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Pauline Klein et le loup


Pauline Klein et le loup
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pauline klein ete
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Le « charmant petit monstre », expression consacrée de François Mauriac à Françoise Sagan, est devenu un marronnier de la critique. Chaque rentrée littéraire compte désormais, et depuis plusieurs années, autant de charmants petits monstres que de primo et jeunes romancières. Nous épargnerons donc ce qualificatif à Pauline Klein, dont Les souhaits ridicules est le troisième roman. Non qu’elle ne le mérite pas.

Inspiré du conte populaire éponyme, principalement rapporté par Perrault, le roman reprend tous les accessoires du merveilleux mais énoncés à la première personne et transposés dans un univers contemporain. On y trouve des objets magiques, des transformations étonnantes, voire tératologiques, quelques princes charmants et autant de crapauds, ainsi qu’un druide. On passe quelquefois tout près du fantastique. Jeune mère de famille, la narratrice est frappée d’un sentiment d’étrangeté, un soir, en rentrant chez elle, et ne reconnaît pas ses propres enfants. Un autre soir, en boîte de nuit avec ses amis homosexuels, elle ne reconnaît plus sa féminité, enviée, fantasmée et singée par ceux qui l’entourent. « À côté d’eux, j’ai l’air d’un bourrin ».

Un personnage rare dans un conte

La réalité est parfois entièrement stylisée, comme dans ces chapitres où la narratrice tente de séduire le jeune Baptiste et se confond peu à peu avec une chienne. En réalité, Pauline Klein décrit une chose rare dans ce roman : une mère de famille jeune et gracieuse, un personnage évadé d’un conte parce qu’il n’y trouvait pas sa place. « Les enfants hurlent de plus belle, et je ne sais plus qui sauver en premier. » On entend la voix d’un vrai écrivain, on se promène sur les chemins d’un vrai autre monde, complet, complexe et compréhensible aux lisières.

Le conte, nous le savons, nous autres grandes personnes, est le déguisement allégorique édifiant de toutes les monstruosités humaines. Dans Les souhaits ridicules, ce qui est le moins souhaitable et le plus ridicule, c’est de parvenir à l’âge adulte. L’âge où l’on n’a plus peur du loup, où on le déplore, où on est presque triste de le maîtriser, de le connaître, et où l’on veut en inventer un autre.

D’ailleurs, l’autre nouveauté de la maison Allia, cette rentrée fait la part belle aux monstres humains. Dans L’été des charognes, Simon Johannin raconte la cruauté suintant de toutes les rues et de tous les murs d’un « village de nulle part » vue par les yeux d’un enfant. L’autre loup, le vrai et le plus terrifiant, les hommes le portent en eux.

Pauline Klein, Les souhaits ridicules, Allia, 2017.
Simon Johannin, L’été des charognes, Allia, 2017.

Les Souhaits ridicules

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L'Eté des Charognes

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étudie la sophistique de Protagoras à Heidegger. Elle a publié début 2015 un récit chez L'Editeur, Une Liaison dangereuse.

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