« De mortuis nihil nisi bonum » – des morts, il ne faut parler qu’en bien. De ce vieux principe il ne reste apparemment rien, à en juger par la manière dont certains politiques et journalistes de gauche se sont empressés de réduire Brigitte Bardot au statut de « raciste » et d’électrice du Front National. Le regard de Philippe Bilger.
Jordan Bardella a eu raison de dénoncer le « mépris » et la « haine » dont ont fait preuve certains, ainsi qu’une partie de l’audiovisuel public, à l’égard de Brigitte Bardot (BB) après sa mort.
Cela a commencé avec Clément Guillou qui, dans Le Monde, a consacré l’intégralité de son article aux liens de BB avec l’extrême droite. À rebours, mais selon une perversion symétrique, Aymeric Caron, que je n’ai pas l’habitude de défendre, se voit traité par la gauche radicale de suppôt de Marine Le Pen parce qu’il a salué le rôle décisif de Brigitte Bardot pour la cause animale !
On aurait pu espérer, a minima, une mise entre parenthèses de ces dénonciations, qu’il est difficile de faire passer pour de l’information, le jour même de la disparition d’une icône à 91 ans… Par simple décence, on aurait dû observer, durant un court laps de temps, un silence sur l’écume du siècle, pour ne songer qu’à l’hommage à rendre sans réserve à cette personnalité qui, sur bien des plans, a nourri les fantasmes et les songes. En ce sens également, mais sur un registre exceptionnel, la disparition de BB et les réactions qu’elle a suscitées montrent qu’il n’existe plus ni délicatesse ni réserve, y compris lorsque celles-ci devraient être le signe d’une civilisation encore digne de ce nom.
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Pourtant, à l’égard de BB, la diversité des sentiments, des idées, des émotions et des regards est non seulement possible, mais nécessaire. Parce qu’elle a été, dans son parcours d’actrice et de mythe, et plus tard dans ses engagements de citoyenne, successivement l’incarnation d’une modernité heureuse et réjouissante – malgré les dérives représentées dans son film préféré, Vie privée de Louis Malle – puis l’expression d’une indignation et d’une liberté la conduisant, sans fard, à fulminer contre son époque.
Parce qu’ayant tout gagné, elle n’avait plus rien à perdre, cette liberté a pris parfois la tonalité de propos réactionnaires qui, à mon sens, ont fait l’objet d’une judiciarisation excessive.
Elle était d’une beauté telle – à la fois harmonieuse et sensuelle – qu’on ose à peine, aujourd’hui, évoquer le miracle de cette esthétique parfaite, capable de susciter le désir des hommes en même temps que l’admiration désintéressée des femmes.
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