Palaces, Pétromonarchies et Gaspipi


Palaces, Pétromonarchies et Gaspipi

sultan beverly hills

Boycott des palaces : faut pas charrier !

Depuis quelques mois, une pétition circule aux quatre coins du beau monde pour appeler la clientèle des palaces à boycotter les établissements appartenant au sultan de Bruneï. En cause, la charia, que le prince pétromilliardaire introduit peu à peu dans la législation de son micro-Etat enclavé dans la Malaisie. Il n’en fallait pas plus pour affoler Anna Wintour, patronne du Vogue américain et gouroute internationale de la mode, et derrière elle, le magnat hippie chic Richard Branson, la star télé et icône LGBT Ellen De Generes ainsi que, cocorico, les camarades Pinault père et fils.

Les droits des femmes et des minorités passant souvent par pertes et profits là où prévaut l’interprétation hardcore du Saint Coran, l’inquiétude des signataires est bien compréhensible. On ne saurait donc que les féliciter, d’autant plus que leur colère a payé, puisque le Beverly Hills Hotel, le Meurice, le Plaza Athénée ou le Dorchester de Londres, tous propriétés du sultan, ont enregistré cet été moult annulations.[access capability= »lire_inedits »]

Ceci dit, les pétitionnaires seraient bien inspirés d’étendre leur domaine de la lutte aux pétromonarchies du Proche-Orient, régies plein pot par la charia depuis belle lurette. Ainsi, les familles royales des Emirats, du Qatar ou d’Arabie Saoudite détiennent nombre d’hôtels de luxe parisiens. Le George V et le Crillon, par exemple appartiennent à la famille royale saoudienne. Le Royal Monceau, lui, est détenu par l’émirat salafiste du Qatar, généreux mécène du PSG, de BeIN Sports, d’Al Jazeera et de l’Etat islamique en Irak et au Levant.

Rogner un peu sur les rentrées de devises des potentats du Golfe, voilà qui sanctionnerait symboliquement leur atteinte aux droits de l’Homme (et de la femme, et des enfants)  en les frappant au porte-monnaie.  Ce serait aussi un formidable geste de solidarité en faveur des gays, des minorités religieuses et des millions de travailleurs immigrés sauvagement exploités dans toute la péninsule arabique.

Le constat a beau être accablant, je ne suis pas sûr que nos militants de choc se mettent à boycotter  tous ces beaux établissements à capitaux golfites. Ni que François Pinault ferme ses boutiques Gucci ou Saint-Laurent à Doha ou à Koweit City.  Ni que nos artistes engagés boudent le Parc des Princes au motif que le Qatar pratique la charia. En tout cas, je n’en mettrais pas ma main à couper…

Par Daoud Boughezala

 

Chasse au Gaspipi

Un conflit social passionne l’opinion américaine depuis la mi-juillet. De fait, il est peu banal, puisque les grévistes se battent pour leur pause pipi.

Si vous venez de sourire, préparez vous à recommencer illico, quand vous saurez que l’entreprise de Chicago touchée par ce conflit s’appelle WaterSaver, ce qu’on évitera de traduire ici par « défenseur des cabinets ». En vrai, on y fabrique des robinets de haute technologie pour les hôpitaux et les labos – ainsi qu’un modèle grand public, nommé « Vandal-Resistant », destiné aux établissements scolaires.

Le business se porte bien, l’entreprise affirme être n°1 mondial dans son secteur. N’empêche, que  désormais, ses salariés sont mis en demeure de ne pas passer plus de 6 minutes par jour aux W-C. Steven Kersten, le patron de WaterSaver justifie sa politique de restriction urinaire en brandissant ses stats : pour le seul mois de mai dernier, plus de 120 heures de travail seraient parties en fumée, ou plutôt à vau-l’eau. D’où l’obligation de badger aux toilettes et l’instauration de sanctions financières pour les occupants abusifs. Bref, soit le salarié se retient, soit c’est la retenue sur salaire.

S’en sont ensuivis  débrayages, manifs, piquets de grèves et gros buzz dans tous le pays, mais pour l’instant la direction reste impassible. Pour Steven Kersten : « La politique des lavabos ne se discute pas ».

Sourions, sourions, mais ne nous moquons pas trop des Américains, car le pire ce qui s’invente là-bas finit en général par arriver ici. En France aussi, la restauration des marges est une priorité. Je ne serais pas plus étonnée que ça si l’on voyait bientôt des pointeuses se pointer au petit coin. Et franchement, ça ne presse pas.[/access]

*Photo: Matt Sayles/AP/SIPA.AP21563721_000001

Septembre 2014 #16

Article extrait du Magazine Causeur



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