Aymeric Caron, reviens!


J’ai rarement rencontré un personnage aussi imbu de lui-même, aussi odieux, aussi manipulateur qu’Aymeric Caron. Procureur dans un régime totalitaire, il n’aurait jamais manqué une occasion pour vous envoyer ad patres : documents truqués, témoignages extorqués sous la torture, arguments retors, questions biaisées, regard de psychopathe, il aurait inspiré un mélange de terreur et d’admiration qui aurait convaincu n’importe quel tribunal. Et c’est cet homme qu’il a fallu subir pendant des mois dans l’émission consensuelle et frivole de Laurent Ruquier, « On n’est pas couché ».

Et voilà qu’il nous manque. N’importe quel producteur hollywoodien vous expliquerait que plus le méchant est méchant, meilleur est le film. La haine engendre la haine et le taux d’adrénaline monte vertigineusement. Cet homme, de quelque bord politique qu’on soit, captait l’attention car il portait en lui, outre quelques convictions végétariennes aussitôt contredites par son sourire carnassier, des fioles de nitroglycérine prêtes à exploser. Un tel personnage est irremplaçable. Et du coup, Léa Salamé dans le rôle de la mégère qui cherche à s’imposer tout en sachant qu’elle n’y parviendra jamais et son nouveau comparse Yann Moix, qui cultive l’art de poser des questions alambiquées dont il est le seul à connaître la réponse, ne font pas le poids. Laurent Ruquier se contente de pouffer et les invités d’ânonner des banalités sans crainte d’être envoyés au goulag. Bien sûr, les bons sentiments sont encore au rendez-vous, y compris avec Michel Sardou dont on attendait plus d’indépendance d’esprit et  Thomas Dutronc qui a fait la promotion des carottes bio sous le regard attendri de Cécile Duflot qui, elle nous l’a promis, accueillera chez elle une famille de réfugiés. Quant à Guy Bedos confondu avec son fils Nicolas, il a trouvé le moyen de glisser quelques vacheries sur Mélenchon, ce qui n’est pas forcément très classe. Un ancien rédacteur du Monde a brièvement évoqué l’attitude des frères Simenon sous l’Occupation et la personnalité de Léon Degrelle, le fondateur du rexisme, qui a inspiré le personnage de Tintin. Voilà, vous savez tout.

Non pas vraiment tout : le vide abyssal laissé par le départ d’Aymeric Caron m’a entraîné dans une forme de léthargie dont je ne suis pas près de me remettre. Si la télévision française se met à ressembler à François Hollande avec petites blagues et rires étouffés dans une ambiance où personne n’ose dire ce qu’il pense, je regarderai la télévision nord-coréenne. Au moins là, il n’y a pas tromperie sur la marchandise.



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