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Les gilets jaunes, « la fête à Mélenchon »

Les gilets jaunes voient le monde tel qu'il est, Mélenchon le voit tel qu'il aimerait qu'il soit


Les gilets jaunes, « la fête à Mélenchon »
Jean-Luc Mélenchon à Bordeaux. ©ROBERT/AMEZ/SIPA / 00887449_000049

Malgré plusieurs tentatives, La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon n’a jamais réussi à concentrer l’opposition au président Macron. Et ceux qui l’incarnent aujourd’hui le mieux ne sont pas compatibles avec Jean-Luc Mélenchon. Quand les gilets jaunes sont préoccupés par le réel, Mélenchon s’attache à l’irréel.


Le mouvement des gilets jaunes a réussi là où la lutte des cheminots et la « fête à Macron », initiée par François Ruffin, ont échoué au printemps dernier.

Devant un tel succès, il était inévitable que Jean-Luc Mélenchon espérât se refaire une jeunesse avec cette jacquerie. Las ! Le leader de la France insoumise ne parvient pas à décoller dans les sondages, et à tirer profit de cette explosion de colère populaire. Pour quelle raison ?

Ces « fachos » dont on ne voulait pas

La composition sociologique des gilets jaunes explique en partie cette OPA manquée de la France insoumise sur le mouvement. Ce dernier est soutenu par les couches les plus modestes du secteur privé. Or, celles-ci sont rétives à l’idéologie de la gauche culturelle. Les discours de Mélenchon sur l’immigration, la famille, l’éducation lui ont aliéné les milieux populaires.

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De plus, l’électorat de la France insoumise a tout de suite pressenti que les membres des gilets jaunes ne partageaient pas ses choix sociétaux. A cet égard, les observateurs constatent que les étudiants et les enseignants brillent par leur absence dans le soutien concret au mouvement populaire. Lorsque celui-ci se déclenche en novembre 2019, Jean-Luc Mélenchon tente de faire surmonter par ses militants leur réticence à rejoindre cette révolte qu’ils soupçonnent être noyautée par l’extrême droite. En vain. Le leader de la France insoumise ne parviendra jamais à détromper une partie de ses troupes sur ce sujet. De fait, il n’y aura pas de « convergences des luttes ».

Le peuple est préoccupé par le réel, pas Mélenchon

De plus, la nature informelle du groupement politique des gilets jaunes, et sa volonté subséquente de ne pas adopter de structure verticale, font partie de son ADN profond. Aussi le mouvement est-il très méfiant envers toute velléité de récupération de la part des pouvoirs constitués, que ce soient les partis politiques ou les syndicats. D’ailleurs, les gilets jaunes estiment que cette indépendance constitue la meilleure garantie de leur pérennité. De cette caractéristique, la France insoumise ne pouvait que faire les frais.

Enfin, il ne faut pas négliger la méfiance des gilets jaunes envers le credo économique et dépensier de Mélenchon. Le mouvement qui est né d’un ras-le-bol fiscal reste sur ses gardes face aux propositions budgétaires du candidat de la gauche de la gauche.

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Les professeurs, soutiens majeurs de Mélenchon, nourrissent  de belles idées. Souvent généreuses. Mais il ne suffit pas de rêver le monde tel qu’il devrait être. Encore faut-il le voir tel qu’il est. C’est là où le bât blesse. Comme il ne suffit pas de se réclamer du « peuple » pour aimer ce qu’il aime, et vouloir ce qu’il veut. Le leader de la France insoumise l’aura appris à ses dépens avec le mouvement des gilets jaunes.



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a intégré l'administration des Finances après des études universitaires et des études de théologie Il est l’auteur de « Pour sortir du nihilisme » (Salvator, 2012).

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