choisi ?

Toujours un peu en retard sur mon époque (mais y a pas qu’elle dans la vie!), je découvre donc presque simultanément l’ »interactivité » et sa mort annoncée, sous le prétexte que les commentateurs ne seraient pas toujours à la hauteur des auteurs. Il faudrait savoir ce que l’on veut : rester sur son Aventin, ou soumettre ses idées à ceux qui veulent bien faire l’effort d’en prendre connaissance ?

On dirait qu’il y a des cerveaux tellement gros qu’ils veulent bien dispenser « le vrai et le beau » – mais à condition de n’être pas contredits.

Dieu fasse que ça n’arrive pas chez nous : entre le « Causons ! » et le « Ta gueule ! », il faut choisir.
D’ailleurs le problème se règle de lui-même, pour peu qu’on lise tout (ou rien) : chaque post con engendre son anti-post anti-con[1. Bien sûr, pas mal de commentateurs écrivent n’importe quoi. Mais qui sommes-nous pour les critiquer ? Au lieu de censurer, relisons-nous dans 50 ans.].

Bref, et j’en aurai terminé, dans cet étrange alternative, il me semble distinguer trois branches :
– soit on censure tout (et pourquoi pas moi, incarnation même de la Liberté ?)
– soit on publie tout (quitte à répondre en deux mots aux blogueurs qui se sont juste trompés de site !)
– soit on écrit soi-même les commentaires, mais ça prend du temps et ça finit par se savoir.

J’ai dit !



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