Saint Louis, huit cent ans après


Saint Louis, huit cent ans après

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Ne rêvons pas: François Hollande, qui a oublié de souhaiter une bonne fête de Pâques aux Chrétiens français, ignore sans doute que Louis IX est né le 25 avril 1214, cela a fait 800 ans vendredi dernier. D’ailleurs, alors que les gauchistes font débuter l’histoire de France avec la révolution, qui se souvient aujourd’hui de Louis IX ?
Dans sa Vie de saint Louis, Jean de Joinville, compagnon du roi, raconte que Louis naît à Poissy le 25 avril, jour de la Saint-Marc : ce jour-là, on porte traditionnellement en procession les « Croix noires ». Pour Joinville, c’est le signe que les deux croisades entreprises par le roi seront fatales à de nombreux croisés: «maint grant deul en furent en cest monde et maintes grans joies en sont en paradis de ceulz qui en ces douz pelerinage moururent vrais croisiez». Rétrospectivement, on peut en effet voir là un présage.

Plus tard, Blanche de Castille est prise d’un funeste pressentiment lorsque Louis, son fils, décide en 1244 de partir pour Jérusalem: elle «mena aussi grand deul comme se elle le veist mort». Mais Louis revient de cette croisade en 1254, la veille de la Saint-Marc, comme le raconte Joinville: «Le jour de la saint Marc me dit le roy que a celi jour il avoit esté né ; et je li diz que encore pooit il bien dire que il estoit renez ceste journee, et que assez estoit rené, quant il de celle perilleuse terre eschapoit». Le retour en France est comparable à une résurrection car la croisade fut un fiasco; Joinville l’avait compris dès la prise de Damiette, lorsque le roi, pour la première fois, avait mis «son cors en aventure de mort».

En 1267, Louis décide de reprendre la croix; il embarque pour Tunis le 15 juillet 1270. Joinville ne le suit pas: sans doute a-t-il l’intuition que le présage des Croix noires va prendre tout son sens: le roi meurt de la dysenterie le 25 août, au pied des remparts de Tunis. Il faut alors ramener son corps: selon l’usage teuton, il est éviscéré, démembré puis les morceaux sont bouillis dans une grande marmite d’eau et de vin aromatisé d’épices. Sur le chemin du retour, partout où ils passent, les ossements du roi font l’objet d’une grande dévotion et ils finissent par arriver triomphalement le 22 mai 1271 à la basilique de Saint-Denis. Le roi est déjà considéré comme un saint et un martyr.

Une trentaine d’années plus tard, Jeanne de Champagne, épouse de Philippe le Bel, demande à Joinville d’écrire la vie de saint Louis. Mais elle meurt en 1305 et Joinville ne termine son «livre des saintes paroles et des bons faiz nostre Saint Looÿs» qu’en 1309. Aussi le dédie-t-il à Louis le Hutin. Joinville a conçu son livre comme un témoignage: il a en effet côtoyé Louis IX et son récit nous fait donc découvrir le vrai saint Louis, alors que les autres sources, clairement hagiographiques, enjolivent l’histoire à tel point que Jacques Le Goff, récemment disparu, s’était demandé, non sans une certaine ironie, dans le chapitre VIII de son monumental Saint Louis (Folio histoire, 1999), si saint Louis avait vraiment existé. Aujourd’hui, on pourrait se poser la question: il a pratiquement disparu des programmes scolaires et les jeunes générations ignorent tout de ce grand roi qui sut moderniser la France. On se réjouira donc que Le roman de saint Louis, de Philippe de Villiers (Albin Michel, 2013), connaisse un succès mérité auprès du grand public.

*Photo: ABECASIS/SIPA. 00538939_000019.



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