Marseille, les cités phocéennes


Marseille, les cités phocéennes

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C’est le cauchemar de Viktor Orban : dans un discours prononcé le 25 juillet, il accusait la gauche hongroise de vouloir faire du pays une « sorte de Marseille d’Europe centrale », c’est-à-dire, a-t-il précisé, « un vaste camp de réfugiés ». Les Marseillais se récrient unanimement à cette vision outrancière. Marseille, ce n’est pas ça ! disent-ils. Et puis, ils déroulent la litanie des maux qui défigurent leur ville. Seul l’ordre change, sauf pour la saleté, qui arrive toujours en première position. Que l’empilement de collectivités publiques, glouton en finances et en personnel, soit incapable d’assurer un service aussi simple et essentiel que la voirie est peut-être le meilleur symbole de la déliquescence marseillaise.

Il y a l’insécurité, qui fait que plus personne ne se balade en ville avec un collier apparent, les kalaches, le trafic du shit à ciel ouvert dans les cités des quartiers nord. « Si on saisit 40 kg, ça n’arrête pas le trafic une journée », confie un gars des stups. Sans le « business », qui a remplacé le banditisme d’antan, tous les flics savent que la ville exploserait. À Marseille, il n’y a pas d’émeutes urbaines parce que c’est mauvais pour le commerce. « Si un jour, on légalise le commerce de la drogue, Marseille deviendra une ville d’affaires mondiale, s’amuse le policier. Parce que ça, ils le font très sérieusement : gestion des stocks, comptabilité, c’est très bien tenu. »

En attendant, les honnêtes gens redoutent de croiser le regard des « encapuchés ». Il y a aussi la pauvreté qui attire la pauvreté. L’incurie des politiques, qui ne peuvent ou ne veulent rien faire. Et, bien sûr, le clientélisme généralisé, un système que chacun condamne mais dont beaucoup profitent. « Quand on parle aux gens de voter, ils demandent ce que ça va leur rapporter », observe Fazia Hamiche avec son beau sourire de madone arabe. Cette élue des « quinze-seize » (sur une liste apolitique), dans le fief de la sénatrice socialiste Samia Ghali, tient le Scoop, unique bistrot de ce quartier vaguement industriel – mais de l’industrie d’hier –, situé en face du siège de La Provence.

Reste qu’on finit toujours par revenir à ça, ce mal qu’on ne sait trop comment nommer parce qu’on a peur de manquer à la morale commune et parce qu’il s’incarne dans les malheureux que la misère ou la guerre ont débarqués à Marseille – et que l’État-providence et la manne associative y ont fixés. L’immigration, qui ne s’arrête jamais, l’intégration, qui recule, ou l’islam qui se durcit – dans les têtes tout s’emmêle. Le melting-pot marseillais vire à la tour de Babel, parfois à la foire d’empoigne.[access capability= »lire_inedits »] Tout le monde connaît la blague sur la deuxième langue parlée à Marseille – le français. Beaucoup ne prennent plus de gants pour parler d’« invasion », comme José d’Arrigo, la soixantaine élégante, journaliste et auteur de Faut-il quitter Marseille ? Partout ailleurs, José serait dénoncé par ses confrères comme un fieffé réac. Ici, il a des amis de toutes couleurs et de tous bords. À Marseille, le réel est peut-être trop voyant pour se laisser euphémiser. La légende rose – l’OM, le pastis, Pagnol revisité par SOS racisme – fait rigoler tout le monde. Même les élus n’abusent pas des lieux communs citoyennistes. Et quand je tente que tout de même, il y a la fraternité du Vélodrome, les élèves de la prépa sciences po, auxquels enseigne notre ami Brighelli au lycée Thiers, s’amusent de ma naïveté et m’expliquent qu’il y a la tribune nord pour les quartiers nord et la tribune sud pour les beaux quartiers. Pour le mélange, faut voir ailleurs. D’ailleurs, comme l’observe un flic de la PJ, « les jeunes de La Castellane n’ont plus l’accent marseillais, comme Zidane, aujourd’hui, ils ont l’accent des cités ».

Résultat de quarante ans de flux constants, si Marseille n’est pas africaine, elle n’est plus complètement française. Finalement, c’est peut-être le vocabulaire colonial qui décrit le mieux la situation : il y a des quartiers européens et des quartiers arabes et africains qu’on appelle quartiers, tout court. Deux villes juxtaposées qui se croisent sans se mélanger. La différence avec « là-bas », c’est qu’ici, la loi est la même pour tous. Et que les autochtones sont les Européens. Encore que, sur ces deux points, les Marseillais ne sont plus si sûrs. Souvent à tort et parfois à raison, ils pensent qu’on accède plus facilement aux largesses publiques quand on est immigré.

Il y a, surtout, que les autochtones ont cessé d’être majoritaires. José d’Arrigo évoque une « fatalité démographique inscrite dans les chiffres » : « dans dix ans, Marseille sera peuplée d’environ un million d’habitants. Les 400 000 immigrés actuels, clandos ou pas, seront 600 000 et les Européens seront devenus minoritaires, 400 000. Si nul ne peut prédire l’avenir, on peut le lire parfois entre les lignes. Comme le disait le démographe Alfred Sauvy : “l’avenir d’une ville est écrit noir sur blanc dans le registre des naissances”. » Alors, beaucoup de Marseillais se demandent s’ils pourront encore dire demain « on est chez nous».

La question est particulièrement douloureuse pour les pieds-noirs à qui l’Histoire a joué un tour plutôt cruel en les obligeant à vivre ici avec ceux qui les avaient chassés là-bas. « Ils nous ont virés pour prendre notre place. Ils sont là malgré nous », résume Richard Milili. Tiré à quatre épingles et portant beau, propriétaire du Petit mousse, un restaurant de plage à la Pointe-Rouge, ce juif d’Alger semble sorti d’un Grand pardon marseillais. Dans les nombreuses affaires qu’il a montées – avec succès, semble-t-il –, il y a eu le Jeu de Dames, l’une des premières boîtes de lesbiennes de la ville.

Il se rappelle que, pendant des années, la cohabitation a été plutôt heureuse aux Bourrely, la cité du 15e arrondissement où sa famille, arrivée en 1962, a longtemps tenu une épicerie. Il y avait des Italiens, des Espagnols, des Arabes, des Juifs… Sa mère, qui l’appelait « la cité du bonheur », n’a jamais voulu en partir. Après sa mort, Richard, comme beaucoup de Juifs, a fini par quitter Marseille pour la commune voisine de Plan de Campagne. Aujourd’hui, « Les Bourrély » figure en bonne place dans le palmarès des cités que la drogue a rendues infernales. « Le problème, c’est qu’on a abandonné les enfants de ceux qu’on a fait venir, c’est l’école qui n’a pas fait son boulot, ce sont les HLM qui se sont adaptés à leur mode de vie en faisant des F6 et des F7, et les allocs qui rentraient sans bosser. Alors, la première génération était contente d’habiter dans des appartements, la deuxième a tout détruit. Et aujourd’hui, on a des minots qui pensent que la vie est faite de violence et qui manipulent l’arme comme nous le poing. » Richard n’en veut pas aux Arabes, il continue à en avoir beaucoup parmi ses amis, « qui travaillent et qui ont honte de tous ceux qui vivent aux crochets de la société».

On aurait tort, en effet, de croire que les fractures de la société marseillaise épousent strictement les frontières ethniques. Depuis quelques années, c’est entre les différentes communautés, mais aussi entre les différentes générations qu’on voit monter les tensions, parfois jusqu’à la violence, comme à la porte d’Aix où des sans-papiers comoriens rackettaient les usagers du parking. En 2010, il y a eu trois homicides. À l’époque, Omar Djellil s’est retrouvé en garde à vue. Ce n’était pas la première fois que ce grand gaillard d’une quarantaine d’années au bagout intarissable faisait le coup de poing contre des « clandos».

Très fier de raconter que son grand-père a fait Montecassino et qu’il est né à Reims, la ville du sacre, ce fils d’un retraité de la SNCF a commencé son parcours chez les Frères musulmans à Bordeaux, sous la houlette de Tarek Oubrou, avant d’effectuer, comme son mentor dont il dit aujourd’hui pis que pendre, un grand virage républicain. Il est aussi passé par SOS racisme, le PS et l’UMP. En arrivant à Marseille, il y a sept ou huit ans, Omar a eu une sorte de révélation négative. « J’ai découvert que c’était le tiers-monde. Des gens exogènes à la culture française ne cessent d’arriver et c’est pour rester. La droite a peur de faire le jeu du FN en expulsant les clandestins. À gauche, on croit qu’ils ont le même profil culturel que les électeurs. De toute façon, pour éviter d’être expulsé, il suffit de se faire prescrire un médicament qui n’existe pas dans son pays, et tout le monde a la liste. » Il a alors tenté de rejoindre le FN. Sans succès. Ce musulman pieux, fantasque et ouvert, avait, dit-il, d’excellentes relations avec Jean-Marie, mais il s’est cassé le nez avec Marion et Marine, qui ont peut-être eu peur de sa fougue un peu brouillonne.

Un temps employé par l’OPAC-13, Omar a été révolté par les inégalités de traitement qui y avaient cours : « Dans mon groupe d’immeuble, j’avais 50 familles de souche, elles n’avaient droit à rien, alors qu’aux familles des caïds, on leur faisait tout, les peintures, les réparations. Alors les gens se disaient : “Nous, on est chez nous et on n’a rien. Eux, ils viennent d’arriver, ils dealent et ils ont priorité partout”. Ma responsable recevait des délégations de dealers qui demandaient des locaux vides. » À force de faire du foin, il a été exfiltré au centre d’hébergement d’urgence de la ville, dont il a également été viré parce qu’il s’opposait à l’ouverture du réfectoire le soir pendant le ramadan : « En trois mois, j’avais assisté à 54 agressions. C’étaient des clandestins qui faisaient la loi. Ils ne faisaient pas ramadan, ils rackettaient, ils vendaient du shit. »

Dans la hiérarchie très personnelle de Djellil, il y a un personnage presque aussi méprisable que le « clando », c’est le « blédard » : « Regardez ce type qui vient d’être propulsé dans les instances de l’islam officiel. Il y a trois ans, il gardait des chèvres. On lui a payé un costume trois-pièces et c’est à lui qu’on demande son avis sur ce qu’il faut faire. » Il en est certain, il y aura un jour une confrontation : « entre les blédards et nous ». Les immigrés devenus des Français comme vous et moi se sentent pris en étau entre les nouveaux arrivants, qui menacent leur intégration en rappelant le chemin parcouru, et la nouvelle génération, qui fait du refus de l’intégration son drapeau. C’est peut-être le vote de ces vieux immigrés qui, lors des municipales de mars 2014, a permis au frontiste Stéphane Ravier d’emporter la mairie du VIIe secteur (13e et 14e arrondissements).

Au fil des années, la frontière invisible qui divise la ville s’est déplacée à l’est de la Canebière, jusqu’au boulevard Sadi-Carnot. Au sud et à l’est, la Marseille blanche et bourgeoise, où il fait très bon vivre « quand on a les moyens », comme l’explique un commissaire de police qui ne s’est pas complètement acclimaté aux mœurs locales, notamment dans sa corporation. À l’ouest et au nord, la Marseille immigrée, qui subit de plein fouet l’afflux ininterrompu des arrivants, « clandos » ou pas, s’est étendue aux vieux quartiers populaires du centre-ville, comme celui qui s’étend autour du marché de Noailles.

Quand Yves Boussens est arrivé à Marseille, en 1970, le quartier était un paradis du commerce. Aujourd’hui, il l’est toujours – on y trouve des fruits et légumes à des prix imbattables – mais ce sont tous des commerces halal ou tenus par des maghrébins qui s’affichent de plus en plus comme musulmans. Avec Le Grand Saint-Antoine, sa charcuterie, « il reste cinq magasins européens ». Les affaires sont nettement moins florissantes, les douze employés ne sont plus que deux, mais il a des clients qui viennent encore de toute la ville. D’ailleurs, le comité d’entreprise d’EDF, qui construit un hôtel à quelques mètres, lui a proposé de racheter. Il ne veut pas. « Mon fils se plaît dans le quartier. » Et puis, il ne lui déplaît pas de se voir en gaulois, résistant encore et toujours à… Attention, il vit en bonne intelligence avec ses voisins. « Ceux qui démarrent dans l’agressivité, je les désarme par la courtoisie », dit-il. Avec les femmes en burqa, ça marche rarement. En juin, deux d’entre elles ont été arrêtées dans le quartier. « Il fallait les entendre insulter les policiers et hurler comme si on les violait. Au commissariat, on leur a dit de ne pas recommencer. Alors qu’est-ce que vous voulez. »

Pendant quelques jours après les attentats, le quartier est resté désert. Mais depuis, quand Yves Boussens croise une « voilée », il se dit que c’est de la provocation. Attention, quand il parle de « voilées », il désigne les « Belphégor », celles qui ne laissent voir que le visage – ou pas –, pas du « petit foulard » auquel on ne prête plus vraiment attention. Depuis le 13 novembre, les langues se délient. Il se murmure que les commerçants du quartier sont sous pression pour fermer le vendredi. On raconte qu’il y aurait, rue de l’Arc, à deux encablures de Noailles, une mosquée et deux écoles. Boussens s’énerve un peu : « Il y a quinze ans, quand les barbus ont commencé à accrocher les jeunes sur le marché, tout le monde le voyait. Je n’ai cessé de le dire dans les réunions de quartier organisées par la mairie. Mais personne n’a rien fait. »

Omar Djellil évoque un phénomène similaire dans les quartiers nord : « On a vu des gens du FIS arriver, intriguer et faire des putschs dans des mosquées. » Il est convaincu qu’on a sciemment laissé les mosquées aux plus radicaux. La vérité, c’est sans doute qu’on les a laissées à ceux qui étaient assez déterminés pour les prendre.

Dans la litanie des malheurs marseillais, l’impuissance des politiques n’est guère qu’une toile de fond. À part ceux qui vivent de leur appartenance partisane, la plupart des gens ne font pas vraiment la différence entre une droite et une gauche dont on sait bien qu’elles cogèrent la ville, avec des baronnies qui se répartissent l’argent public – et les électeurs. José d’Arrigo résume l’état d’esprit général : « Le système “GG” (Gaudin-Guérini) sera probablement remplacé demain ou après-demain par le système “MM” (Moraine-Mennucci, notables locaux LR et PS), avec les mêmes méthodes à la petite semaine, le même refus d’affronter les réalités, le même carriérisme, le même népotisme, le même favoritisme, les mêmes arrangements de boutiquiers en coulisses, les mêmes compromissions avec la gauche, la droite et… le milieu. » On dit qu’en 2014, c’est un caïd du panier qui a organisé le ralliement des élus guerrinistes à Gaudin. On ne leur en veut pas vraiment, d’ailleurs, on trouve même que Gaudin a fait du bien à la ville – en réalité, c’est surtout l’argent d’Euromed, un projet européen, qui a permis, outre la construction du Mucem, de donner un coup de propre à quelques quartiers du centre-ville, notamment le Panier. Peu importe, les Marseillais n’attendent pas grand-chose de leur maire. Mais ils l’aiment bien.

Socialiste défroqué et fondateur d’une petite formation à l’ambition rénovatrice, Philippe Sanmarco ne se résigne pas au déclin de sa ville. « Nos institutions peuvent marcher avec un centre riche, comme à Paris ou Bordeaux. Mais à Marseille, l’hyper-pauvreté et l’hyper-exclusion sont dans la ville-centre, qui est sous tutelle de fait de l’État. Et la création de la communauté urbaine a achevé de tuer la ville, en la déchargeant de la responsabilité du quotidien. Le résultat, c’est que c’est FO qui gère la mairie et il n’y a plus d’autorité politique pour contrôler les fonctionnaires. » Situation qui explique l’insoluble casse-tête du ramassage des ordures, mission dévolue à l’agglo mais assurée par des agents municipaux. Personne n’a oublié le coup fumant du Provençal : une journaliste s’était postée à l’entrée du dépôt pour chronométrer la tournée des camions-bennes. Expérience concluante : la tournée moyenne durait moins de deux heures quand les immondices s’entassent dans beaucoup de rues. Et suivant le principe du « fini-parti », ça fait des journées de travail pas « épuisantes ». Quand la municipalité a décidé d’abroger cette loi non écrite qui permets aux agents de quitter leur lieu de trabail sitôt leur service achevé, il y a eu quatre jours de grève. On comprend pourquoi, à Marseille, il faut un piston syndical pour être éboueur.

Une certaine dose de clientélisme est sans doute consubstantielle à la politique. C’est accorder trop de crédit à la vertu que d’espérer qu’elle fasse disparaître les intérêts particuliers. À Marseille, et dans le Midi en général, on se cache moins qu’ailleurs pour flatter l’électeur dans le sens du poil communautaire ou religieux. Ce qui exaspère Albert Guigui, président de Judaïsme et Liberté, et membre actif des instances communautaires juives : « Quand ils s’adressent à nous, les politiques nous parlent tout de suite d’Israël, comme si nous n’étions pas capables de nous soucier de l’intérêt général. Moi, je veux qu’on me parle comme à un républicain, pas comme à un Juif. » Omar Djellil évoque le cas d’un élu municipal qui se proclamait fervent sioniste et ne ratait pas une occasion de dire son amour d’Israël jusqu’au jour où, changeant de secteur, il a subitement épousé la cause palestinienne.

Dans la même veine mais dans un registre un peu différent, Frank Allisio, transfuge des Républicains passé au FN, raconte que, pendant les régionales, ce sont les gars d’Estrosi qui sont allés dire aux immigrés des cités que si le FN passait ils perdraient leurs allocations et leurs subventions. « Quand on vous dit qu’ici, ils font le boulot de la gauche ! » La menace brune n’a pas vraiment payé : dans les quartiers nord, le vote FN a été « contenu » autour de 44-45 % contre, il est vrai, « seulement » 38 % pour l’ensemble de Marseille (et 42 % pour les Bouches-du-Rhône).

Au moins ces boniments ont-ils l’avantage d’être gratuits – au sens propre. Souvent, il ne s’agit pas de boniment mais d’avantages palpables, au propre ou au figuré. À Marseille, le clientélisme est un système de gouvernement – qui dégénère à l’occasion en corruption. Chacun gouverne son fief en gratifiant son clan, au sens plus ou moins large, d’avantages divers. Cela va bien au-delà de l’embauche de la belle-sœur, également pratiquée sur tout le territoire et qui, en général, n’est même pas illégale. Dans certains cas, il s’agit clairement d’arroser ses affidés par le biais d’associations bidon créées dans le seul but d’obtenir une subvention de la région ou du département. Curieusement, les exploits de Sylvie Andrieux n’ont pas fait grand bruit à Paris. En septembre 2014, la députée de la 7e circonscription de Marseille, qui était également chargée de la politique de la Ville au conseil régional, a été condamnée en appel à cinq ans de prison dont un ferme, 100 000 euros d’amende et cinq ans d’inéligibilité pour avoir, de 2005 à 2008, versé plus de 700 000 euros à des associations entièrement fictives, montées par des escrocs[1. Bien entendu, le Parti socialiste a vertueusement exclu la coupable, qui continue néanmoins de siéger à l’Assemblée puisque son pourvoi en cassation a suspendu la sanction. En cas de partielle, Stéphane Ravier pourrait bien ravir le siège aux socialistes, qui n’en ont pas de trop.]. « Je te finance, tu votes pour moi, ça fait trente ans que les partis jouent avec ça, observe Omar, narquois. Et que les quartiers sont tenus en laisse par les subventions. » Sauf qu’on se demande, qui, du maître ou du chien, est le vrai patron.

Après une telle avalanche de doléances et récriminations, on se dit que le miracle marseillais, c’est que les Marseillais continuent à aimer leur ville. Et pas seulement parce que la misère est moins pénible au soleil. Mais ils l’aiment comme on aime un malade en phase terminale : souvent, au point de le quitter pour ne pas assister à son agonie. Viktor Orban exagère, certes. N’empêche, aujourd’hui, c’est toute la France qui a peur de devenir Marseille.[/access]

*Photo : © Yohan Brandt.

Janvier 2016 #31

Article extrait du Magazine Causeur



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Fondatrice et directrice de la rédaction de Causeur. Journaliste, elle est chroniqueuse sur CNews, Sud Radio... Auparavant, Elisabeth Lévy a notamment collaboré à Marianne, au Figaro Magazine, à France Culture et aux émissions de télévision de Franz-Olivier Giesbert (France 2). Elle est l’auteur de plusieurs essais, dont le dernier "Les rien-pensants" (Cerf), est sorti en 2017.

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