Juppé: le pire d’entre nous?


Juppé: le pire d’entre nous?

Alain Juppé est arrivé sans se presser au sommet des sondages de la primaire de la droite. Intronisé « moins pire d’entre eux » à l’automne 2014 par Les Inrocks, l’ancien pestiféré de la chiraquie « coche toute les cases pour plaire aux médias », selon l’expression d’Elisabeth Lévy. Un tel engouement après des années de purgatoire ne pouvait qu’interloquer Causeur, dont la « une » flirte avec le blasphème : « Le pire d’entre nous ? » Pour notre chère directrice de la rédaction, Juppé n’est bien évidemment pas le pire avenir qui nous attend, mais la coqueluche d’un grand courant sociétaliste dont on imagine vaguement la future politique : « beaucoup d’Europe, une bonne dose de libéralisme (dont, à tort ou à raison, les Français ne veulent pas) et  un discours intraitable sur le déficit budgétaire ». Si une grande majorité de notre rédaction s’afflige de son élection annoncée, ce n’est pas seulement par goût des surprises ou agacement vis-à-vis du candidat des médias (Barre, Balladur, DSK) que les Français renvoient rituellement à ses chères études.

« Juppé au pouvoir ce pourrait bien être Berlin plus que Bordeaux »

Pour la plupart de nos contributeurs de droite comme de gauche, tantôt « Juppé au pouvoir ce pourrait bien être Berlin plus que Bordeaux », tantôt il incarnerait « dans son souci de complaire à la gauche, son pire travers : son refus frénétique de voir le réel et sa manie de le repeindre en rose multi-culti avec l’espoir que les mots “vivre-ensemble” créeront la chose », résume Elisabeth Lévy. À force de s’aligner sur les positions de la gauche sociétaliste, Juppé a fini par la séduire, ainsi que nous l’explique Marc Cohen. Antisarkozysme et antilepénisme viscéraux sont les deux mamelles de tout chiraquien cherchant à rentrer dans le rang, que le chouchou des sondages conjugue à un discours « anti-islamophobe » fort populaire parmi la « salafosphère » tout en jouant sur la fibre pro-LGBT après avoir divorcé de la manif pour tous.

Ce salmigondis, couplé à une passion déraisonnable pour l’art contemporain dans sa bonne ville de Bordeaux, n’enthousiasme pas Denis Tillinac. À la « droite tocquevillienne » façon Juppé, l’écrivain d’Auriac préfère une droite enracinée dans la France profonde, à la fois catholique et modérément républicaine qui porterait L’âme de la France, confie-t-il au creux de l’oreille de Gérald Andrieu et Elisabeth Lévy.

Ni oubli ni pardon, renchérit Maître Régis de Castelnau, nous rappelant la « morgue tranquille » d’un repris de justesse qui – contrairement à une légende tenace – n’a pas payé pour un autre dans l’affaire des HLM de la Ville de Paris.

En grand sage de Causeur, Luc Rosenzweig retrace l’itinéraire d’un enfant de Chirac pas toujours gâté par l’opinion, tant s’en faut. Après des années de vaches maigres, Juppé revient avec une équipe resserrée et n’est pas content !

In fine, seuls Jérôme Leroy et Hervé Algalarrondo se réjouissent de la bonne fortune sondagière de l’ex-Premier ministre de Chirac. Maintenant que la gauche de gouvernement a trahi toutes ses promesses, notre bolchévique de rédacteur en chef culture voit dans Juppé un possible recours anti-Marine Le Pen au second tour de la présidentielle. Qui plus est, l’élection d’un président un tant soit peu solennel redonnerait un peu de lustre à une Ve République abîmée par les quinquennats Hollande et Sarkozy. Quant à Hervé Algalarrondo, social-démocrate assumé de la rédaction, il défend une grande coalition sous commandement juppéiste qui nous ferait définitivement entrer dans le cercle de la raison.

Affaire Baupin, Laurent Fabius, Jeremy Stubbs…

« Le pénis au pénal ! » vocifèrent les chaisières échaudées par l’affaire Baupin. Jamais à court de bons mots, notre amie Anne-Marie Le Pourhiet nous raconte son expérience d’universitaire harcelée deux fois en quarante ans, sans que les juges n’en aient été informés. L’alcôve ne devrait pas conduire au tribunal, assure le professeur de droit. Toujours dans l’arène politique, Luc Rosenzweig dresse un réquisitoire argumenté contre Laurent Fabius, dont le bilan au Quai d’Orsay n’égale pas la hauteur de l’ego. Celui qui se rêvait prix Nobel de la Paix « s’est mis en tête de faire plier Israël dans l’interminable conflit israélo-palestinien » sans que la situation au Proche-Orient n’avance d’un pouce, ni que sa « diplomatie économique » ne produise les miracles annoncés.  Enfin, pour clore cette partie actualité, Jeremy Stubbs analyse les ressorts de l’antisémitisme britannique, qui éclot de plus belle au sein du parti travailliste.  

Voilà une transition toute trouvée pour amener notre dernier grand entretien. Ulcérés par Ils sont partout, le film de science-fiction dans lequel tous les antisémites sont blancs, européens de souche et nostalgiques des années 1940, Elisabeth Lévy et Cyril Bennasar ont soumis à la question son réalisateur Yvan Attal. En résulte une interview sans tabous au cours de laquelle l’acteur-réalisateur ne ménage personne, même pas lui-même, et finit par appeler un chat un chat.

Non sans passer par l’expo Araki au musée Guimet, le lecteur solitaire parcourra les romans qu’ont inspirés Apollinaire et Drieu la Rochelle, ici célébrés par Jérôme Leroy, puis méditeront les leçons de cinéphilie de Michel Mourlet.

Avec Alain Finkielkraut, Basile de Koch, Jean-Paul Lilienfeld, L’ouvreuse et notre nouveau chroniqueur cinéma Olivier Prévôt, la distribution vaut bien le casting d’un péplum !



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est journaliste.

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