Accueil Politique Laurent Jacobelli: Emmanuel Macron a perdu sa majorité absolue mais ne paraît toujours pas l’avoir compris.

Laurent Jacobelli: Emmanuel Macron a perdu sa majorité absolue mais ne paraît toujours pas l’avoir compris.

Interview avec Laurent Jacobelli, vice-président du groupe RN à l'Assemblée nationale.


Laurent Jacobelli: Emmanuel Macron a perdu sa majorité absolue mais ne paraît toujours pas l’avoir compris.
Laurent Jacobelli en conférence de presse à Marseille le 6/03/2020 / PHOTO : Alain ROBERT/SIPA 00948762_000010

Le vice-président du groupe RN à l’Assemblée nationale critique les propositions gouvernementales pour soutenir le pouvoir d’achat des Français. Et pour lui, si le gouvernement d’Emmanuel Macron refuse toujours de faire face aux problèmes de l’immigration incontrôlée et de l’insécurité qui sont des préoccupations majeures pour une majorité de nos concitoyens, c’est parce qu’il n’a pas encore accepté que, à l’Assemblée nationale, il est minoritaire. Entretien…


CAUSEUR : Mardi dernier, M. Loubet traitait Bruno Le Maire de « lâche ». Peut-on juger ces propos choquants ?

LAURENT JACOBELLI : Non, en aucun cas. Le mot « lâche » n’est certes pas agréable à entendre, mais il s’agit ni plus ni moins d’un adjectif qualificatif et non d’une insulte. Monsieur Le Maire, qui est un habitué des débats à l’Assemblée, doit accepter que les échanges soient parfois musclés. Par ailleurs, c’est un droit pour les oppositions et même un devoir de critiquer la politique gouvernementale avec les mots justes, lorsqu’elle l’estime mauvaise, contraire à l’intérêt national. En l’occurrence, c’est bien ce que nous avons estimé à propos de la vente prochaine de l’entreprise Exxelia qui était française jusqu’à ce qu’Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie, ne la vende d’abord à une entreprise britannique, ensuite au groupe américain, Heico Corporation.

On a observé ces derniers jours le rejet de sept articles du projet de loi de programmation du budget de 2023, aussi bien par la gauche que par le Rassemblement National et une partie des Républicains. Quel problème majeur y voyez-vous ? Quelles mesures souhaiteriez-vous voir figurer dans ce projet de loi ?

Il s’agit de distinguer entre l’ensemble du projet de loi, auquel nous nous opposons, et les amendements et articles précis sur lesquels nous serons prêts à voter s’ils correspondent à l’intérêt général des Français. En l’occurrence, nous estimons que la politique court-termiste, du chèque, du gouvernement ne répond absolument pas aux attentes des Français, qui souhaitent que leur pouvoir d’achat soit soutenu sur le long terme, en particulier dans des domaines qui touchent à leur vie quotidienne. En plus de ne soutenir que très partiellement le pouvoir d’achat, les mesurettes du gouvernement contribuent à creuser le déficit public abyssal de l’Etat (161 milliards d’euros), ce qui est profondément incohérent.

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Parmi les mesures que nous aimerions voir figurer dans ce projet de loi, il y a le passage de la TVA sur l’essence de 20% à 5,5%, au même niveau que les produits alimentaires, comme Marine le Pen l’avait proposé durant la campagne présidentielle. Ensuite, nous soutenons toujours le rétablissement de la demi-part fiscale pour les veufs et les veuves, injustement supprimée par François Hollande et qui constitue une véritable injustice. Nous souhaitons ardemment que ces deux mesures de bon sens soient prises en compte par le gouvernement, au lieu d’être rejetées d’emblée, du simple fait qu’elles proviennent de notre groupe.

Emmanuel Macron a-t-il vraiment compris qu’il était en minorité à l’Assemblée ?

L’attitude du gouvernement d’Emmanuel Macron et de la majorité est dans l’ensemble très incrédule. Ils ont perdu leur majorité absolue au mois de juin, mais ne paraissent toujours pas l’avoir compris, leurs pratiques sont les mêmes qu’en 2017. Chaque vote mettant en échec leurs amendements ou leurs articles de loi est pris comme un affront, une anomalie. Nous l’avons toujours dit, tout ce qui ira dans l’intérêt des Français, nous le voterons. C’est assez clair me semble-t-il. Mais tant que le gouvernement ne voudra pas comprendre qu’il gouverne désormais en minorité, et qu’il doit être prêt à faire des compromis, il continuera à essuyer des échecs, à l’image du rejet de sept articles sur les vingt-cinq du projet de loi de programmation du budget pour 2023. Et ce n’est pas en traitant les partis d’opposition d’irresponsables, comme l’avait fait Gabriel Attal au mois de juillet à notre encontre (et ce qui en l’espèce est insultant), qu’ils vont faciliter le débat.

La menace de l’usage de l’article 49, alinéa 3, a été brandie par le président pour inciter les députés à voter la réforme des retraites qui arrivera au printemps prochain. Que répondez-vous face à cet ultimatum ?

Cette stratégie n’est pas étonnante et ne nous fait aucunement peur. D’une part, il semble qu’elle est surtout dirigée vers Les Républicains, sur lesquels le gouvernement compte pour faire voter ses textes à une courte majorité, sans faire trop de concessions. D’autre part, la réforme des retraites n’est pas une urgence pour notre pays, comme l’a rappelé Marine le Pen à plusieurs reprises ces dernières semaines. Ce serait très malhonnête de part du président de brandir cet article de la constitution pour qu’un tel projet de loi soit voté. A quoi cela servirait-il si ce n’est à faire porter le chapeau du blocage institutionnel à l’opposition ?

Encore une fois, si Emmanuel Macron souhaite gouverner, il doit accepter de dialoguer avec toutes les oppositions et pas seulement les Républicains ou une partie de la NUPES, qu’il est bizarrement toujours mieux disposé à écouter que nous. Menacer les oppositions de faire passer un tel texte par la force, en cas d’absence de majorité, est indigne.

Quelles autres mesures souhaiteriez-vous précisément porter dans les prochains mois ?

Hormis les mesures relatives au pouvoir d’achat, il y a le référendum sur l’immigration proposé par Marine le Pen, la suppression du droit du sol, le retour des étrangers en situation irrégulière dans leur pays d’origine. Contrairement aux propositions de la NUPES d’ailleurs, ces mesures ne sont pas minoritaires dans notre pays. Aujourd’hui, sept français sur dix sont favorables à une politique de l’immigration plus ferme. Il s’agit d’une vraie préoccupation. Que le gouvernement en veuille ou non, nos propositions de loi sont prêtes et rédigées depuis la présidentielle et nous les soumettrons à la discussion en temps voulu.

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Quelle position prendrez-vous sur l’euthanasie ?

A l’image de tous les sujets sociétaux, nous pensons qu’il s’agit d’une question de conscience, sur laquelle chacun doit s’exprimer librement. Par conséquent, nous ne donnerons aucune consigne de vote à notre groupe lorsque le débat s’ouvrira sur le sujet. Chaque député votera selon ses propres convictions. Pour autant, un sujet aussi sérieux mériterait un véritable débat national et non un simple vote à l’Assemblée, qui pourrait paraître lointain pour les Français, qui sont tous concernés par la fin de vie. Un référendum, comme l’a déjà proposé Marine le Pen, serait probablement le mode de consultation le plus opportun, pour que toutes les tendances puissent donner leur avis.

Les précédentes élections en Suède et en Italie ont donné pour vainqueur des coalitions de droite, avec comme lignes d’action la lutte contre l’immigration et l’insécurité. Est-ce un signe que l’Europe se réveille face à la vague migratoire, à l’insécurité ?

Ce mouvement en Europe est bien sûr une excellente nouvelle pour nous, surtout que ce sont des tendances de droite assez diverses qui ont été élues. Sans trop nous vanter, je crois que nous pouvons attribuer ce mouvement de fond au Rassemblement national, qui aborde depuis de nombreuses années et sans ambiguïtés les questions d’insécurité, de contrôle indispensable de l’immigration et de préférence nationale. La ligne mondialiste et européiste d’Emmanuel Macron, du groupe Renaissance, ainsi que de Madame Von der Leyen, a largement exposé ses limites, c’est un échec total. Le sentiment national n’a pas disparu depuis le traité de Maastricht, il est toujours bien présent et les évènements de ces deux dernières années (la crise sanitaire, la guerre en Ukraine) l’ont montré.

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Comment abordez-vous les élections à venir, en particulier les sénatoriales et les européennes ? Craignez-vous qu’une participation accrue aux scrutins vous pénalisent ?

Les scrutins des prochains mois, en particulier les sénatoriales, qui se tiendront en septembre 2023, nous remplissent d’optimisme. Les élus locaux auront pu voir ces dernières années notre investissement et notre sérieux, aussi-bien en région qu’en circonscription. S’agissant des européennes, nous avons bon espoir que les Français verront que nous agissons véritablement dans leur intérêt au Parlement européen. D’ailleurs, ils l’ont déjà prouvé au précédent scrutin de 2019, en plaçant de nouveau le Rassemblement national en première position, avec 23,3% des voix. Nous espérons une grande participation aux prochaines élections, qui ne pourra que nous bénéficier. Aujourd’hui, le Rassemblement national est le parti préféré des Français et les solutions que nous proposons sont majoritaires dans le pays. Aux élections législatives, nous avons élu 89 députés et je ne doute pas qu’avec une participation plus ample, nous remporterons de plus grands succès encore dans les prochaines élections. Elles seront un excellent indicateur en vue des élections présidentielles de 2027, que nous comptons gagner, aux côtés de Marine le Pen.



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Journaliste franco-britannique

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