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Donna Summer est morte : God can dance


La disparition avant hier de celle qui fût et demeurera « la reine du Disco » donne lieu à des nostalgies souvent réductrices, mais aussi à de jolis papiers tels celui de Valérie Duponchelle dans Le Figaro.

Egérie des pistes de danse depuis 1975, l’artiste a enflammé toute une époque que les moins de cinquante ans ne peuvent pas connaître. Libérée en l’église où elle chantait du gospel, sa voix d’une parfaite suavité constitua la ligne de force de son existence, son don et l’arme la plus douce pour traverser la vie de manière improbable, légèrement en marge de l’époque : elle ne vécut ni son rêve de constituer un « girl group » ni celui de participer à la comédie musicale Hair. Mais, retenue pour la version allemande, elle sut charmer sa destinée en imposant à l’inventeur du disco Giorgio Moroder ses propres paroles sur un morceau instrumental qui deviendrait le très explicite Love to love you baby[1. Marc Cohen me rappelle que I Feel Love restera sans aucun doute comme le plus bel hommage rendu à Kraftwerk. J’y ajouterai que tous les vrais bons métalleux sont reconnaissants à la diva disparue].

La contribution au siècle de cette pure incarnation de la féminité à la sensualité intégrale et contagieuse ne se résume pourtant pas à l’hédonisme des années soixante-dix que ses feulements, râles, cris et chuchotements célébraient d’un continent l’autre comme une vague de plaisir bousculant les anathèmes puritains. Woodstock, le Flower Power le mouvement Hippie avaient déjà affublé l’érotisme de son lot de slogans et d’injonctions à jouir.

Donna Summer, elle, l’aura toujours malicieusement et intégralement magnifié. C’est moins en terme de simple « libération des mœurs » – triste nostalgie des échanges corporels politiques – qu’en femme libre et fragilement accomplie qu’elle tendit ses longs bras à un monde enchanté par ses propres frasques, chaloupant des hanches et des épaules, plus près de la figure d’une généreuse Madone que de celle d’une prêtresse hédoniste. Chrétienne, gageons qu’elle aura gagné le paradis en un tour de hanche, et que, s’il existe, Dieu peut dorénavant danser.



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Isabelle Kersimon est journaliste.

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