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Futurs parents : faites les 104 coups!


Futurs parents : faites les 104 coups!

Vous voulez un enfant : faites les 104 coups ! Il y a quelques jours, on apprenait en effet dans Le Parisien qu’il faut en moyenne faire l’amour 104 fois pour que l’improbable rencontre entre un ovule et un spermatozoïde ait lieu. Soit quatre fois par semaine pendant six mois – donc, petits malins, inutile d’essayer d’atteindre ce score en trois jours, ça n’augmentera pas vos chances.

Cette importante révélation nous est offerte par une marque américaine de tests de grossesse qui a suivi 3000 femmes désireuses de devenir mères et ayant accepté de consigner avec précision les dates auxquelles elles ont pratiqué le stupre et la fornication comme disait Brassens.

Ne vous méprenez pas, tout ça est très sérieux. On ne rigole pas avec le « désir d’enfant », sauf si on veut se faire fouetter par Ségolène Royal (ne rêvez pas les amis, je n’ai pas dit par Sarah Palin). Et il faut être vraiment être mauvaise femme et de petite vertu comme qui vous savez pour ne pas trouver que le « droit à l’enfant » devrait être inscrit dans la déclaration universelle des droits de l’Homme. Pour autant, je ne suis pas un monstre insensible : j’admets qu’il est fort bon que la science aide à procréer tous ceux qui se sentent de taille à être parents et que la nature a privés de cette faculté. On me permettra cependant de remarquer que la technologie ne fait pas toujours bon ménage avec la poésie. Ainsi trouve-t-on dans le commerce des tests d’ovulation qui permettent aux femmes de savoir à quel moment elles sont fécondes et de siffler en temps voulu le reproducteur sélectionné. Chéri, c’est l’heure ! Ça fait envie, non ?

Ventre à moitié plein ou à moitié vide

Quoi qu’il en soit, cette étude révèle un changement de perspective considérable. Hier on jouait avec le risque, aujourd’hui on évalue ses chances. Des générations de femmes ont pensé qu’elles « tombaient enceintes » – la sémantique dit tout – trop vite et trop souvent. La mienne trouve que pour atteindre le nirvana de la grossesse – et de la maternité qui s’ensuit généralement – les femmes doivent trop payer de leur corps. En somme, c’est une histoire de ventre à moitié plein ou à moitié vide. De fait, pour nos grands-mères et aïeules, la grossesse était parfois une joie, enfin je suppose, et souvent une catastrophe, voire, pour celles qui avaient fauté hors-mariage, une malédiction. Pour une partie de mes contemporaines, elle semble être devenue le sens même de la vie, la seule expérience dont on ne pourrait pas se passer. C’est à se demander si le fameux « désir d’enfant » ne serait synonyme de renoncement au désir tout court.

Mais et le sexe dans tout ça ? Des siècles durant, les Eglises ont mis le désir hors-la-loi. La jouissance était la passagère clandestine ou, pire, l’effet pervers de la volonté d’engendrer. La déconnection du plaisir et de la procréation a permis aux hommes et aux femmes de se soumettre librement aux tourments du sexe et de l’amour et même à l’aliénation qui va avec. Remplacer la religion de Dieu par celle de l’enfant, cela ressemble furieusement à un retour à la case départ.

Ne croyez pas que je suis favorable à la décroissance démographique – ni d’ailleurs, à la décroissance tout court. La reproduction a toujours été un besoin de l’espèce et c’est heureux. Pour autant, je n’aimerais pas qu’elle devienne la fin ultime d’une humanité qui n’aurait plus d’autre rêve que celui de sa propre conservation.



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Fondatrice et directrice de la rédaction de Causeur. Journaliste, elle est chroniqueuse sur CNews, Sud Radio... Auparavant, Elisabeth Lévy a notamment collaboré à Marianne, au Figaro Magazine, à France Culture et aux émissions de télévision de Franz-Olivier Giesbert (France 2). Elle est l’auteur de plusieurs essais, dont le dernier "Les rien-pensants" (Cerf), est sorti en 2017.

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