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Encore une histoire à coucher dehors


Encore une histoire à coucher dehors
Roselyne Bachelot et Rama Yade.
Roselyne Bachelot et Rama Yade
Roselyne Bachelot et Rama Yade.

Montrée du doigt par tout le Gouvernement, dont sa ministre de tutelle, et une grande majorité de la presse sportive[1. Parmi les minoritaires, on trouve Eugène Saccomano qui n’a pas mâché ces mots dans sa chronique matinale.], mais aussi dès le début par les joueurs de l’équipe de France, Rama Yade s’est donc sentie bien seule après ses propos concernant la cherté de l’hébergement de notre sélection nationale à la coupe du Monde.

Certes la jeune secrétaire d’Etat aux sports, démago en diable, avait négligé le fait que cet hébergement était pris en charge, pour une bonne part, par la FIFA, ainsi que le signalait le vice-président de la Fédération Française de Football Noël Le Graët[2. « Sa réflexion (NDLR de Rama Yade) me surprend. Cela fait six mois qu’on est au courant. La FIFA, qui prend en charge une somme importante de l’hébergement, dresse une liste d’hôtels, celui des Bleus est le plus adapté sportivement »], le reste demeurant à la charge d’une Fédération française de Football excédentaire. Ainsi, le contribuable français ne sera pas concerné par le prix de cette luxueuse hôtellerie.

France/Uruguay : un remake de Louhans/Rodez

Pourtant, il n’est pas certain que l’excellente cote de popularité de Rama Yade subisse une chute dans les prochaines semaines. En l’occurrence, l’attitude des joueurs français ce dimanche risque même de lui donner un coup de pouce supplémentaire. Nos sélectionnés, tout auréolés du superbe match joué contre l’Uruguay vendredi, dont la qualité n’était pas sans rappeler Louhans-Rodez de cette saison tant au niveau technique que collectif, n’ont rien trouvé de mieux que ne point attendre la ministre pour aller visiter un bidonville à quelques encablures de leur lieu de résidence. Il était pourtant prévu que tout ce petit monde inaugure ensemble les installations sportives payées par la Fédé pour les habitants de ce township. De service à la conférence de presse, le défenseur Eric Abidal n’a pas craint d’affirmer que lui et ses coéquipiers ne ressentaient pas « l’envie de rencontrer cette personne ». Cette personne… Curieuse manière de parler de la ministre de tutelle de la sélection dont ils font partie. Les habitants de ce bidonville ont donc eu droit à deux visites successives : celle des footballeurs français lesquels -on est en droit de l’espérer- ne se sont exceptionnellement pas présentés casques à musique sur les oreilles, puis celle de Rama Yade et son sourire habituel, lequel devait trancher avec la mine d’Anelka quelques heures plus tôt.

La courtoisie ? Connais pas ! La reconnaissance non plus.

Méconnaissant donc la courtoisie que l’on doit à un ministre de la République lorsqu’on porte le coq sur sa poitrine, Abidal, et les vingt-deux autres qui l’avaient mandaté, manquent aussi de reconnaissance du ventre. En effet, lorsqu’il a fallu défendre le droit à l’image collectif (DIC), mis en cause par le gouvernement qui suivait là les recommandations de la Cour des Comptes[3. Philippe Séguin qui était encore en vie et n’était pas connu pour détester le football, avait assumé ce rapport.], qui est venu, seule contre tous, défendre ce dispositif si intéressant pour augmenter substantiellement leurs rémunérations[4. Du moins celles des onze joueurs -sur vingt-trois-  qui n’évoluent pas à l’étranger.] ? Madame Yade ! Lorsqu’il a fallu défendre au Parlement la honteuse nouvelle législation libéralisant les paris sportifs en ligne, que réclamaient les clubs et qui permettra à ces derniers de mieux encore les payer, qui était là encore ? Rama Yade, toujours !

Ce qui prouve à la fois que la secrétaire d’Etat n’était certes pas la mieux placée pour en appeler à nos comptes publics mais aussi que les joueurs français ne sont pas plus intelligents dans leurs comportements médiatiques qu’efficaces devant une cage uruguayenne. En voulant, par cette goujaterie, punir Rama Yade, ils se sont comportés comme ses meilleurs agents de communication, lui rendant le beau rôle. Chapeau bas ! On ose espérer que cette manière de jouer contre-productif ne constitue pas une métaphore des deux prochaines prestations de notre sélection, auquel cas ses chances d’atteindre le second tour s’envoleraient à coup sûr. Certains optimistes, ou de fieffés provocateurs comme l’ami Raymond D., préféreront privilégier le fait qu’un esprit de corps a pu ainsi se forger sur le dos de la ministre. Si cela permettait enfin à Anelka de faire des passes à Gourcuff ou à Ribéry d’accepter de jouer côté droit pour la bonne cause, cette goujaterie aurait servi à quelque chose. Mais, franchement, vous y croyez, vous ?



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