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«Le Nouvel Obs» annonce la couleur: il n’y aura pas plus progressiste

"L’Obs" redevient "Le Nouvel Obs", ça change tout… ou pas !


«Le Nouvel Obs» annonce la couleur: il n’y aura pas plus progressiste
France inter se demande : "L'Obs est-il woke ?" L'hôpital, la charité... Cécile Prieur face à Sonia Devillers, mai 2022. Capture YouTube.

Pour se relancer, l’hebdomadaire progressiste affiche le socialiste François Hollande et l’écolo-féministe Salomé Saqué sur sa nouvelle couverture. Causeur s’est évidemment jeté sur cette publication merveilleuse !


Après avoir été Le Nouvel Observateur puis L’Obs, l’hebdomadaire de gauche s’appelle depuis le 21 mars 2024 Le Nouvel Obs. Dans son éditorial, Cécile Prieur, directrice de la rédaction, annonce la couleur : il n’y aura pas plus progressiste que Le Nouvel Obs. Par conséquent, l’hebdomadaire ne se laissera pas « dicter son agenda par les réactionnaires » et proposera « une série de grands débats entre forces progressistes de gauche ». Curieusement, et à l’encontre des vœux de Cécile Prieur, ce premier numéro du Nouvel Obs consacre plusieurs dossiers aux méchants, aux réacs et autres fachos, en particulier dans le domaine dit de la culture. Mais commençons par le début. Le premier « grand débat progressiste » que propose l’hebdomadaire est un remède contre l’insomnie, un barbiturique puissant administré par deux sommités de l’éthérisation verbale : d’un côté, l’écolo-féministe Salomé Saqué, alias Tisane Verte ; de l’autre, notre soporifique ex-président de la République, François Hollande, alias Camomille Rose. Le « grand débat » sonne creux : du vide et du vent étalés sur six pleines pages à propos de la jeunesse et du « choc des générations ». Attention, le marchand de sable va passer…

Bonjour l’angoisse

« Jamais n’ont pesé sur la jeunesse autant de sujets d’angoisse », récite François Hollande en battant un peu sa coulpe et beaucoup celle de « [sa] génération ». Tout n’a pas été parfait pendant sa présidence mais, tient-il à souligner, il a respecté au moins un de ses engagements : « Le mariage pour tous. Ça a été une rude bataille. » Et puis il y a eu la COP21, quel succès ! « Quant aux libertés, dit-il à Salomé Sacqué qui commence à s’assoupir, malgré la vague terroriste qui a déferlé sur la France durant mon mandat, elles ont été préservées ! Posez-vous la question de savoir ce qui serait advenu si je n’avais pas été là ! » On croit rêver. Salomé Sacqué, de son côté, s’inquiète pour les jeunes qui vont payer les pots cassés par les seniors, qui sont de plus en plus dépressifs et pourtant stigmatisés, dont « l’engagement contre les discriminations est caricaturé en “wokisme” ». Snif ! En plus, se lamente Hollande, il y a « le défi que nous lance la jeunesse des quartiers populaires. […] Elle se heurte aux discriminations et une partie d’entre elle peut être tentée par une forme de séparation, voire par le communautarisme religieux ». Cet énoncé mécanique aux relents victimaires à la mode caractérise parfaitement François Hollande, homme politique aboulique, pusillanime et sans réelles convictions, adepte opportuniste de la sociologie gauchisante refusant de voir la réalité en face. Sa conclusion, dérisoire, est le fruit d’une vie politique passée à concevoir des « synthèses » consensuelles et molles : « L’enjeu est d’arriver à porter un projet politique qui emmène les jeunes vers des solutions possibles, pour leur bien-être comme pour leur insertion. » J’en vois qui dorment au fond de la classe. Réveillez-vous ! Nous allons maintenant évoquer un sujet prioritaire largement décrit dans ce même numéro du Nouvel Obs : l’offensive de l’extrême droite sur la culture !

Quand ils entendent le mot culture, ils sortent leur revolver…

« Une fièvre réactionnaire s’abat sur le cinéma, le théâtre, la musique… », écrit, épouvanté, Julien Martin, journaliste politique qui a officié sur Rue89 puis France Info avant de rejoindre Le Nouvel Observateur en 2011. Le cinéma français, affirme-t-il, est la cible de la « fachosphère ». La preuve : si Avant que les flammes ne s’éteignent, le film de Mehdi Fikri dans lequel « Camélia Jordana campe une sœur courage [la pour le moins « controversée » Assa Traoré, en l’occurrence] décidée à venger son frère, mort entre les mains de la police », n’a pas eu le succès escompté – bide incontestable : 23 000 spectateurs au total ! – c’est à cause des hordes de fachos qui ont lui donné des notes lamentables sur le site d’Allociné.

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Tous les films récents sur « l’immigration, les violences policières, la “théorie du genre” » ont été des flops ? Rien à voir avec la lassitude des spectateurs devant ce cinéma propagandiste de faible qualité cinématographique ; ces échecs sont dus à la très efficace « extrême droite » qui a lancé « une offensive résolue, massive et coordonnée sur le terrain culturel ». L’auto-désigné « monde de la culture » a peur.  « L’extrême droite est en passe de gagner la bataille culturelle. […] Elle tient le haut du pavé, elle a des relais puissants », s’émeut le journaliste en rapportant sans rire les propos d’artistes croyant voir le diable réactionnaire derrière l’insuccès de leurs misérables productions. Toutefois, ironise Julien Martin, un film a échappé aux critiques de l’extrême droite, et pour cause : Vaincre ou mourir, qui a « donné le beau rôle aux royalistes catholiques », a été financé en partie par « le bras argenté de cette bataille culturelle, l’ultra-conservateur Vincent Bolloré ». Deux remarques à l’intention de notre journaliste ignorant ou, plus sûrement, de mauvaise foi : 1) Vaincre ou mourir a subi, pendant plusieurs semaines, les critiques hallucinées de toute une caste journalistique de gauche, entre autres sur France Inter et dans Télérama. Les colonnes infernales de Libé lui ont consacré une Une, un éditorial et cinq pleines pages de destruction massive. Des députés de gauche et d’extrême gauche ont défilé devant les micros des radios publiques ou écrit des tribunes dans Le Monde pour dire tout le mal qu’ils pensaient de cette « offensive réactionnaire » cinématographique – malheureusement pour eux, l’effet recherché s’est transformé en publicité incitative et le film sur Charrette a été un succès. 2) Vincent Bolloré, actionnaire principal de Canal +, est le premier financeur de la création cinématographique française (178 millions d’euros en 2023, loin devant France TV, 75 millions) – il fut entre autres le « bras argenté » de Justine Triet en lui apportant l’essentiel du financement nécessaire pour la création de son Anatomie d’une chute – le capitalisme tant décrié par la réalisatrice au moment de recevoir sa Palme d’Or a parfois du bon.   

Les réacs s’attaqueraient également à certains artistes par pur racisme ou par islamophobie. Aya Nakamura « est clouée au pilori par une France rance et dénigrée sur les réseaux sociaux par des groupuscules d’extrême droite », affirme Julien Martin en parodiant le style de Libé. Médine, personnage qui s’est distingué entre autres en qualifiant Rachel Khan de « resKHANpée », serait une autre victime de l’extrême droite – pourtant « le rappeur controversé n’a jamais été condamné », tient à préciser le journaliste qui accuse par ailleurs la « fachosphère » de s’en prendre au wokisme, « terme vidé de sens », et au service public, « une marotte de l’extrême droite, convaincue que l’audiovisuel public est un repaire de gauchistes », alors que, comme chacun sait, le wokisme n’existe pas et l’audiovisuel public est un exemple de pluralisme. Bref, conclut Julien Martin, l’extrême droite nuit par tous les moyens possibles au « monde de la culture », monde qu’il s’agirait de définir quand même un peu…   

Le numéro de septembre 2023 de « Causeur »

La France (festiviste) a peur

Au contraire de ce qu’il aimerait laisser penser, le « monde de la culture » que décrit le journaliste du Nouvel Obs n’a strictement rien à voir avec la culture ou l’art. En revanche, ces derniers ont effectivement été remplacés par le « monde de la culture », c’est-à-dire le régime culturel du divertissement, des loisirs, de l’art subventionné et des médias abêtissant, distrayant et domestiquant les masses. Les arts sont détruits par les poisons modernistes, progressistes et wokistes – la diversité, l’inclusivité, le féminisme, l’antiracisme, la tolérance et l’ouverture à l’autre corrompent, au nom du Bien, le théâtre, la musique et la littérature. On révise les œuvres anciennes à l’aune des préceptes wokes et on contraint les nouvelles à se soumettre au « réalisme progressiste ». L’industrie culturelle, qui englobe tout à la fois les arts dévoyés susnommés, les médias, le cinéma, les séries et la publicité, est une machine redoutable, omniprésente, totalitaire ; la qualité artistique de ses « œuvres » est inversement proportionnelle à sa production infinie, massive, exponentielle. Les artistes ignorant tout des injonctions progressistes, du système de cour de la rue de Valois, des manigances médiatiques, des arcanes du commerce de l’art internationalisé, des méandres bureaucratiques menant aux subventions publiques, des discours rebellocrates à tenir lors de la remise d’un prix, sont voués à disparaître. Julien Martin croit effrayer son monde en décrivant une fantasmagorique « offensive de l’extrême droite contre la culture ». Sans doute est-il persuadé que le ministère de la Culture et le Printemps des poètes relèvent, l’un de la culture et l’autre de l’art poétique – alors qu’ils sont les preuves incontestables que l’une et l’autre ne sont plus que des mots, des faux-semblants, de la culture en simili et de la poésie en tube.

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À ce propos, dans les pages “Culture” du même numéro du Nouvel Obs, un article est consacré à la « poétesse féministe » Rim Battal. Vous ne connaissez pas ? Vous ne perdez rien. Si l’hebdomadaire évoque cette scribouillarde soporative, c’est surtout parce qu’elle est une des signataires de la tribune publiée dans Libération contre Sylvain Tesson. Cette tribune aurait été suivie par une « contre-offensive violente de la réacosphère » – on n’en sort pas ! « J’ai été scandalisée, pleurniche la poétesse qui parle comme une artiste officielle du régime festiviste et institutionnel parfaitement décrit naguère par Philippe Muray, que le fruit de notre travail, à nous qui allons sur le terrain défendre la poésie partout et par tous les moyens, puisse bénéficier à un mec de l’extrême droite et, par extension, à l’extrême droite. »

Rassurons immédiatement Rim Battal : le « fruit de son travail » et de celui de ses congénères ne bénéficient ni à l’extrême droite, ni à l’extrême gauche, ni à personne, puisque, fort heureusement, 99,99 % des habitants de ce pays ignorent tout de la production graphomaniaque et nombriliste de ces ronds-de-cuir de la culture, de ces représentants en poésies en toc, de ces commis d’office aux tâches politiques des salons littéraires, de ces placiers en vers incertains et en tribunes punitives, de ces avortons plumitifs qui, comme dirait Cyrano de Bergerac, ne découvrent du talent qu’aux mazettes et, terrorisés par de vagues gazettes, se disent sans cesse : “Oh, pourvu que je sois dans les petits papiers du Nouvel Obs”. Rim Battal y est. Ce qui lui permet d’annoncer qu’elle aimerait bien, pour se faire connaître, déclamer ses vers lors de « la première partie d’un concert de rap ou de Juliette Armanet ». J’ai lu quelques-uns de ces fameux vers et vous fais grâce de ce clystère. Sachez toutefois que Rim Battal « explore et joue avec les différentes facettes des genres, esquissant ainsi un nouveau modèle de féminité » et que « sa poésie s’inscrit dans une tradition poétique de l’intime, où l’intime est politique ». Si, malgré tout, vous avez envie d’y aller voir, libre à vous – mais vous ne pourrez pas dire que je ne vous ai pas prévenus.

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Amateur de livres et de musique. Dernier ouvrage paru : Les Gobeurs ne se reposent jamais (éditions Ovadia, avril 2022).

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