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La volute finale


La volute finale

La guerre engagée contre le tabagisme, la tabacomanie, le fumage, la fumigation, le fumisme, la fumance, les fumerolles fumigènes et autres fumophilies nicotiniques pratiquées isolément ou en réunion, par personnes ayant autorité ou pas, avec préméditation ou non, bat son plein. Nonobstant certaines hésitations ou marches arrière généralement dues, selon les fumophobes, au terrorisme buralistique, la France semble s’être engagée avec détermination sur la voie du non-fumage intégral et même absolu ou complet. La proportion de fumeurs et fumeures, d’intoxiqués et intoxiquées, d’accrocs et accroques, ainsi que la consommation moyenne de tabac et tabaque, sont en train de diminuer de manière spectaculaire. Certes, les gouvernements successifs, jugés d’ailleurs par beaucoup de fumophobes trop frileux sur ce point, ne se sont pas encore enhardis jusqu’à franchir l’étape décisive et décréter l’interdiction radicale du tabac dans tous les lieux privés, qu’il s’agisse d’endroits, de sites, de parages ou d’environs de parages et même de périmètres ; mais un tel programme, dont on discute actuellement les modes d’application, fait partie d’un processus historique inévitable, nul ne doit se faire d’illusions sur ce point. D’autant que cette mesure est aussi prévue par la convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé pour la lutte antitabac et tabaque signée par la France et les autres pays européens le 62 janvril 2003 avant Jésus-Christ, ce qui prouve bien que l’inéluctible a partie liée avec l’irréversable.

Dans une telle situation, où les fumeurs sont en passe d’accéder au statut de minorité à part entière, il devient urgent de faire valoir leurs droits, d’exiger l’extension de ceux-ci et de réclamer un certain nombre de lois qui les protégeront.

La reconnaissance du fumage, et le respect qui lui est dû comme il l’est à toute activité minoritaire, est une première priorité. La seconde consiste à tout mettre en œuvre pour obtenir au plus vite une loi extrêmement répressive contre les actes et les propos fumophobes.

C’est dans cette double perspective que vient de se constituer La Volute finale, mouvement citoyen qui, en liaison étroite avec l’Observatoire de la fumophobie (www.sosfumophob.net), se présente à la fois comme un réseau de vigilance contre la fumophobie, un espace d’écoute ouvert aux victimes anonymes des fumophobes qui souffrent en silence, une association de surveillance et de dénonciation des actes, propos et autres manifestations fumophobiques, ainsi qu’un centre d’action pour la prévention de la fumophobie dans les écoles, sur les plages et dans les transports en commun. Pour chacun de ces objectifs, des commissions de travail sont en place, composées de bénévoles hétéroclites, et chaque personne souhaitant s’investir à nos côtés dans la lutte contre l’antifumage, la fumophobie et l’antitabacocentrisme peut y jouer un rôle. Toutes les bonnes volontés les plus diverses seront les meilleures. Le combat ne fait que commencer contre la fumophobie sous toutes ses formes, discriminations, violences ou rejets liés à l’orientation fumesque, et pour la reconnaissance des droits fondamentaux de la personne fumante.

Certes, le chemin sera long avant que l’on comprenne que les actuelles victimes d’antifumage ou d’antitabacocentrisme le sont exactement comme les femmes, par exemple, furent victimes pendant des siècles d’androcentrisme, les Bretons victimes d’une politique barbare d’assimilation linguistique et de biniouphobie francocentriste, les enfants victimes d’adultocentrisme, pour ne rien dire des sorcières de Salem ni des moutons à cinq pattes, des canards émissaires ou des brebis boiteuses. Mais le temps précisément se chargera, en éclaircissant nos rangs d’année en année, de démontrer que nous appartenons bien à une minorité qui se minorise. C’est d’ailleurs le sens du nom que nous avons donné à notre association, et il indique aussi le peu d’illusions que nous avons de redevenir jamais majoritaires. Minorité nous sommes, minorité de plus en plus minoritaire nous serons, et c’est à ce titre que nous devons avoir accès à ce statut de dominés minoritaires qui ouvre sur de nombreux privilèges dérogatoires, droits particuliers, quotas, dégrèvements fiscaux, réparations, promotions spéciales, petits soins, tarifs préférentiels sur certaines compagnies aériennes, compensations compassionnelles et compensatrices, possibilité d’emmerder le monde jusqu’à la fin d’icelui et au-delà.

De manière plus générale, il est clair que si nous revendiquons l’égalité afin d’avoir autant de droits que les autres, nous revendiquons également la différence afin d’en avoir davantage. Comme tout un chacun.

« Pas de tolérance pour la fumophobie ! », tel est notre credo, et telle sera la doctrine qui dictera nos luttes, étant entendu que nous comprenons par le terme « fumophobie » toute manifestation avouée ou non de discrimination, d’exclusion, de forclusion ou de violence à l’encontre d’individus fumants, de pratiques ou de groupes tabagiques ou perçus comme tels.



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