Ukraine : des antisémites pro-russes


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La propagande russe pourfend les fascistes et les banderovistes ukrainiens, et présente son combat comme un combat anti-nazi. J’ai dit ce que je pensais des fascistes ukrainiens qui, je le répète une fois encore, ont rassemblé, en tout et pour tout, moins de 2% aux élections législatives.
Et puis, j’ai regardé les pages FB des différents mouvements pro-russes, et je suis tombé sur celui-ci : «Donbass revolution ». C’est un groupe international : on y voit des interventions en russe, en anglais, en allemand, en polonais, en tchèque, en espagnol. Un groupe de discussion et de soutien des séparatistes pro-russes.

Et d’abord l’emblème de ce groupe, en commençant par le drapeau : c’est celui de la république de Nouvelle-Russie, qui est en train de voir le jour avec l’intervention de l’armée russe. Un bout de terre qui a toujours été russophone (et toujours ukrainien, sans qu’il y ait jamais rien eu là de contradictoire), mais qui englobe les mines de Donetsk, avec un accès à la mer. Il s’agira d’une république fantoche, évidemment non reconnue par qui que ce soit en dehors de la Russie, mais qui existera — comme la république d’Abkhazie, créée exactement sur le même modèle : troubles sociaux qu’on fait dégénérer en troubles inter-ethniques (en jouant sur les extrêmes des deux bords, toujours prêts à en découdre, quelles que soient les conséquences), surgissement inopiné de milices populaires d’auto-défense, bientôt armées aussi bien que les forces régulières qui se dressent contre elles, puis beaucoup mieux — et intervention voilée (ou non) pour faire respecter le « droit humanitaire », ou « la vie des civils ». Et établissement, par la guerre, au prix de milliers de morts, d’une nouvelle frontière. Le but est de réduire au minimum l’indépendance potentielle des anciennes républiques soviétiques, et d’affirmer, concrètement, que la notion de « zone d’influence » ne vaut pas que pour les USA : il s’agit bien d’un retour à la guerre froide globale, au prix d’une série de « guerres chaudes » plus ou moins localisées. La guerre froide est un équilibre beaucoup plus rassurant que le chaos de la détente, et le climat de guerre extérieure permet aussi de museler l’opposition chez soi, au nom du crime de haute-trahison. D’ici peu, nous y viendrons en Russie.

Et donc, le drapeau. Vous le reconnaissez, n’est-ce pas ?
Cette croix de saint-andré, ces couleurs… c’est un décalque des drapeaux des Etats confédérés pendant la Guerre de Sécession… et c’est aussi, accessoirement, le drapeau, aujourd’hui, du Ku Klux Klan. Il n’y a pas les étoiles américaines, mais c’est le même drapeau.

Ensuite, il y a, derrière, cette figure en marbre, assez patibulaire — c’est sans doute une figure d’un monument soviétique à la victoire sur Hitler. Je rappelle que la guerre de 41-45 a fait quelque chose comme 27.000.000 millions de morts du côté soviétique — et on ne sait combien de blessés, de mutilés. C’est donc, la moitié de la population de la France qui a été massacrée pendant la guerre.

Et, au premier plan, le portrait du tsar Nicolas II… avec un ruban de la croix de St Georges, décoration militaire de l’empire russe… Voilà donc une armée anti-fasciste qui se réclame délibérément de l’empire russe — c’est l’héritage de Nicolas Ier, dont j’ai parlé dans une chronique précédente. Mais ce n’est pas que cela ; c’est l’héritage de Nicolas Ier sous couvert d’une référence monumentale à la victoire contre le nazisme, ou, plutôt, ici, contre les Allemands. La référence à la guerre est fondamentale. Et cet héritage de la guerre est lui-même repoussé au second plan sur l’image par le drapeau sudiste – l’image du drapeau, aujourd’hui, des suprématistes blancs.

Le fait est que « Donbass Revolution » n’est pas qu’un simple groupe de discussion. C’est un groupe de discussion des suprématistes slaves, et ces suprématistes slaves en appellent à la réunion de tous les slaves d’Europe sous la bannière de la Russie, c’est-à-dire, là encore, ils en reviennent à la doctrine de l’Empire russe — une doctrine qui explique que la Russie a soutenu les Serbes de Milosevic (avec les conséquences qu’on connaît). J’ai pris une image, réellement, au hasard — ou peut-être parce qu’elle m’avait frappé un peu plus que les autres. Des types du « Secteur Droit » (donc, les nazis indépendantistes) qui font quelque chose comme un salut nazi. Cette photo porte le commentaire suivant : « Ukrainian Nazi Army with Hitler salute, this are the buddies of the EU, the US and the western « Journalism ».

Je regarde la discussion. Un membre du groupe, Artur Arbatov (on peut aller sur sa page FB, elle est très parlante — avec plein de jeunes gens et de jeunes filles blonds — les photos 3 et 4 viennent de sa page, j’ai traduit les commentaires), écrit (en russe) : « Je n’arrive pas à comprendre comment on peut être nationaliste, mettre au pouvoir rien que des Juifs, lécher le cul de l’Amérique et faire des « zieg heil ». Je ne comprends pas du tout où est la logique ? »

Un autre, un peu plus bas, qui s’appelle « Miré », répond en anglais : » its stupid because they fight for world Zionism. haha stupid puppets! Kosher nazis. »
Et il continue en expliquant que, finalement, la cause de la deuxième guerre mondiale, c’est les juifs… Et ça continue comme ça à longueur de pages, sur tous les sujets, et sur tous les modes, avec un seul leitmotiv : nous nous battons contre les nazis ukrainiens, et les nazis sont les serviteurs des youpins.

Il s’agit d’un groupe de discussion fasciste, naturellement antisémite parce que fondamentalement raciste. Et ce sont ces gens-là que Poutine fournit en armes ultra-modernes et met en place pour le servir en Ukraine orientale (en « Nouvelle Russie »). Nous sommes plusieurs (je pense à Cécile Vaissié, à Maria Noelevna, à bien d’autres), à avoir beaucoup insisté sur la fédération fasciste, d’extrême-extrême droite, réunie par Poutine dans le monde entier, et particulièrement en Europe. Ceci est un exemple parmi d’autres.

Le boulevard ouvert par François Hollande à Marine Le Pen n’en est que plus tragique.

*Photo : Efrem Lukatsky/AP/SIPA. AP21552170_000015.

Cet article est extrait de la page Facebook d’André Markowicz.



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est traducteur. Il vient de publier deux tomes des œuvres intégrales de Dostoïevski chez Actes sud.

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