Accueil Médias Si France Inter est numéro 1, c’est parce qu’elle est « progressiste »

Si France Inter est numéro 1, c’est parce qu’elle est « progressiste »

La ligue des rebelles majoritaires est devenue la radio la plus écoutée du pays


Si France Inter est numéro 1, c’est parce qu’elle est « progressiste »
Capture d'écran TMC

Ça y est, c’est fait: France Inter est devenue la radio généraliste la plus écoutée du pays. Et d’après ses vedettes, invitées à s’auto-congratuler par Yann Barthès, la raison est simple: la station publique est de gauche et fière de l’être. 


J’étais récemment invité à Sud Radio pour débattre d’un de ces sujets que je ne maîtrise pas parfaitement mais dont je prétends quand même pouvoir causer. Auréolé du prestige de cette invitation matinale, je demande grisé, à la faveur d’une coupure de publicité, si l’on saurait me dire combien d’auditeurs étaient susceptibles d’entendre mes brillants propos.

Cécile de Ménibus, co-animatrice, me dit qu’on ne sait pas exactement. Et apparemment, Sud Radio n’a qu’une confiance relative dans les chiffres de Médiamétrie. Mince ! J’étais tombé dans une radio de complotistes. Un article du Monde allait me le confirmer quelques jours plus tard

La famille, y a que ça de vrai

Le complotisme et l’audimat, Yann Barthès passe son temps à dénoncer le premier et à décrypter le second dans son émission. La semaine dernière, il a donc consacré vingt minutes à faire la promo de France Inter. Les chiffres de Médiamétrie venaient de tomber (et à France Inter on les croit) : la très chic station publique – où il n’est pas totalement exclu que Yann Barthès atterrisse un jour – est passée devant RTL, c’est la radio généraliste la plus écoutée du pays. Le Monde révèle que le matin de l’annonce des résultats, « le champagne était de sortie » à tous les étages de la Maison de la radio. Un moment de grâce auquel Barthès aurait visiblement aimé se joindre.

Le présentateur de Quotidien avait donc invité la « dream team » de France Inter. Laurence Bloch, la directrice de l’antenne était là ! Léa Salamé et Nicolas Demorand, les stars de l’info étaient là ! Il y avait aussi Sonia Devillers, la spécialiste médias, l’humoriste François Morel, les chroniqueurs Augustin Trapenard et Rebecca Manzoni ! Quel entre soi délicieux. Pour Yann Barthès, c’était mieux que les Rolling Stones. Moi, j’étais quand même un peu déçu de ne pas voir Claude Askolovitch. Passons… Comment ces gens font-ils pour être si brillants ? C’était un peu le sujet de la soirée.

Ma « différence » à moi

Difficile de l’expliquer. Ils ne veulent surtout pas pâtir du syndrome BFM TV, laquelle se fait lyncher par les gilets jaunes depuis qu’elle a commencé à crier partout qu’elle était numéro 1. Restons modestes, c’est plus prudent… La figure du chef charismatique est vite invoquée. L’équipe présente lui voue un quasi culte. Léa Salamé qualifiera affectueusement Laurence Bloch de « punk », ce qui est apparemment un compliment.

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François Morel expliquera de son côté que les humoristes de France Inter n’ont pas du tout le même standing que ceux des stations privées. Sur France Inter, il n’y a ainsi « pas de rires professionnels ». Les collègues sont même autorisés à s’ennuyer quand une de ses chroniques déplaît. C’est bien là, « la différence ». Depuis qu’il a quitté la fromagerie des Deschiens pour nous faire le portrait d’une France qu’il s’imagine en voie de fascisation, je dois avouer qu’il m’ennuie moi en fait la plupart du temps. Mais certains matins, ses collègues ont vu en lui du Jean Moulin…

« Cette première place, est-ce la victoire des bobos-gauchos bien-pensants ?« 

Mais quelle mouche pique soudain Yann Barthès ? Il demande à la cantonade si cette première place est « la victoire des bobos-gauchos bien-pensants ». Où va-t-il donc chercher ça ?

France Inter ne peut souffrir une telle accusation. Déjà, « 80% des auditeurs sont en région » révèle Laurence Bloch. Bravo aux « territoires », même si le vote pour Marine Le Pen y reste un peu plus élevé que dans Paris. Léa Salamé contredit sa patronne et met toute l’assemblée mal à l’aise : « On peut être en région et être bobo bien-pensant. » Avec l’eau courante ? Fichtre, j’ai même entendu dire que des provinciaux reçoivent désormais Télérama !

Autre scoop : Léa Salamé et Nicolas Demorand s’appellent entre eux « Chouchou et Chouchou ». Et non « Chouchou et Loulou » comme il a longtemps été raconté à tort. En outre, ils peuvent s’avoir huit fois par jour au téléphone. Et si évoquer le sujet la met dans un embarras terrible, il est rappelé que Léa Salamé a choisi comme une grande de quitter l’antenne quand son compagnon Raphael Glucksmann a pris la tête de la liste PS pour les élections européennes. Pour justifier son départ auprès de la vieille dame, elle aurait dit : « J’aime trop ce métier pour qu’on puisse le disqualifier ou jeter du doute et du discrédit ». C’est que les auditeurs auraient pu se douter qu’elle était de gauche…

« Si c’est ça être bobo bien-pensant, on assume »

Sonia Devillers, élève appliquée aux copies un peu convenues, tente de détourner l’attention quant à cette accusation de gauchisme culturel. Selon elle, il ne faut rien voir d’autre dans le succès de France Inter que « le résultat de toute une équipe qui travaille à s’arracher la peau ». « Vous n’avez pas idée à quel point cela bosse dans cette baraque », insiste-t-elle. Qui pouvait seulement en douter ? Yann Barthès, professionnel, lui rétorque que cela ne répond pas à sa question. Laurence Bloch clôt le débat : « On revendique et on assume d’être progressistes. Par exemple, le fait que les femmes puissent disposer de leur corps librement. Si c’est ça être bobo bien-pensant, on assume. » Bien parlé ! L’argument tape dans le mille, le chauffeur de salle envoie les applaudissements, et Yann Barthès change de sujet.

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Sonia Devillers continue le fayotage auprès de Laurence Bloch : « Le micro, ça vous manque ? Laurence a été une grande femme de radio avant nous. » Je l’ignorais. Je pensais que Sonia de Villers était la première, elle qui a contribué à abattre le patriarcat. D’ailleurs, pas de risque de « masculinité toxique » à France Inter, la station est dirigée par trois femmes : Sibyle Veil, Laurence Bloch et Catherine Nayl. Ce management efféminé n’est-il pas, tout bonnement, l’explication de ce succès d’audience ?

La menace fantôme

Après un running gag sur le malheureux Patrick Cohen parti s’échouer sur Europe 1, une prétendue privatisation de France inter comble actuellement toutes les blagues des humoristes maison (dont la moitié fait aussi des apparitions chez Barthès). A tous les étages de la Maison de la radio, on s’est mis martel en tête : on a peur d’une privatisation. Donner le fruit de toute cette intelligence collective au privé, quel effroi !

Mais pas d’inquiétude, tant qu’ils continueront à jouer les rebelles de salon et la carte du « progressisme » bon teint, il n’y a pas de raison que le système économique et politique en place ne s’émeuve réellement de prétendues nuisances. Guillaume Meurice peut continuer ses blagues anticapitalistes au quotidien, le conservatisme effrayant de France inter et le gauchisme culturel qui transpire de sa grille des programmes étant l’un des meilleurs atouts du « progressisme » macronien…



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