Accueil Brèves Ennahda : le Doha sur la couture du pantalon

Ennahda : le Doha sur la couture du pantalon


Quel est le point commun entre Nicolas Sarkozy, Hillary Clinton, Tzipi Livni et Rached Ghannouchi ? Non, ils n’ont pas le même tailleur (quoique…). Vous séchez ? En grands de ce monde, ils ont un ami commun : l’émir du Qatar, Hamad ben Khalifa II, qui les a tous reçus dans son humble demeure princière. Eh oui, le bailleur de fonds de la guerre en Libye, gentleman warrior d’une opération de l’OTAN qui fit 40 000 morts parmi la population libyenne pour déloger l’Ubu fou de Tripoli, a l’art des amitiés contradictoires.

Tout récemment, après la victoire tonitruante du parti Ennahda aux premières élections libres tunisiennes, l’émir a officiellement rencontré Rached Ghannouchi, le vénérable « cheikh » du mouvement islamiste. Pas ingrat, ce dernier vient de lui retourner la politesse en le conviant aux premières séances de l’Assemblée constituante nouvellement élue. Dans les rangs non-islamistes, qui représentent 60% des électeurs tunisiens, ne l’oublions pas, on se dit choqué par l’invitation. Qu’un observateur étranger assiste à la nuit de noces entre la Tunisie et la démocratie n’est pas évident aux yeux de tous, surtout lorsque l’on soupçonne l’heureux élu de sérieux penchants phallocratiques voire de tentations polygamiques. Pour Ennahda, le calcul est sans doute autre : s’acheter les bonnes grâces de l’Occident en invitant leur allié, les mauvaises langues diront leur créancier, commun.

Qu’importe, me direz-vous, seule l’intention compte. Et sur ce plan, Ghannouchi ne manque pas de gratitude, qualifiant l’émir qatari de « protecteur des révolutions arabes ». Rien que ça ! Après tout, comment lui donner tort puisque non contente de propulser le PSG en tête du championnat, la dynastie Al-Khalifa s’est faite la muse de la démocratie à Tunis, au Caire, à Benghazi et à Homs. Savamment servie par une diplomatie du carnet de chèques et le soft power panarabe d’Al Jazira, gageons que cette passion pour le pluralisme ne s’arrêtera pas là. Avec tant de bonnes intentions, l’émir du Qatar financera certainement une prochaine campagne de démocratisation… à domicile.



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