Accueil Édition Abonné Avril 2022 Retour du charbon: Dickens et Jules Verne perplexes

Retour du charbon: Dickens et Jules Verne perplexes

C’était écrit, la chronique de Jérôme Leroy


Retour du charbon: Dickens et Jules Verne perplexes
Image d'illustration Unsplash

C’était écrit, la chronique de Jérôme Leroy


« Depuis janvier, cinq grands projets de centrales électriques au charbon ont été approuvés en Chine », nous apprend Le Figaro tandis que Challenges explique que le chancelier Scholz n’a plus de tabou sur cette question : « Laisser les centrales thermiques à charbon fonctionner plus longtemps que prévu est une option. » Ne parlons pas de la France où la ministre Pompili a concédé : « On a remonté un petit peu le quota de charbon que l’on peut utiliser, parce qu’on a besoin de marges de manœuvre. » Le charbon serait-il de nouveau à la mode ? Voilà qui nous renverrait à la révolution industrielle, quand Émile Verhaeren célébrait cette énergie qui réchauffait au cœur de la froidure : Un soir, en tout à coup de gel, s’ouvre l’hiver / Dans le foyer, fourbi de naphte et de phosphore / Qui brûle : et le charbon pointu se mousse d’or / Et le posthume été dans l’or se réitère.

Le problème, évidemment, c’est que le charbon pollue : « L’écologie d’Emmanuel Macron c’est de faire fonctionner des centrales à charbon. C’est le résultat d’une politique française lamentable en matière de transition énergétique », s’énerve ainsi Yannick Jadot sur Twitter. Le plus étonnant, c’est que cette critique du charbon, attendue de la part des écolos, remonte… au charbon lui-même ! C’est paradoxalement chez le scientiste Jules Verne, dans Les Indes noires, que l’on trouve une critique des impasses où mène la surexploitation des énergies fossiles : « La houille est d’un emploi très pratique et se prête facilement aux divers besoins de l’industrie ! Malheureusement, les hommes ne peuvent la produire à volonté ! Le globe ne se retrouvera jamais dans les conditions voulues pour la refaire ! »

Quant aux ravages sur l’environnement et même le climat, la vision saisissante de Coketown, ville imaginaire et symbolique, dans Les Temps difficiles, le roman de Dickens, préfigure les métropoles chinoises d’aujourd’hui perdues dans le smog : « Coketown apparaissait noyée dans une brume inaccessible aux rayons du soleil. On savait seulement que la ville était là, parce qu’on savait que la tâche maussade qui s’étalait dans le paysage ne pouvait être qu’une ville. Un brouillard de suie et de fumée qui se dirigeait confusément tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, tantôt montait vers la voûte du ciel, tantôt s’avançait sombrement au ras du sol, selon que le vent s’élevait ou s’apaisait ou changeait de direction, un enchevêtrement compact, sans forme, traversé par des nappes d’une lumière oblique qui ne laissait voir que de grosses masses noires. »

Alors Dickens, soutien précoce des Verts ? Il est plus nostalgique de l’Angleterre des cottages qu’autre chose, à vrai dire. Et, si possible, sans éolienne au bout du jardin.

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Avril 2022 - Causeur #100

Article extrait du Magazine Causeur




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