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La France à couteaux tirés…

Le billet de Philippe Bilger


La France à couteaux tirés…
Le procureur de la République de Bordeaux, Frédérique Porterie, donne une conférence de presse le lendemain de l'attaque au couteau survenue le soir de la fête religieuse musulman de l'Aïd sur les quais de la ville et ayant fait un mort, 11 avril 2024 © UGO AMEZ/SIPA

Des individus poignardés pour un verre d’alcool ou roués de coups pour une mini-jupe… Le pays semble démuni et ne pas savoir que faire face à la contre-société violente qui émerge sur son sol


La multiplication des attaques au couteau, quasiment quotidiennes, est effrayante. Des agressions accomplies à plusieurs pour toutes sortes de motifs avec des conséquences souvent mortelles. Des auteurs majeurs ou mineurs, et de plus en plus précoces. Des victimes parfois adolescentes, qu’elles aient participé à l’affrontement entre bandes ou qu’elles aient cherché à s’interposer comme à Romans-sur-Isère. Quelle triste litanie : Montpellier, Viry-Châtillon, Tours, Bordeaux, Bagneux…

Rien n’est plus tentant que d’apposer sur ces crimes une grille de lecture unique qui nous permettrait de simplifier cette réalité contre laquelle les pouvoirs publics, malgré leur bonne volonté ou l’angélisme de certains maires écologistes, paraissent impuissants. Débordés par un mouvement qui, dans son imprévisibilité ou sa logique perverse, réduit à néant les protections mises en place en amont et se confronte à une extrême lenteur judiciaire en aval.

Les autorités débordées

Il serait réducteur de considérer qu’une immigration non contrôlée ou porteuse d’une culture trop différente de la nôtre sur le plan de la religion, des mœurs, de la liberté et de l’égalité entre les sexes, est la cause exclusive de ces terrifiantes empoignades, où chacun porte un couteau ! Comme pour se préparer à un pire qui ne manquera pas de survenir, avec cette arme prête à servir. Avant de théoriser sur le fait que l’immigration est responsable de tout, sur un mode trop univoque pour que l’intelligence s’en satisfasse, il faut d’abord accepter de fondre ces péripéties criminelles dans un ensemble qui affecte la France tout entière. Crimes et délits s’accroissent, notamment les atteintes aux personnes, avec cette particularité que leur perpétration devient en quelque sorte gratuite, liée à des motifs de plus en plus dérisoires où la susceptibilité est poussée à son comble. Ce qui chaque jour indigne nos concitoyens, c’est la continuation – de plus en plus grave, de plus en plus précoce – de transgressions auxquelles la République ne sait plus comment faire face.

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Mais certains des mobiles récents démontrent également – l’exemple de Samara à Montpellier est éclairant sur ce point – l’incompatibilité de telle ou telle conception de la vie, de telle ou telle vision de l’islam, du rapport à la sexualité et du sort réservé aux jeunes filles, d’avec les pratiques majoritaires des Français de culture européenne. Il y a donc à l’évidence une relation directe entre cette société qui refuse de s’assimiler et le pire qu’ils ont engendré. Comment occulter « cette violence islamiste du quotidien… poignardés pour un verre d’alcool, frappée pour une tenue « à l’européenne »… à cause du non-respect des règles religieuses musulmanes… » ? (Le Figaro)

Une du quotidien « Le Figaro » du 12 avril 2024.

Mauvaises graines

Ce ne sont pas les vœux pieux présidentiels – « l’école doit rester un sanctuaire » – qui auront le moindre effet sur ces dernières atrocités du quotidien. On ne peut pas se résoudre au simplisme du « il n’y a qu’à… », « il faut qu’on… » ! On n’arrache pas une culture néfaste comme on pourrait le faire d’une mauvaise herbe. Cette société qui s’est installée aux côtés de la nôtre, voire face à la nôtre, est peu disposée au dialogue. Elle est enracinée dans ses croyances, ses convictions, persuadée qu’elles doivent demeurer intangibles et que toute offense qui leur serait faite mériterait une riposte, souvent violente. Les tragédies criminelles récentes doivent être analysées comme la volonté de ne pas céder à la civilisation de notre pays, à ses règles, à son terreau non négociable.

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S’agit-il d’un vaste dessein qui mené collectivement par un islam dévoyé viserait, par petites touches devenues de plus en plus préoccupantes à force d’être cumulées, à changer radicalement l’esprit de notre nation en lui substituant une autre société, au pire la charia ? Je n’irais pas jusque-là parce que s’il y a des indices qui le font croire – par exemple ce qui s’est produit à Strasbourg, dans la boutique Geox (des centaines de réactions haineuses – « vermine française » – contre le gérant) -, beaucoup d’autres laissent plutôt entendre une imprévisibilité, des humeurs, des résistances, des susceptibilités, des défis qui ne paraissent pas relever d’un plan préétabli.

Je ne suis pas naïf mais attentif au fait que si la lucidité certes pessimiste désespère et affirme que tout est fichu, un pays n’a plus qu’à se suicider, ne plus rien attendre de la politique. Il convient toujours de laisser une place au futur. Faute de quoi, il y aura un maximalisme de la dépression française, incompatible avec toute possibilité de sauvegarde. Les couteaux sont tirés mais la France, si elle le veut, ne sera pas désarmée.



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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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