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Yes, we Cannes !


les marches de la gloire, Cannes. photo : Jérôme Briot

L’avantage, avec Cannes, c’est qu’il y en a pour tous les goûts. Pour les amateurs de cinéma de festival, il y a toujours un petit Dardenne qui traîne (cette année, ce sera Le Gamin au vélo) et, pour les amateurs de glam’, une Carla hors compétition fait très vite l’affaire (en l’occurrence, la première dame de France fait une apparition dans le Woody Allen d’ouverture du festival, Midnight in Paris). Il est vrai que ce mélange d’austérité et de légèreté fait depuis longtemps le charme du festival de Cannes. Une alliance improbable entre le sérieux de cinéastes adorés et la frivolité d’actrices adorables. Une étreinte entre l’art et les stars. Quoique, depuis quelques années, la donne n’est plus tout à fait la même. Les noms éternellement prononcés à Cannes (Pedro Almodovar, Lars von Trier, Nanni Moretti) constituent le vrai star system, à qui l’on dit poliment qu’il rajeunit chaque année. Alors que les acteurs deviennent sérieux et grisonnants, si bien qu’on les fait président du jury à la façon Robert de Niro.[access capability= »lire_inedits »]

Mais regardons de plus près ces habitués de la sélection officielle. Nous le disions, les frères Dardenne reviennent cette année, et avec eux le spectre menaçant d’une troisième Palme d’or. Après Rosetta et L’Enfant, voici Le Gamin au vélo : un film où il sera probablement plus question d’enfance que de cyclisme. En plus réjouissant, il y a la présence de Pedro Almodovar, qui nous racontera, dans La Peau que j’habite, l’histoire d’un chirurgien esthétique (Antonio Banderas) fomentant une vengeance contre le violeur présumé de sa fille. Après des Étreintes brisées aussi vaines que brillantes – le film avait un peu déçu les fâcheux en 2009 –, l’Espagnol est à nouveau dans la course avec cette libre adaptation de Mygale, un roman de Thierry Jonquet. Parmi ceux qui ont leur rond de serviette au Festival de Cannes, il y a aussi Nanni Moretti. Il présentera Habemus papam, mettant en scène un pape en devenir (Michel Piccoli) traversé par le doute au moment précis de son élection. On a dit que le film n’était pas en odeur de sainteté là où l’on sait mais, vu sa réception en Italie, il ne semble pas en odeur de scandale non plus. Quant à Lars von Trier, rejeton emblématique de la famille des empalmés, il ne sera pas en reste avec son Melancholia, drame mettant une scène une famille déchirée, sur fond d’apocalypse planétaire. Tout simplement.

Et puisqu’on jette sur le tapis le sujet de l’alliance entre l’intime et le cosmique, autant parler de Terrence Malick ! Ne tournons pas autour du pot : Tree of life, son nouveau film, s’annonce comme l’événement majeur du Festival. Avec une date de sortie repoussée depuis décembre 2009, Malick n’a pas démenti sa réputation de cinéaste patient, tendance sadique. De ce que l’on en sait, Tree of life retrace les réflexions d’un homme se remémorant l’univers familial de son enfance au point de s’interroger sur sa place dans l’univers tout court. Espérons que tout ce temps aura permis au cinéaste philosophe de peaufiner son œuvre : ses précédents films, comme La Balade sauvage ou Le Nouveau Monde, ont placé la barre très haut. Mais d’autres grands artistes pourraient aussi créer la surprise : deux ans après Irène, Alain Cavalier reviendra à Cannes pour Pater, et Aki Kaurismaki présentera son film Le Havre, avec Jean-Pierre Darroussin et Jean-Pierre Léaud (nostalgiques ne pas s’abstenir). Enfin, le réalisateur turc Nuri Bilge Ceylan, plusieurs fois récompensé à Cannes (pour Uzak et Les Trois Singes), présentera Il était une fois en Anatolie.

Temple de l’art et cabinet de curiosités

Parfois, le Festival, qui se voudrait temple de l’art, se fait cabinet de curiosités. C’est la principale fonction des films hors compétition. Exemple de divertissement pour les festivaliers : le nouveau film de Michel Hazanavicius avec Jean Dujardin, The Artist, dont l’originalité est d’être un film muet. A voir si l’expérience est amusante ou se termine en énième facétie vintage. Dans un autre domaine, nous pouvons déjà prévoir un pôle de fixation des commentaires inutiles sur Nicolas Sarkozy et Carla Bruni. Le premier sera en effet incarné par Denis Podalydès dans La Conquête, de Xavier Durringer. Quant à la seconde, elle apparaîtra quelques instants dans le nouveau Woody Allen. Pour ne rien arranger, le petit cinéaste à lunettes a trouvé malicieux, lors d’une interview, d’imaginer notre président dans un rôle « à la Bogart ».

Enfin, s’il ne trouve pas son compte dans la sélection officielle, le public cannois aura le droit cette année à une sélection « Un Certain Regard » particulièrement prometteuse. Avec notamment Restless en film d’ouverture, le nouveau film de Gus Van Sant, qui avait tout de même obtenu avec Elephant l’une des plus belles Palmes d’or qui soit. Espérons que cette histoire d’amour entre deux adolescents hantés par l’idée de la mort s’inscrira plus dans la veine de ce précédent que dans celle d’Harvey Milk. Dans cette compétition parallèle, dont le jury sera présidé par Emir Kusturica, on retrouvera aussi Bruno Dumont pour Hors Satan, les coréens Hong Sang-soo et Kim Ki-duk pour The Day he arrives et Arirang, ainsi que Robert Guédiguian pour Les Neiges du Kilimandjaro.

Voilà, vous avez les gros traits de la sélection et le nom des jurés (De Niro, nous l’avons dit, mais aussi Johnnie To, Jude Law, Olivier Assayas et Uma Thurman). Serez-vous assez fous pour vous lancer avec une telle sélection, très ouverte, dans des pronostics de Palme d’or ?[/access]

Mai 2011 · N°35

Article extrait du Magazine Causeur



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