À l’échelle internationale, 2013 est sans conteste l’année Bowie : une exposition hommage à l’artiste caméléon a attiré les foules et le gotha rock à Londres cet été (événement dont Causeur vous a rendu compte), précédée d’un album qui tient la route comme un bon T. Rex, publié sans tir de sommation en mars. Pas moins de cinq titres en ont été extraits depuis, avec cette pure aberration : les deux gros tubes potentiels (« Dancing Out In Space » et « How Does The Grass Grow? ») n’ont pas bénéficié d’une sortie en single. À écouter : « Valentine’s Day ».
Enterrés vivants par le légendaire flair infaillible de la critique hexagonale à la sortie de leur album, les Strokes ont pourtant été les premiers à décoller les oreilles cette année. La musique pop-rock des New-Yorkais nous tripote l’âme comme Gershwin lèche le Manhattan de Woody Allen : amoureusement et frénétiquement. Ce cinquième essai intemporel porte l’intensité de vie à ébullition, normal donc que les béni-bobos soient passés à côté. À écouter : « Slow Animals ».
En mars toujours est sorti le nouvel album électro-rock du berlinois IAMX. Dans les années 80, un tel disque aurait investi les hit-parades naturellement (avec une meilleure pochette, soit). Mais quelque chose s’est perdu en route depuis, comme le savent tous les bons vivants. Les moindres aspérités se meurent. Il est possible de mesurer l’étendue des dégâts de la grande dénaturation générale actuelle à travers de simples faits anodins, comme par exemple l’omniprésence automatique du mot gourmand(e) ou gourmandise dans les textes culinaires quand rien n’en justifie l’usage (le livre anglais Crazy for Chocolate est devenu Gourmandises au chocolat dans sa version française…). À écouter avec gourmandise : « The Unified Field ».
Le printemps a aussi charrié dans son sillage le retour des vétérans new wave de Depeche Mode, toujours fringants. À écouter : « Should Be Higher », le meilleur single du groupe depuis « Walking In My Shoes ».
L’été est arrivé avec son cortège de blockbusters, Daft Punk a ramassé le jackpot international (« Get Lucky ») avant de se ramasser avec un flop intersidéral (« Lose Yourself To Dance »). Du coup, on ne sait où réside vraiment l’exploit.
Le grand gagnant du circuit francophone se nomme Stromae, dont l’album Racine Carrée renouvelle la chanson française (entre pop, rap et électro) et sonne déjà comme un classique indépassable dans le genre. L’artiste belge – audacieux, singulier et créatif – apporte une vraie bouffée d’oxygène dans le marché du disque, une grande claque aux petits mauvais auteurs. Après un premier album qui l’avait révélé de manière fracassante (avec « Alors on danse »), le phénomène n’a pas fini de faire l’unanimité autour de lui. À écouter : « Papaoutai », clip de l’année par la même occasion (100 millions de vues YouTube bien méritées !).
Dans un autre genre, la rentrée nous a réservé un beau lot de douceurs automnales – les pochettes ne trompent pas – avec le retour remarquable des bûcherons assagis de New Model Army, injustement ignorés des radios et médias français (qui osera le droit d’inventaire de la sacro sainte exception culturelle française un jour ?) et l’envoûtant deuxième album de Agnes Obel. A écouter : « Knievel » (New Model Army) et « Run Cried The Crawling » (Agnes Obel).
Pour les amateurs de variétés glitter, Céline Dion a sorti le grand jeu en novembre avec des chansons bigger than life évoquant tour à tour Michael Jackson, Justin Timberlake, Dolores O’Riordan ou encore Pink ! À écouter : « Loved Me Back To Life ». Bien sûr, les nostalgiques de Noir Désir préfèreront goûter la rédemption publique bigger than death de Bertrand Cantat, dont l’album plus ou moins solo est l’évènement discographique français de cette fin d’année (à écouter : « Avec le temps »).
Petite mention également à la pépite introspective Rouge Ardent, flamboyant retour aux sources soul-funky d’Axelle Red (autre belge de l’année avec Stromae). A écouter : « Rouge Ardent ».
Enfin, je vous recommande l’album des musiques de films de John Parish – le complice de PJ Harvey -, Screenplay, parfait pour des nuits intimes en tête à tête avec une bouteille de vin rouge ardent ou l’être aimé (ou les deux de préférence).
Les Beatles et les Rolling Stones, à cause desquels l’âge de la retraite est sans cesse repoussé, nous reviennent chacun avec un double album live pour les fêtes. Alors Stones ou Beatles ? Les deux mon neveu !
David Bowie, The Next Day, ISO Records
The Strokes, Comedown Machine, RCA Records
IAMX, The Unified Field, 61 Seconds Records
Depeche Mode, Delta Machine, Columbia Records
Daft Punk, Random Access Memories, Columbia Records
Stromae, Racine Carrée, Universal
New Model Army, Between Dog And Wolf, Attack Attack Records
Agnes Obel, Aventine, PIAS
Céline Dion, Loved Me Back To Life, Sony Music
Détroit, Horizons, Barclay
Axelle Red, Rouge Ardent, Naïve
John Parish, Screenplay, Thrill Jockey
The Beatles, On Air – Live at the BBC Volume 2, Calderstone
The Rolling Stones, Sweet Summer Sun – Hyde Park Live, Eagle
*Photo : Bauweraerts/Isopix/SIPA. 00670005_000003.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !