Accueil Monde Iran, une révolution lente mais salvatrice

Iran, une révolution lente mais salvatrice


Iran, une révolution lente mais salvatrice
Manifestation à Téhéran, septembre 2022. D.R

Lettre ouverte du neveu d’Ali Khamenei


Le monde entier suit les actualités et s’informe sur ce qui se passe en Iran. En effet, le mouvement protestataire en cours n’est ni une nouveauté ni limité à de simples revendications. C’est une suite logique de notre lutte pour la liberté et la démocratie. C’est une vraie révolution lente mais juste et salvatrice.

Notre lutte a vu le jour dès la naissance de la République Islamique en Iran. Elle arrive à son étape finale. Certes, il reste encore du chemin mais le courage de la jeunesse iranienne, en particulier celui des femmes, fera tout pour assurer la suite.

Je suis médecin ORL installé dans le Nord de la France et aussi activiste et opposant des premiers jours au régime islamique en Iran. Je suis à la fois proche et éloigné d’Ali Khamenei. Il est le guide suprême de la république islamique d’Iran et aussi le frère de ma mère. Avant la révolution de 1979, mon oncle, Ali Khamenei, était un des mollahs, sans importance particulière, à Mechhed, une ville du Nord-est d’Iran. Il fut pendant un certain temps, élève de mon père, Ali Tehrani, écrivain et enseignant de philosophie et de théologie, un des proches de Khomeini (avant la révolution), décédé en octobre 2022 à l’âge de 96 ans.

C’est uniquement après la victoire de la révolution, et avec l’aide de personnalités comme Beheshti et Rafsanjani, qu’Ali Khamenei est devenu quelqu’un et a pu gravir les échelons du pouvoir. Mais, il est certain qu’actuellement, il est le bourreau du peuple iranien et responsable de chaque crime commis par ses vassaux. Il est la personnalité la plus détestée en Iran et condamné à disparaître. Je lui envoie ce message et lui rappelle que s’il ne cède pas le pouvoir, il aura la même fin que Ceausescu, Kadhafi, ou Saddam.

Des policiers répriment des manifestants à Téhéran, 19 septembre 2022 © AFP

Je souhaite personnellement, et je pense que c’est le souhait de tout Iranien, sa destitution et son jugement devant le peuple. Le plus tôt possible. À travers sa chute, nous visons celle de la totalité du régime islamique. C’est par la disparition de la République islamique en Iran que des vies humaines seront sauvées, que la paix et la prospérité reviendront au Moyen-Orient, voire même dans le monde. L’intégrisme islamique, où qu’il prospère, et sous n’importe quelle forme, est le cadeau empoisonné de ce régime au monde entier.

Lorsque la religion sert de prétexte, on prend les textes sacrés, on en exclut tout ce qui pourrait gêner et on ne garde que ce qui permet d’établir la domination. L’exemple caricatural en est l’exploitation des principes religieux concernant les femmes. Ils sont mis en exergue, exagérés dans leur interprétation et justifient la mise sous tutelle, d’un coup, de la moitié du peuple !

Dans ces systèmes, l’évolution est toujours la même : au fur et à mesure que les difficultés s’amoncellent, la répression s’accroît et l’agressivité se développe, tant à l’intérieur que vers l’extérieur. Le régime essaie de réprimer son peuple et de porter la guerre partout à l’étranger afin de faire croire au peuple que les difficultés viennent du dehors, que la misère est imposée par l’étranger et, singulièrement, par les pays dits « occidentaux ».

On voit bien à quoi mène la violence : on décide qu’il n’y a pas de limite à l’horreur pour prendre le pouvoir, ensuite on s’habitue à tout régler par le meurtre, l’attentat, la guerre.

On est frappé du parallélisme entre l’incendie du Reichstag qui a permis aux nazis d’affirmer leur pouvoir en se justifiant d’anéantir les communistes et l’incendie du cinéma Rex d’Abadan, en 1978, qui a permis d’enflammer le peuple et de susciter la révolte contre le régime de Pahlavi.

Ensuite, bien sûr, on tombe dans le schéma habituel où, passée la répugnance que tout homme ressent envers le meurtre d’un autre homme, il s’aperçoit qu’il a massacré et que, pourtant, rien ne lui est arrivé. Alors, il recommence, encore et encore. On massacre les prisonniers, on écrase les protestations de rue, on abat des avions dans un flot d’innombrables crimes. L’actualité en est pleine, jusqu’à la nausée.

Je souhaite profiter de cette occasion pour formuler et adresser quelques messages :

Je m’adresse, pour commencer, aux forces armées iraniennes et aux milices du régime :

Vous devez vous rendre compte que vous ne protégez que vos ennemis. Ali Khamenei et son régime sont nos ennemis communs. Pour rester au pouvoir, ils sont capables de vous sacrifier sans récompense, vous entraîner à une guerre, perdue d’avance, contre votre peuple et contre le monde entier. Le peuple iranien et le monde libre ne vous pardonneront pas vos crimes d’aujourd’hui. Tabasser des enfants, tirer à bout portant sur des civils sans armes, quel que soit leur âge, ce sont indiscutablement des crimes contre l’Humanité, impardonnables et punissables.

Je m’adresse au clergé et aux musulmans d’Iran et d’ailleurs :

Vous devez vous rendre compte que le régime islamique en Iran se maintient grâce aux mensonges et à la répression. Il n’applique pas les vrais préceptes de l’Islam ! Le soi-disant « guide suprême » (Ali Khamenei), n’est pas du tout le théologien le plus compétent du chiisme. C’est juste un profiteur qui se sert de la religion pour survivre. Je suis bien placé pour le savoir.

Il vous faut vous débarrasser de ce régime avant qu’Ali Khamenei ne ruine davantage votre religion !

Je m’adresse aussi au peuple iranien :

La liberté est un droit mais, souvent, il ne s’obtient que par la lutte !

Je vis, aujourd’hui, au milieu d’un peuple libre. Sa liberté ne lui est pas tombée dessus par miracle. Il a fallu une révolution violente en 1789, des guerres contre toute l’Europe coalisée ensuite pour conserver ses premiers acquis, puis encore en 1830, en 1848 et en 1871, il a fallu se battre et des dizaines de milliers de personnes sont mortes pour cette Liberté.

Si vous ne vous battez pas aujourd’hui contre ceux qui vous oppriment, votre souffrance et votre misère perdureront et notre cher Iran se verra détruit toujours davantage.

Un jeune homme dans la rue à Téhéran fume une cigarette, juillet 2022 © Mikhail Tereshchenko/TASS/Sipa U/SIPA

Il ne fait aucun doute qu’après la disparition de ce régime, l’Iran restera uni et les Iraniens maîtres de leur destin. Ceux qui sont politiquement actifs, aujourd’hui, ou présents dans les rues et dans les prisons, formeront, demain, notre élite dirigeante.

Je m’adresse à notre opposition en exil :

Notre opposition, en exil, a considérablement participé, durant les quatre dernières décennies, à la sensibilisation et à la prise de conscience du peuple iranien. La révolution en cours n’aurait pas été possible sans l’apport des enseignements et des informations émanant des médias iraniens en exil.

Tout ce travail médiatique, en l’absence d’une infrastructure politique, ne soulève que des vagues, et pas le tsunami souhaité !

Je pense que le temps des rancunes et de la dispersion, au sein de notre opposition en exil, est passé. Le peuple iranien a démontré activement sa volonté et son unité. Il ne veut plus de mensonge, de violence, d’intégrisme, de terrorisme, et souhaite vivre en démocratie et en paix avec le monde.

Il se demande, à juste titre, ce qui adviendra une fois le régime islamique disparu. D’ailleurs, le monde libre, aussi, demande un interlocuteur convenable et fiable !

Il est temps de bâtir une coalition politique au sein de notre opposition pour répondre au questionnement du peuple et pour établir une alternative démocratique au sein de laquelle la totalité du peuple, par l’intermédiaire de ses partis politiques, sera représentée.

Cette coalition démocratique des partis politiques doit établir le programme de l’étape finale de notre lutte mais aussi dessiner le cadre politique et définir les modalités d’installation du régime à venir, afin de faire participer la majorité hésitante et silencieuse en Iran à la révolution en cours, et garantir un avenir convenable et apaisé au monde entier.

Cet idéal est accessible. Personnellement, depuis longtemps, j’en ai établi la feuille de route.

Enfin, je m’adresse aux Français et aux peuples du monde :

D’abord, je suis profondément attristé et désolé des crimes commis, dans le monde, par les abrutis de l’idéologie islamique du régime en Iran. Les prises d’otages, les attentats et les massacres, au nom de l’Islam, sont tous les fruits des enseignements de Khomeini et de Khamenei. Ils diffusent, depuis des décennies, via les satellites et l’Internet, leurs propagandes de haine, de conspirationnisme et de violence dans le monde.

Je pense que tout Iranien a une part de responsabilité dans la survivance de la République Islamique en Iran. Personnellement, bien que n’ayant jamais participé à ce régime, j’ai toujours tenté d’assumer ma responsabilité et de faire mon devoir.

On n’oubliera jamais le massacre sauvage, le 7 janvier 2015, des journalistes et des caricaturistes renommés de Charlie Hebdo. Ce crime impardonnable fait suite aux innombrables crimes contre l’humanité commis depuis la victoire de Khomeini en Iran.

Les médias et la communauté intellectuelle du monde libre ont le devoir de mieux informer les populations, en l’occurrence immigrées, sur les principes des droits de l’homme et de la laïcité et, aussi, de neutraliser les propagandes conspirationnistes. Les régimes fascistes, comme celui de mon oncle, déforment les notions et les réalités ! Le seul antidote est l’information réelle ! Je pense qu’il y a eu des manquements à ce sujet.

Et enfin, merci de votre soutien et de votre présence à nos côtés.

Vous avez, comme tout être humain, un devoir humaniste. Nous vous demandons un soutien réel. Exigez de vos gouvernements la cessation des relations diplomatiques et de toute aide à ce régime qui est réellement en guerre contre son peuple et contre le monde libre. Tout dialogue avec les dirigeants de ce régime est, d’emblée, voué à l’échec.

Le peuple iranien se souviendra de ceux qui étaient à ses côtés !

Dr Mahmoud Moradkhani, Croix (59).

Mahmoud Moradkhani



Vous venez de lire un article en accès libre.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !

Article précédent Des cathédrales à Tiktok, un effondrement français
Article suivant Pierre Haïk, le crack du barreau

RÉAGISSEZ À CET ARTICLE

Le système de commentaires sur Causeur.fr évolue : nous vous invitons à créer ci-dessous un nouveau compte Disqus si vous n'en avez pas encore.
Une tenue correcte est exigée. Soyez courtois et évitez le hors sujet.
Notre charte de modération