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Référendum en Ouzbékistan: Tachkent cherche son modèle de développement

En Ouzbékistan, les réformes mises en branle depuis sept ans semblent commencer à porter leurs fruits...


Référendum en Ouzbékistan: Tachkent cherche son modèle de développement
Election présidentielle ouzbèke, à Tashkent, en octobre 2021. © /AP/SIPA

Le 30 avril prochain, les citoyens d’Ouzbékistan, le pays le plus peuplé d’Asie centrale (36 millions d’habitants), seront appelés aux urnes pour s’exprimer sur une nouvelle Constitution.


Beaucoup de pays de l’ex-bloc soviétique ont mis du temps avant de se retrouver sur les rails de la modernisation et de la démocratisation. Héritages du communisme : la lourdeur de l’État et de la bureaucratie, le manque de dynamisme du secteur privé, l’autoritarisme. Après les indépendances des années 1990, il a fallu parfois attendre près de 30 ans avant de voir un véritable décollage. Parmi les pays d’Asie centrale qui montent, l’Ouzbékistan a engagé de nombreux chantiers depuis 2016 dans cette direction. 

Projet « Nouvel Ouzbékistan »

Comme nombre de pays en voie de développement, l’Ouzbékistan a dû avant tout  trouver tous les moyens pour doper la croissance de son économie et mettre en place des réformes de fond qui vont dans le sens du développement durable. Pour y parvenir, il faut une stratégie claire, des dirigeants et un État qui s’engagent dans cette voie. Cela a pris du temps en Ouzbékistan, mais les réformes mises en branle depuis sept ans semblent commencer à porter leurs fruits. Le pays est encore loin des standards internationaux et il devra maintenir le cap sur du long terme. 

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Malgré un net ralentissement des activités du pays pendant la pandémie en 2020, comme partout dans le monde, Tachkent a vu pour la première fois en 2022 son PIB augmenter de 80 milliards de dollars. Cette capacité de rebondir est due entre autres à une politique de décentralisation et de soutien au secteur privé. La pandémie a été un premier test réussi concernant la résilience du pays, lequel est l’un de ceux qui s’en sont le mieux sorti dans la région.  

Avec son projet « Nouvel Ouzbékistan », le président Mirziyoyev, au pouvoir depuis 2016, souhaite consolider et encourager les dynamiques déjà en œuvre. Il s’agit notamment de construire le véritable socle d’une économie prospère qui attire les investissements extérieurs : renforcer l’État de droit, mener une politique sociale plus équitable et renforcer la sécurité et la défense du pays dans un contexte international rendu encore plus compliqué, notamment par la guerre en Ukraine et le départ des Etats-Unis de l’Afghanistan voisin.  

L’Etat cherche à diminuer les écarts de développement sur l’ensemble de son territoire, désenclaver certaines régions et construire des infrastructures modernes prenant en compte les besoins, mais aussi les contraintes écologiques. En même temps, le gouvernement s’engage à améliorer l’offre de santé et d’éducation et à doter le pays d’un système de protection sociale de qualité.

Le gouvernement mise dans son processus de décentralisation sur l’échelon local. Il le fait avec des projets pilotes comme celui des « Quartiers numériques » et « Quartiers sociaux », des systèmes d’informations recensant l’ensemble des problèmes rencontrés par les citoyens dans leur rapport à l’Etat afin de tenter de rationaliser le traitement de ces dossiers et éviter autant que faire se peut des problèmes bureaucratiques.

Parmi ces projets, celui des « villages prospères », lesquels se développeront sur tout le territoire afin de doper le tissu régional. Un quart des Ouzbeks, qui rencontrent des difficultés quotidiennes, sont soutenus par l’État. Cela représente près de 2,2 millions de familles. L’année dernière, l’État a octroyé de nouveaux appartements à 50 000 familles, cette année 90 000, et dans les 2-3 prochaines années, 200 000 familles sans moyens devraient être logées par Tachkent. 

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L’éducation est aussi un chantier majeur – comme pour tout pays qui entend rejoindre les standards internationaux en matière de diplômes. Par conséquent, la formation des étudiants dans deux langues étrangères sera progressivement mise en œuvre dans les établissements d’enseignement secondaire de chaque ville. Ainsi, le français est déjà par exemple enseigné dans 76 écoles du pays (tout comme l’allemand), l’anglais dans 37, le coréen dans 10, le chinois dans six et le japonais dans trois. La France est donc bien positionnée pour devenir un acteur important dans la formation des futures élites économiques et techniques et ainsi jouer un rôle dans le pays à l’avenir.

Mais la compétition est rude… Des établissements d’enseignement professionnel seront créés en collaboration avec la Commission européenne, la Société allemande de coopération internationale (GIZ), la banque KFV, l’ambassade de Suisse en Ouzbékistan et la Fondation EDTSF de Corée du Sud…

Pollution et gestion de l’eau, deux problèmes majeurs du pays

L’Ouzbékistan est riche en minéraux, en gaz, en pétrole et en uranium. Cela représente les ¾ de ses exportations. Ces industries sont polluantes et le pays souhaite faire évoluer son économie vers une transition énergétique, en généralisant notamment l’utilisation de l’énergie solaire. L’objectif visé : 60 % de la consommation énergétique des bâtiments publics du pays produite par l’énergie non carbonée en 2026.

Le pays est aride et comme beaucoup d’autres dans la région, il manque d’eau. Dans le cadre des réformes en cours, des mesures d’urgence ont été prises pour réduire les pertes naturelles dans l’approvisionnement, grâce à la mise en place d’un système continu de gestion des ressources en eau et aux technologies numériques permettant de rationaliser les allocations d’eau à l’agriculture.

Avec une croissance de 1,6% en 2020 et près de 5% en 2022, le pays commence à recueillir les fruits d’une stratégie entreprise en 2016, focalisée sur la modernisation du pays, la diversification de l’économie et la construction d’un Etat de droit. Dans tous ces domaines, la France a une carte à jouer surtout car l’Ouzbekistan est un pays stable, avec un potentiel humain et économique considérable.   



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est chercheur en sciences politiques associé à l’ULB (Bruxelles) et à l’UQAM (Montréal). Publications récentes: "Les Emirats Arabes Unis à la conquête du monde" (2021, MAX MILO), "Les nouvelles menaces mondiales: La grande pandémie du déni" (2021, Mardaga).

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