Eugénie chez Taddeï, FN à Sciences Po, La Mecque, etc.


Eugénie chez Taddeï, FN à Sciences Po, La Mecque, etc.

eugenie bastie mecque italie

Eugénie grandie

Par Marc Cohen

À la rédac, on sait depuis longtemps que notre consœur Eugénie Bastié est bourrée de talent. Infatigable envoyée spéciale du Figaro (et aussi de Causeur !) sur le front des idées reçues, traqueuse de doxa, « démantibuleuse » d’impostures, elle prouve à chacun de ses papiers que tous les jeunes journalistes ne sont pas des petits soldats Playmobil (en plus, elle est rudement jolie, ce qui ne gâche rien, quoiqu’un chouia hors sujet).

Comme la miss est aussi punchy à l’oral qu’à l’écrit, Frédéric Taddeï a eu l’idée de l’inviter sur le plateau de Ce soir ou jamais. Excellente initiative, mais qui n’a pas eu l’heur de plaire au plus éminent téléspectateur de la France de gauche, vous aurez reconnu Daniel Schneidermann.

Sur son site Arrêt sur images, Schneidermann fulmine : comment CSOJ ose-t-il mettre en avant cette jeune réac « détendue » qui affirme sans même s’excuser que « le vieux monde est de retour » ? Certes, je n’ai jamais eu le bonheur d’être dans la tête de Daniel, mais j’en déduis que, pour lui, une réac c’est forcément une épicière obèse à doberman, ou bien une bigote hystérique, ménopausée depuis l’instauration du nouveau franc, ou à la rigueur une avocate d’affaires avide de profits mal acquis.

Comme Eugénie n’est rien de tout ça, Daniel perd un peu les nerfs – comme il les reperdra d’ailleurs quelques jours plus tard, sur le site de ses copains d’Acrimed, en faisant part de son refus de débattre avec Élisabeth Lévy pour cause d’« inaptitude physique ».

Mais revenons à Eugénie. Dans sa chronique, Schneidermann fait feu de tout bois pour essayer de lui confectionner un costume de sorcière. Et vas-y qu’elle a manqué de respect à Attali. Et qu’elle ose prôner « l’enracinement » (le déracinement c’est trop fun, tout le monde sait ça !). Et puis elle prend la défense des « Européens taraudés par le “complexe des Indiens d’Amérique” ». Certes, la réac détendue veut que le France accueille les migrants « qui souffrent le plus », mais c’est sans doute pour mieux empêcher le reste du monde de venir s’installer chez nous. Autant de propos scandaleux qui signent pour Daniel « l’hégémonie de la droite extrême sur les plateaux mainstream ».

Voilà la preuve insigne de l’excellence d’Eugénie Bastié.[access capability= »lire_inedits »] Elle révulse Daniel Schneidermann. Et dans l’art de la guerre, c’est un sacré atout, comme l’avait compris le fin stratège Mao dès 1939, quelques années avant de devenir le tyran sanguinaire qu’on sait : « Être attaqué par l’ennemi est une bonne chose (…). Et si celui-ci nous attaque avec violence, nous peignant sous les couleurs les plus sombres et dénigrant tout ce que nous faisons, c’est encore mieux, car cela prouve que nous avons remporté des succès remarquables. » Bingo !

Satan entre à Sciences Po

Par Pierre Jova

« Moi vivant, le Front national ne sera jamais représenté à Sciences Po », aurait juré feu son directeur, Richard Descoings, décédé en 2012. La prophétie s’est accomplie : Richie est mort et des étudiants de l’IEP Paris ont annoncé la création d’une antenne du FN dans la maison. Au-delà de l’émotion médiatique suscitée par ce nouveau-né, à quoi ressemble le FN « Sciences Po » ? On retrouve à sa tête David Masson-Weyl, un pur produit de l’écurie Philippot – lequel suit  de très près les activités des frontistes de l’amphi Boutmy.

Autour de Masson-Weyl, on est frappé par la forte présence d’anciens militants de gauche. Tous affirment n’avoir rien trahi, ils ont simplement rejoint le parti sur la base du souverainisme et de l’antilibéralisme. Ainsi Antoine Chudzik, étudiant en master et fils d’ouvriers. Ex-membre du Parti socialiste, ce descendant d’immigrés polonais de Montceau-les-Mines explique être avant tout « fier de l’histoire de France et de la IIIe République ». Il raconte avoir eu un « coup de cœur » pour Ségolène Royal en 2006 : « Elle montrait qu’on pouvait être de gauche et patriote. » Il milite pour elle jusqu’aux primaires de 2011, et vote François Hollande à la présidentielle, « contre l’austérité en Europe ». Il est rapidement déçu : « Le lâchage de Montebourg a été un déclic. Il est évident aujourd’hui que François Hollande adhère complètement au libéralisme européen dominant. » Lecteur d’Alain Finkielkraut, il estime que la vision du philosophe « devrait être celle de toute de la gauche républicaine ». Antoine condamne en bloc le communautarisme, « y compris celui des catholiques », et affirme que « SOS Racisme a pris le pouvoir au PS ». C’est cela qui le fait basculer au FN, et non chez Mélenchon : « Le Front de gauche est un parti de profs et de fils de profs, qui loue l’immigration sans penser aux petites gens. »

Le Front de gauche, c’est de là que vient Davy Rodriguez, étudiant en master droit-éco, qui a été un membre actif de la section du Parti de gauche à Sciences Po. Natif de Saint-Ouen-l’Aumône, près de Cergy, ses parents sont des immigrés espagnol et portugais. Il reproche à son ancien mouvement de ne pas aller au bout de sa logique : « Si Mélenchon était cohérent, il tiendrait le même discours que Georges Marchais sur l’immigration, à savoir que la libre circulation des capitaux va de pair avec la libre circulation des personnes. » Davy a perdu l’amitié de nombre de ses anciens camarades, mais il est persuadé d’être resté fidèle à son idéal originel : « Contre l’Europe libérale marchande, pour la République et la souveraineté nationale. »

Dans une école « gauche cachemire », les étudiants frontistes parviendront-ils à s’exprimer ? À y regarder de près, le FN Sciences Po ne manque pas de qualités pour se faire accepter : ses membres sont laïcards, voire, de leur propre aveu, bouffeurs de curés, et favorables au mariage gay. Toutes choses très bien portées rue Saint-Guillaume. De là à ce que leurs rivaux démocrates de tous bords acceptent qu’un parti qui représente un Français sur quatre puisse s’exprimer librement…

Septembre noir à La Mecque

Par Daoud Boughezala

2015 restera comme un annus horribilis à La Mecque : plus de 700 pèlerins sont morts le 24 septembre dans une bousculade durant la lapidation de Mina, rituel au cours duquel le musulman accable de pierres un mur figurant Satan. Mise en cause par ses rivaux iraniens et turcs, l’Arabie Saoudite a nié tout défaut d’organisation, malgré la récurrence de ce genre de tragédies. Une quinzaine de jours plus tôt, l’écroulement d’une grue sur la Grande Mosquée de La Mecque avait ainsi tué 111 fidèles. Sitôt l’accident survenu, le roi Salman a décidé de priver de contrats publics l’entreprise propriétaire de la grue. Jusqu’au 11 septembre 2015, la holding Ben Laden Group était pourtant au-dessus de tout soupçon…

Selfie folies

Par Pascal Bories

Aux États-Unis plus encore qu’en France, prendre des photos d’enfants nus peut vous coûter bonbon. On connaissait l’histoire d’Eva Ionesco, shootée par sa mère en tenue d’Ève – ou de prostituée – dès l’âge de 4 ans. Des années plus tard, elle avait fini par déposer plainte contre sa génitrice et dénoncer une exploitation traumatisante.

À l’heure où tout le monde se promène avec un appareil photo connecté dans la poche, la judiciarisation de ces choses-là va beaucoup plus vite. Et nettement plus loin. En février dernier, un jeune Américain de Caroline du Nord, Cormega Copening, était poursuivi pour avoir pris et conservé dans son smartphone des photos d’un mineur nu comme un ver. Le nom de ce gamin de 16 ans qui s’était laissé abuser en posant pour le dangereux pervers ? Cormega Copening, c’est-à-dire lui-même. Quarterback de l’équipe de football de son lycée, aujourd’hui âgé de 17 ans (!), il échangeait alors des selfies suggestifs avec sa petite amie, la charmante Brianna Denson.

Les juges ont eu beau se rincer l’œil au passage, la justice demeure aveugle : la loi fédérale sur la pédopornographie juge comme un adulte quiconque prend en photo un mineur à poil, point barre. Pour ne pas être fiché à vie comme un délinquant sexuel, Cormega a donc été contraint de plaider coupable. Déjà suspendu de son équipe de foot et ridiculisé dans tous les médias, il fera l’objet d’une enquête approfondie pendant un an.

Compte tenu de l’empressement français à copier-coller tout ce que les États-Unis inventent de pire, gageons que nous ne sommes pas à l’abri d’un tel délire judiciaire. Sans même attendre TAFTA, expurgez fissa vos ordinateurs de toutes les photos pouvant prêter à controverse. Y compris celles où, âgé d’à peine une semaine, vous gazouillez à poil sur un coussin de velours…

Amendements amers

Par François-Xavier Ajavon

L’Italie est un pays en forme de botte, peuplé essentiellement de cinéastes néoréalistes, de gangsters à chapeau et de femmes fatales du genre Sophia Loren. L’Italie a fait le choix de ressembler à une botte, afin qu’on ne la confonde pas avec un tabouret, un démonte-pneu ou un accordéon chromatique.

Depuis que Silvio Berlusconi a pris sa retraite, le pays s’ennuie, on délaisse les gondoles à Venise, on ne se retourne plus au passage d’une Lamborghini Aventador, le moral des mangeurs de pâtes est plus bas que le niveau de la mer Tyrrhénienne. À cela s’ajoutent l’afflux massif de migrants, le mauvais climat des affaires et le non-remplacement de Leonardo da Vinci dans l’imaginaire collectif national.

Dans ce contexte déjà douloureux, on apprend que le parti souverainiste la Ligue du Nord a déposé pas moins de 82 millions d’amendements à un projet de réforme constitutionnelle actuellement débattu au Sénat. On souligne : 82 millions. Cette réforme, portée par le chef du gouvernement de centre gauche Matteo Renzi, prévoit notamment une réduction sévère des prérogatives du Sénat qui, si ma mémoire est bonne, est pourtant une invention locale.

Roberto Calderoli assume sans chipoter cette obstruction : « J’ai déposé aujourd’hui 82 730 460 amendements à la réforme constitutionnelle en cours d’examen au Sénat : tous les moyens sont permis, y compris celui-là, pour sauver la démocratie. » Ce chiffre record a été atteint grâce à un traitement informatique d’un même amendement, dupliqué en masse avec d’infimes modifications de mots, de ponctuation, etc. « Je suis pratiquement sûr d’avoir battu tous les records », a ajouté l’élu, même s’il est probable que cette salve sera prochainement rejetée en bloc par le président du Sénat, comme c’est son droit.

Cette opération de la Ligue du Nord devrait engloutir plus de 400 tonnes de papier. Pauvres arbres… Les droits du peuple contre ceux des peupliers ?[/access]

Octobre 2015 #28

Article extrait du Magazine Causeur



Vous venez de lire un article en accès libre.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !

Article précédent Être maire de Sarcelles, c’est pas si facile
Article suivant Fatima ou la délicatesse

RÉAGISSEZ À CET ARTICLE

Le système de commentaires sur Causeur.fr évolue : nous vous invitons à créer ci-dessous un nouveau compte Disqus si vous n'en avez pas encore.
Une tenue correcte est exigée. Soyez courtois et évitez le hors sujet.
Notre charte de modération