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Le PS plombé par le mâle blanc


photo : zak mc (Flickr)

L’affaire DSK n’en finit plus de secouer le PS. Certes, l’élimination du favori ouvre des perspectives inattendues aux autres candidats, mais tous subissent la dégradation de l’image de leur parti. Le scandale est devenu une métaphore des clivages ethniques et sociaux qui pourrait bien coûter une quatrième défaite présidentielle consécutive au PS. Celui-ci apparaît désormais comme le parti de l’homme blanc, riche, d’âge mûr, face accusé de crimes sexuels à l’encontre d’une mère célibataire, africaine d’immigration récente et musulmane de surcroît. La totale.

Haro sur la gauche caviar-Marrakech-Berluti

Dans un célèbre épisode du roman de Charles Dickens Le conte de deux cités, le carrosse du marquis de Saint-Evremond – caricature de l’aristocrate d’Ancien régime qui ne mérite de meilleur sort que la lanterne – écrase un fils d’un paysan – incarnation du « bon peuple ». Sans même s’excuser, le noble jette une pièce de monnaie au père endeuillé. Alors que la tradition dont ils font un usage rhétorique immodéré fait des socialistes les défenseurs naturels du paysan Gaspard, les voilà affublés des habits du marquis.

Si la réalité ressemblait au conte de fées raconté par « Terra Nova » – think-tank ex-strauss-kahnien – la gauche aurait pu faire oublier qu’elle avait enterré la lutte des classes sous les causes sociétales et mobiliser toutes ses réserves d’indignation et de bons sentiments droits-de-l’hommistes en soutenant Nafissatou Diallo.

Il aurait suffit que le coupable présumé fût Brice Hortefeux, Jean-Marie Le Pen ou Vincent Bolloré. On entend d’ici les accents de colère mal contenue qu’auraient eu les hiérarques socialistes si le grand méchant blanc de la suite 2805/2806 du Sofitel Manhattan avait été l’un de ceux-là. Ils auraient chanté l’air de « on vous l’avait bien dit », établissant un lien direct allant de la fortune à la prédation sexuelle en passant par le racisme d’Etat ordinaire, la politique sécuritaire et le mépris pour la victime. Mais rien n’avait préparé les chantres de la vertu anti-sarkozyste à cette situation dans laquelle le « méchant » présumé est l’un des leurs.

Quelques heures à peine après l’annonce de l’arrestation de DSK, Nicolas Sarkozy, président médiocre mais animal politique inimitable, confiait à ses proches que le PS venait de perdre la bataille de la morale. Au début, les socialistes ont pu se rassurer avec des sondages indiquant que leurs sympathisants n’avaient pas changé d’intentions de vote. Mais depuis, le débat s’est mué en empoignade morale sur laquelle planent l’ombre de la gauche caviar-Marrakech et le souvenir de chaussures Berluti à 11.000 balles.

Le candidat devra être une femme ou « divers »

C’est que le scandale pose des questions embarrassantes à un parti qui, de Paris à Toulouse en passant par Lyon, a réussi à conquérir les villes les plus bourgeoises de France sans qu’on remette en cause sa légitimité à représenter les faibles contre les forts. Comment peut-on être riche et socialiste ? L’appartenance à la gauche suppose-t-elle une éthique personnelle supérieure ? Ces questions vont surplomber une campagne présidentielle qui risque de se jouer « affaires contre affaires », sauf que les mœurs auront, sinon remplacé, au moins surpassé l’argent au palmarès des turpitudes.

Le cas du maire-sénateur PS de Neuilly-sur-Marne complique encore les choses. Il aura fallu deux ans après la confirmation par la Cour d’Appel de sa condamnation pour agressions sexuelles d’une employée municipale pour que le PS déclenche une procédure disciplinaire interne. Ce geste tardif risque de se révéler franchement insuffisant. De plus, il va falloir compter avec le nouvel avocat de Nafissatou Diallo, maître Kenneth Thompson, qui entend bien faire du procès une production à grand spectacle sur la lutte de classes, des races et des sexes. Pour déminer ce terrain mouvant, le PS doit apparaître non pas comme le porte-parole de la Victime mais comme sa seule personnification.

Dans ces conditions, le candidat idéal est une candidate ou un représentant de la « diversité » – la vraie, ce qui exclut les Juifs et, dans une moindre mesure, les Asiatiques – ou encore mieux, les deux à la fois. John Lennon ne disait-il pas que « la femme est le nègre du monde » ? Au PS, les « vieux-mâles-blancs » ont mangé leur pain de la même couleur.



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est historien et directeur de la publication de Causeur.

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