Canada : un voile sur le Québec


La semaine dernière, la cour d’appel au Canada a permis le port du niqab lors des cérémonies de naturalisation. Vu d’Europe, cet accoutrement autorisé est incompréhensible. Certes, il est heureux de garantir et de défendre les droits de la personne ; par contre, on peut s’interroger sur la sagesse de la justice de ce pays qui renforce ainsi tous les courants les plus extrêmes hostiles aux valeurs fondamentales de notre civilisation occidentale. Quoi qu’en pense gouvernement conservateur canadien, autoriser les femmes à porter le niqab lors de la cérémonie de naturalisation équivaut à une certaine « talibanisation » de la société canadienne. Désormais, une femme peut, volontairement ou non, se cacher le visage lorsqu’elle prête serment à la reine du Canada, Elizabeth II, souveraine étrangère ; nous assistons ainsi à la célébration d’une culture anachronique.

Si la justice fédérale était soucieuse de préserver l’unité canadienne au long terme, elle imposerait une assermentation bilingue anglais/français obligatoire au lieu d’autoriser le niqab ou la burqa à une petite minorité agissante et influente. Il ne s’agit pas  de voile couvrant les cheveux et le cou, mais d’un masque. Autant dire que nos principes élémentaires de communication disparaissent.

On peut se demander si le souci principal des juges canadiens ne serait pas  plutôt d’aliéner sa minorité francophone, de plus en plus proche des valeurs laïques de la France. Depuis l’arrivée au pouvoir de Pierre Elliott-Trudeau en1968, l’objectif de parti libéral du Canada est de créer une identité canadienne basée sur le multiculturalisme et le bilinguisme – qui reste un échec à l’exception faite des provinces francophones (Québec et Nouveau-Brunswick). Une idée judicieuse pour que le Québec finisse par ressembler à une communauté parmi tant d’autres, noyant ainsi sa spécificité et sa revendication en tant que peuples co-fondateurs du Canada.

Le gouvernement de Stephen Harper a réussi habilement à faire reconnaître « le Québec comme nation au sein d’un Canada uni » en 2007, ce qui a mis en veilleuse le séparatisme dans la belle province ; c’est pourquoi il contestera probablement auprès de la Cour suprême du pays la décision de la cour d’appel. Et ce geste le rendra certainement plus populaire au Québec en pleine campagne pour les élections fédérales.



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est professeur et historien à l’University College London.

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