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Marion l’Européenne

Elle lance la droite civilisationnelle dans une "grande bataille"


Marion l’Européenne
Marion Maréchal (Reconquête!) sur le plateau du journal télévisé de TF1, 6 septembre 2023. D.R.

Après avoir soutenu Eric Zemmour à l’élection présidentielle, Marion Maréchal se présentera pour la première fois devant le suffrage des Français depuis huit ans, en étant tête de liste pour « Reconquête » aux élections européennes. Elle fait ainsi son vrai retour en politique.


Elle dit ne pas se résoudre à voir ses deux filles grandir dans une France où, immigration massive oblige, les sujets de laïcité, d’abayas ou d’insécurité deviennent une préoccupation quotidienne. Quelques minutes avant son passage télévisé, au 20 heures de TF1, l’annonce commençait à circuler. Marion Maréchal a pu confirmer en direct l’information donnée par Eric Zemmour en début de soirée au Figaro : c’est bien elle qui conduira la liste aux prochaines Européennes pour « Reconquête ».

Une bonne droite

Alors que le scrutin n’aura lieu que le 9 juin 2024, nous commençons donc à en savoir plus sur la composition des listes – en tout cas nous avons les noms des têtes d’affiche de la droite nationale. Lundi 4 septembre, Jordan Bardella annonçait qu’il mènerait la liste du Rassemblement national, comme il y a cinq ans. Après les cinq minutes d’antenne accordées par Gilles Bouleau au mouvement « Reconquête », on sait désormais qu’il aura comme principale concurrente Marion Maréchal sur sa droite.

Depuis la fin de séquence électorale de 2022, les discussions bruissaient au sein du jeune mouvement et dans ses alentours, pour savoir qui conduirait la prochaine bataille. La rumeur a circulé d’une rivalité entre Eric Zemmour et Marion Maréchal pour cet enjeu. On a dit cette dernière, mère de deux filles en bas âge, pas totalement désireuse de se lancer à ce point dans la bataille électorale. Finalement, l’intervention sur TF1 clarifie les choses, et Marion Maréchal en a profité pour rappeler les fondamentaux : la ligne sera identitaire. La nièce de Marine Le Pen a précisé que la « grande » bataille allait être « civilisationnelle, historique et vitale » autour de « la défense de notre identité, notre culture, nos valeurs (…) aujourd’hui menacées par la submersion migratoire et par l’islamisation ». Elle a également évoqué le wokisme à deux reprises, ce qui n’est pas courant dans un journal de 20 heures. S’il n’a pas été question de nouveaux débauchages au sein du RN ou de LR, moins encore de fusion des listes avec l’un de ces partis, il a été question de rassemblement des droites. Marion Maréchal a d’ailleurs un point d’accord là-dessus avec… Nicolas Sarkozy, homme de cette rentrée littéraire, comme je l’ai déjà raconté dans ces colonnes.

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Marion Maréchal compte sur la bonne forme des droites, un peu partout en Europe, pour faire « basculer la majorité de l’Union Européenne, tenue par le centre et par la gauche, vers une majorité de la vraie droite », et « donner des réponses européennes au défi collectif » que pose cette submersion migratoire au continent tout entier. Sur TF1, il n’a pas été question en revanche de souverainisme, il n’a guère été question d’indépendance nationale. Est-on loin de la ligne d’un Nicolas Dupont-Aignan ? Ce dernier déclarait en juin que, « si on n’arrive pas à résoudre les problèmes de sécurité, d’immigration, de chômage, de pouvoir d’achat, d’écologie, c’est parce que la France a perdu toute indépendance et toute liberté d’action », et qu’il envisageait d’accueillir sur sa liste Michel Onfray.

Rumeurs

L’annonce de Marion Maréchal pourrait être interprétée par certains comme une passation de pouvoir au sein du mouvement « Reconquête ». Dans un article à paraître aujourd’hui dans l’Express, Eric Zemmour est présenté comme peu passionné par les affaires d’appareil, et, si l’on donne du crédit aux témoignages (anonymes) recueillis par la journaliste Marylou Magal, le parti était carrément en train de se décomposer autour des querelles de personnes, querelles dans lesquelles les uns reprochent aux autres de travailler encore moins qu’eux-mêmes… La défaite de 2022 a forcément laissé des marques, et l’idée que le chef du mouvement s’efface au profit d’autres figures a bien pu être murmurée çà et là sur quelques lèvres. Le parti ne manque pas de talents, avec à sa tête le triumvirat Guillaume Peltier-Marion Maréchal-Nicolas Bay. Mais, devant la question insistante de Gilles Boulleau, Marion Maréchal a tenu à rassurer : « Je souhaite qu’Eric Zemmour soit le candidat en 2027 (…), il a réussi après quelques mois d’existence à réunir près de deux millions d’électeurs et à devenir le quatrième parti de France : peu de personnes dans l’histoire politique récente peuvent se targuer d’un tel succès ». Sans vouloir être désagréable avec la petite-fille de Jean-Marie Le Pen, nous lui rappelons quand même la performance d’un certain… Emmanuel Macron, qui lui, a carrément remporté l’élection en 2017 !

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Dans un sondage IFOP paru dans le Journal du dimanche du 3 septembre, « Reconquête » est annoncé entre 6,5 et 7%, selon les hypothèses, loin derrière les 25% que pourrait obtenir le Rassemblement National. Avec les 8% obtenus en 2019, la liste Les Républicains menée par François-Xavier Bellamy avait pu envoyer huit députés à Strasbourg.

Né sur le pari d’une explosion du Rassemblement national au lendemain de l’échec de celui-ci aux régionales de 2021, le chemin sera difficile pour « Reconquête », qui va devoir jouer des coudes dans le match des droites, alors que son principal concurrent est en train de gagner la bataille de la respectabilité au sein du Palais Bourbon. Marion Maréchal devra être particulièrement convaincante sur les estrades et dans les meetings pour renverser la tendance et motiver les abstentionnistes, la vraie clé de cette élection : en 2019, seuls 50% des électeurs français s’étaient déplacés. Le scrutin n’a qu’un seul tour.




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Professeur démissionnaire de l'Education nationale

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