Ce coquin de Kiko!


Ce coquin de Kiko!
Image extraite de «Kikobook» de Gérard Kikoïne(DR)
Image extraite de «Kikobook» de Gérard Kikoïne(DR)

Même s’il fut l’un des artisans les plus facétieux et les plus doués du cinéma pornographique français, la « carrière » de Gérard Kikoïne dans le genre fut relativement courte : une petite trentaine (quand même !) de films entre 1974 et 1983. Certes, il continuera de tourner jusqu’au début des années 90 mais ce ne seront plus ses « films d’Amour » qui firent sa réputation comme les films fantastiques qu’il a tournés pour le célèbre producteur Harry Alan Towers. Possédant de nombreuses et précieuses archives, Kikoïne nous offre aujourd’hui, avec son Kikobook un savoureux témoignage sur une époque définitivement (?) révolue et revient avec beaucoup de verve et d’humour sur son œuvre.

La première chose qui frappe chez lui, c’est son amour profond pour le cinéma. Même s’il a œuvré dans le cadre d’un genre totalement méprisé par les tenants du bon goût, Kikoïne ne l’a jamais fait par-dessus la jambe et c’est un grand plaisir de l’écouter parler de ses films en terme de direction artistique, de montage, d’écriture et de mise en scène.

Avant de devenir réalisateur, il a d’abord travaillé pour son père qui possédait une société de doublage. Doubleur et responsable de postsynchronisation, il devient par la suite monteur son, notamment pour les films de Jess Franco. Petit à petit, il devient monteur et travaille pour les précurseurs du cinéma pornographique en France : Claude Mulot (alias Frédéric Lansac), Michel Barny, Francis Leroi. En 1974, il passe derrière la caméra pour un film érotique « soft » (L’Amour à la bouche) et finit par franchir le pas en 1977 en réalisant son premier film hard (Parties fines).

Richement illustré, le livre nous fait revivre l’épopée de ces tournages, entre anecdotes croustillantes et réflexions souvent pertinentes sur son métier : les lieux de tournage improbables, les « trucs » du métier, les apartés vaudevillesques comme ce moment où l’un des comédiens, en galante compagnie, se retrouve comme Jean Rochefort dans Un éléphant, ça trompe énormément sur une corniche afin d’éviter un mari revenu plus tôt que prévu !

Chez Kikoïne, le sexe est joyeux, ludique, transgressif, pratiqué dans le respect…

Car Kikoïne, et son équipe témoigne également dans ce sens, a toujours manifesté un grand respect à la fois pour le spectateur mais également pour ses comédiens. La dernière partie de l’ouvrage est consacrée à des hommages tendres et amusés à ses muses comme Marilyn Jess, Brigitte Lahaie, Julia Perrin, Cathy Stewart et à ses acteurs dont l’incontournable Alban Ceray, l’extra-terrestre Dominique Aveline ou Jean-Pierre Armand.

Finalement, le Kikobook est un précieux document sur un genre, le cinéma pornographique, dont on oublie trop souvent qu’il fut aussi une branche d’une certaine contre-culture. Ostracisé, maintenu dans un ghetto et réduit désormais à une morne besogne mercantile, ce cinéma a pourtant porté en lui, à ses débuts, les promesses d’une libération sexuelle totale. Chez Kikoïne, on retrouve des traces de cette belle utopie : le sexe y est joyeux, ludique, transgressif et pratiqué dans le respect de tous. Pour prendre un exemple précis, les actrices avaient encore le droit, par exemple, de refuser certaines pratiques ne leur convenant pas.

Cette bonne humeur, cette joie de tourner ensemble, on la retrouve dans ce livre qui se feuillette comme un album de vacances, le sourire aux lèvres et une petite pointe de nostalgie pour une époque où tout paraissait plus léger, plus vivant et que Kikoïne parvient à faire revivre avec beaucoup de talent…

 

Kikobook, Gérard Kikoïne, Ed. de l’œil, 2016.

Kikobook: Le livre cul(te) de Gérard Kikoïne

Price: 463,02 €

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est cinéphile. Il tient le blog Le journal cinéma du docteur Orlof

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