Motörhead, encore, Motörhead toujours


Motörhead, encore, Motörhead toujours

MOTORHEAD rock lemmy

Dans des tas de domaines, je vis avec quelques mois de retard. Je n’arrive pas à me l’expliquer mais le dernier album de Motörhead est sorti l’hiver dernier et je viens de seulement de l’apprendre. Je ne suis pas particulièrement fan parce que l’attitude des crétins qui vénèrent en général me vénère particulièrement, mais je suis client. Le son que ces vieux de la vieille sortent de leur Marshall pour maintenir debout depuis presque quarante ans le dernier bastion du rock’n’roll encore en fusion, me rend dingue. Quand j’entre dans une période d’écoute intensive, je n’en sors qu’aux dépens du reste de ma discothèque. Après la voix de Lemmy Kilmister, tous les chanteurs ont l’air fragiles et efféminés et je cherche désespérément des éléments de comparaison pour évoquer ici leur, comment dire ? Musique ? N’ayons pas peur du mot. Craignons plutôt la chose.

Je vais tenter quelques rapprochements. Woodie Guthrie appelait sa guitare « cette machine qui tue les fascistes ». Motörhead pourrait servir d’instrument de torture à la CIA, une vierge de Nuremberg sonore parfaite pour faire frire les cerveaux talibans au fond des cachots de Guantanamo. Le son produit par une patrouille de Corsairs au décollage ? Ça vous parle ? Et la musique enveloppante, hypnotique, envoûtante, d’une escadrille de B52 qui répand la démocratie et les droits de l’homme sur l’Afghanistan ou qui remet l’Irak dans l’axe du bien ? Non plus. Vous vous étiez arrêtés où exactement dans l’histoire du rock? À U2 ? Il ne faut pas en rester là et tout le monde peut se tromper, surtout les malentendants. Un journaliste un peu dur de la feuille ou ramolli du bulbe les qualifiait bien il y a quelques années de plus grand groupe de rock, sans rire, avec leurs lunettes de tarlouzes, leurs futs en skaï et leur esbroufe à tous les étages. Si vous l’avez cru, il va falloir revoir vos classiques et, si la musique des vrais hommes de l’âge de fer vous prend, c’est un aller sans retour jusqu’à l’extrémité de la scène rock où, comme l’annonçait je ne sais plus qui, se trouve la chaudière infernale. Si vous tombez dedans, prévoyez alors de refiler votre œuvre intégrale de la bande à Bono à un centriste ou à un amateur de rock modéré.

Pour attaquer cette montagne de décibels par la face nord, pas besoin d’aimer le hard-rock en général ou l’une de ses trop nombreuses métastases en particulier, du grindcore au brutal death métal, il faut juste aimer le Rock’n’roll, celui qui swingue et qui a gardé un peu de Boogie dans les gènes. Ces gars ne le réinventent pas, ils le gravent dans le marbre, et à chacune de leur livraison, ils enfoncent le même clou, depuis toujours, celui qui a refermé le cercueil de toutes les modes et enterré tous les créatifs d’avant-garde qui ont traversé les colonnes des Inrockuptibles. On peut entrer dans le vif du sujet par quelques agressions sonores déjà anciennes mais pas prêtes d’être prescrites. Je vous donne les noms des albums qui reviennent le plus souvent casser les oreilles de mon entourage: « Ace of spades », « Sacrifice », « Bastards », « Hammered » ou « Inferno », et si vous voulez commencer en douceur, les titres « Life’s a bitch », « I am the sword » « The Hammer » ou « Out of the sun ». Le dernier s’appelle « Aftershock », c’est un bon cru mais attention, c’est pas de la musique de pédés. Il faut dire que chez Motörhead, ça ramone sûrement et modestement mais on ne se prend pas pour des artistes. C’est tout ce qu’on leur demande.



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Cyril Bennasar, anarcho-réactionnaire, est menuisier. Il est également écrivain. Son dernier livre est sorti en février 2021 : "L'arnaque antiraciste expliquée à ma soeur, réponse à Rokhaya Diallo" aux Éditions Mordicus.

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