Ce peuple que nos élites méprisent


Ce peuple que nos élites méprisent

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L’épuration politique tu subiras ; la secte du marché tu aduleras ; les oligarques du CAC tu adoreras ; la souveraineté tu abdiqueras ; les mauvais électeurs tu adoreras ; la France tu maudiras. Il ne s’agit pas de six nouveaux commandements mais des titres de chapitres de l’essai revigorant de Jack Dion, directeur-adjoint de la rédaction de Marianne, en librairie depuis mi-janvier.

Le lecteur comprend très vite que Dion n’éprouve pas beaucoup de tendresse pour ceux qui ont pris, selon lui, « la société en otage ». Et ils les nomment : l’oligarchie.  Le mépris du peuple (Éditions Les Liens qui Libèrent) est bien le livre d’un homme en colère. En colère contre ceux qui, dans le monde feutré des partis politiques installés, de la haute-fonction-publique, du grand patronat et de « la cléricature médiatique », ont réussi leur « putsch contre la démocratie ». Dion nous explique que le mépris ne va pas qu’au peuple mais aussi au pays, la France. Chez les oligarques, le « french bashing » est à la mode, quitte à triturer les chiffres. Un exemple parmi d’autres, la fuite des jeunes cerveaux est en réalité quatre fois plus forte parmi les jeunes britanniques et une fois et demi plus importante en Allemagne que dans notre pays, alors qu’on ne compte plus les reportages et les papiers larmoyants qui déplorent la forte émigration de nos diplômés. Cet exemple de désinformation ne peut étonner lorsqu’on a lu ce passage éloquent où, à la manière du Président joué par Jean Gabin, Jack Dion égrène les « double-casquettes » des fameux experts qui squattent les plateaux de télévision – on pense au fameux C dans l’air, présenté par Yves Calvi. Daniel et Elie Cohen, Jean-Yves Lorenzi ou Philippe Dessertine ne sont en effet jamais présentés comme les conseillers ou collaborateurs de grands groupes ou d’institutions financières qui n’ont aucune raison de délivrer un autre message. Et encore, Jack Dion ne précise pas le rôle de certains d’entre eux auprès de personnalités politiques importantes.

Ce mépris du peuple se manifeste notamment par son discrédit à travers le vote FN. C’est encore un pensionnaire de Calvi, Dominique Reynié qui est donné en exemple à travers la notion de « national-populisme », titre du dernier ouvrage de celui qui dirige la Fondapol, think tank proche de l’UMP. Sur l’analyse du vote FN, on fera remarquer à l’auteur qu’il minimise sans doute certains éléments, privilégiant sans doute exagérément la situation économique et sociale. Après tout, des partis amis du FN prospèrent dans des pays européens où le chômage n’est pas aussi élevé que chez nous, alors qu’en Espagne, où au contraire il est plus important que chez nous, c’est Podemos qui aspire les mécontents. Mais l’essentiel est ailleurs. Pour l’oligarchie, que le peuple vote Le Pen ou Iglesias, il vote mal, et c’est pour cette raison qu’il faut le déposséder de son pouvoir, en transférant sa souveraineté aux « sachants » de Bruxelles ou de Francfort. Car le livre de Jack Dion n’est pas seulement anti-libéral du point de vue économique, il est aussi profondément souverainiste, autre gros mot qui sonne comme une insulte dans la bouche des cléricaux. Les habitués de Causeur ne seront donc pas étonnés outre-mesure que je leur conseille ardemment cette lecture.

Le mépris du peuple. Comment l’oligarchie a pris la société en otage, Jack Dion, Les liens qui libèrent.

Le mépris du peuple: Comment l'oligarchie a pris la société en otage

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*Photo : Roger Joly.



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