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Vers le redressement improductif !


Vers le redressement improductif !

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Se gausser des réformes sociétales engagées par le nouveau gouvernement est du dernier chic chez les « penseurs » réactionnaires et leurs omniprésents relais médiatiques − et hélas aussi du côté d’une pseudo-gauche populiste. Les uns et les autres osent nier que l’ouverture du droit au mariage et à l’adoption pour les couple gays et lesbiens, le droit de vote pour les étrangers non communautaires aux élections locales, le droit de mourir dans la dignité, le renforcement des textes contre le harcèlement sexuel, l’abolition des lois sécuritaires et liberticides sarkozystes ou encore le lancement de grands chantiers pédagogiques à l’Éducation nationale représentent d’enthousiasmantes avancées historiques.

Face à cette révolution qui s’engage, certains de ces aigris hurlent à la décadence programmée de la « nation », d’autres n’y voient que poudre aux yeux et maquillage malhabile d’une absence de vrai changement maintenant.[access capability= »lire_inedits »] Les plus indécrottables de ces archéos accusent carrément la gauche de non-assistance à classe ouvrière en danger et entonnent avec leurs maigres chœurs la rengaine habituelle du social sacrifié au sociétal. On connaît la chanson : elle fait, hélas, plus penser au répertoire suranné de Daniel Guichard et de Jean Ferrat qu’aux œuvres de Diam’s et de Grand Corps Malade…

Qu’espèrent donc ces dinosaures-là, ce dernier carré de la prolomania ? Une France du troisième millénaire peuplée de 60 millions de Jean Gabin en salopette graisseuse et d’Arletty faubouriennes ? « Prolétaire, prolétaire, est-ce que j’ai une gueule de prolétaire ?»

Défendre l’emploi industriel, voire réclamer, comme certains grands psychotiques, une ré-industrialisation de nos territoires ne relève pas seulement de l’acharnement thérapeutique. Cela revient, de fait, à revendiquer plus de pollution, plus de paysages défigurés, plus de risques sanitaires. Et on n’évoquera même pas la fâcheuse propension de ces classes douteuses à voter sans états d’âme pour les partis extrémistes…

Chacun sait que notre économie ne redécollera qu’en menant à terme sa révolution post-industrielle : en terre de modernité, l’ouvrier ou l’ingénieur sont aussi ringardisés que le savetier berrichon de Jean-Pierre Pernault. Il ne s’agit donc pas de négliger le drame du chômage, mais de se concentrer sur la nécessaire rénovation des pratiques, des mentalités et des modes de consommation : la révolution pacifique engagée par François Hollande et Jean-Marc Ayrault recèle de fantastiques gisements d’emplois, bien plus porteurs d’avenir que les éphémères Trente Glorieuses.

Ce bouleversement dans la structure même du travail et donc de la société n’est pas une obscure prévision d’expert : il suffit de regarder autour de nous pour le voir prendre corps, presque physiquement. Usines délabrées de Montreuil transformées en lofts, porcheries pollueuses du Perche réhabilitées en résidences secondaires, drogueries has-been des centres-villes miraculeusement métamorphosées en spas bio ou en cabinets de psy pour animaux de compagnie. Cet élan créatif qui, déjà, ré-enchante la ville pourra, demain, changer la vie, comme le disaient si bien Arthur Rimbaud et François Mitterrand. Oui, le mouvement de modernisation du pays est lancé. Oui, il faut oublier l’industrie à la Zola. Oui, les désinvestissements d’aujourd’hui sont les emplois de demain.

Des exemples ? Ils fourmillent ! Scrutons, pour commencer, les retombées économiques et sociales de l’innovation la plus emblématique de ce quinquennat. Nos concitoyens dépensent en moyenne 12 000 euros pour leur mariage. Si l’on table sur le chiffre, raisonnable, de 10% de gays et lesbiennes sur une population adulte de 40 millions de Français, cela revient à 4 millions de mariés potentiels, donc 2 millions de couples. Or il ne fait aucun doute que l’immense majorité de ceux-ci voudront profiter immédiatement de ce droit au mariage qui leur a été si injustement refusé depuis des millénaires.

La multiplication est simple, à la portée de la plupart des élèves de terminale S : 12 000 x 2 000 000 = 24 milliards ! Et encore ce chiffre est-il probablement en dessous de la vérité, les LGBT étant notoirement plus généreux que les hétérosexuels en matière de dépenses festives et conviviales. Faites le calcul : le SMIC annuel s’élevant, toutes charges comprises, à environ 24 000 euros, on crée 1 million d’emplois sur un an, ou disons 250 000 emplois pérennes pendant quatre ans, entre 2013 et l’échéance de 2017 ! Et franchement, n’est-il pas plus agréable, pour un salarié, de confectionner des pièces montées, de conduire des limousines ou de servir des mojitos à l’occasion d’un mariage plutôt que de limer la tôle huit heures par jour à PSA-Aulnay ?

Ces perspectives de créations d’emplois, pour enthousiasmantes qu’elles soient, sont encore incomplètes. Qui dit hausse du nombre des mariages dit multiplication prévisible des divorces. D’où des débouchés supplémentaires à venir dans la magistrature et chez les avocats (toutes professions qui, par ailleurs, bénéficieront aussi de l’application stricte des lois mémorielles en vigueur ainsi que de celles qui suivront).

Cette rapide démonstration sur les formidables potentialités de relance économique induites par le mariage gay vaut pour toutes les réformes en cours et à venir. Demain, on créera dans les hôpitaux des postes de médecins ou d’infirmières euthanasistes, et bien sûr de psychologues accompagnants. Et alors que la plupart des étudiants en langues d’aujourd’hui finissent leurs cursus universitaires à Pôle Emploi, demain, le vote des étrangers multipliera par 100 le nombre des traducteurs-interprètes. Il faudra cependant veiller à ce que, durant leur formation, ceux-ci n’aient pas étudié uniquement l’anglais, l’allemand ou l’espagnol …

Génératrice d’emplois, aussi, la fantastique réforme de l’École préconisée par la FCPE : si redoublements, notes et devoirs sont supprimés dans le primaire, ce mouvement touchera inéluctablement le secondaire et le supérieur − où l’on envisagera vite, assez logiquement, de supprimer aussi les cours. Certes, dans un premier temps, des centaines de milliers de postes d’enseignants disparaîtront. Mais avec un seul salaire d’agrégé, on peut payer trois ou quatre moniteurs de sports, animateurs musicaux ou agents de sécurité, toutes professions justement accessibles aux jeunes sans qualifications excessives et discriminantes issus de l’École du futur.

La place nous manque pour détailler ici, emploi par emploi et réforme par réforme, le potentiel extraordinaire des changements en cours. Mais tous les experts sont formels : il y a des millions d’emploi à la clé, il suffit d’ouvrir la porte !

Plus réel que la fiction

Pasticher son prochain est parfois un artisanat désespérant : on prend toujours le risque d’être doublé par sa cible. Ainsi, le 2 novembre, en plein bouclage de ce numéro, je suis tombé sur cet article d’Aurélie Collas sur Le Monde.fr. Il s’intitule, sans rire : « Prévenir la violence scolaire, un métier d’avenir » et commence ainsi : « Dorothée Flory n’a pas le profil d’un vigile ou d’un policier. Sa spécialité, c’est la psychologie, l’accompagnement éducatif, l’insertion sociale. Sa méthode, une voix douce plutôt que des gros yeux. Rien à voir avec l’image du « super-pion » qui pèse sur les 500 Assistants de prévention et de sécurité (APS), dont Dorothée fait partie, recrutés au cours des mois de septembre et octobre dans les établissements les plus sensibles. » Allez vous donner du mal, après ça.[/access]

*Photo : Autolib.

Novembre 2012 . N°53

Article extrait du Magazine Causeur



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