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À l’Obs, rien de nouveau


À l’Obs, rien de nouveau

Le Nouvel Obs dénonce les néo fachos comme Causeur

Au Nouvel Obs, on adore compter les moutons noirs − ça doit être pour endormir les lecteurs. Au printemps 2011, l’hebdomadaire de la gauche à grande conscience recensait les « nouveaux réacs » qui sévissaient dans les médias. Ils étaient en guerre « contre les traditions républicaines de tolérance, de pluralisme culturel et de défense des libertés ». Autant dire que, déjà, ça ne sentait pas très bon. Au Nouvel Obs, on a l’odorat délicat et il est vite chatouillé par les idées des autres, et peut-être même par leur personne. Dix-huit mois plus tard, ça ne s’est pas arrangé. Et disons-le carrément, ça pue. Le réac, toujours « néo » mais faisandé, a tourné au « néo-facho ». On suppose que « néo-nazi », ce sera pour la saison III.?[access capability= »lire_inedits »]

J’en vois qui chipotent et sortent leurs bouquins d’histoire pour expliquer que le fascisme, ce n’est pas tout à fait ça. Où irait-on si les mots avaient un sens ? Au contraire, on ne saurait trop remercier les confrères. Sans la vigilance de ces dresseurs de listes et redresseurs de torts, la plupart des gens ignoreraient toujours qu’il existe sous nos cieux une « nébuleuse brune », sorte d’amicale du mal « au sein de laquelle des écrivains ou des journalistes communient dans l’obsession de la sauvegarde d’une identité française  » blanche et chrétienne  » ». Oui, une nébuleuse « brune », on y arrive, vous dis-je.
Des réacs aux fachos, la liste s’est allongée au point qu’on commence à être serrés sur la charrette. Et pour tout dire, la compagnie est de moins en moins choisie. À première vue, on peut trouver très chic qu’une « poignée d’écrivains maudits » soit venue rejoindre la cohorte des suspects habituels − Zemmour, Ménard, Rioufol, votre servante et quelques autres, avec Alain Finkielkraut dans le rôle d’imam caché, autrement dit de maître à penser à son corps défendant. Malgré les désaccords qui me séparent d’eux et qui, je crois, les séparent souvent aussi d’eux-mêmes, ce qui est à leur honneur, j’aime en effet lire Renaud Camus, Richard Millet ou Denis Tillinac − dont on se demande ce qui lui vaut cette soudaine indignité, ah oui, ses livres « suintent le  » Français de souche  » », c’était marqué dans Les Inrocks il y a quelques mois. En revanche, je l’avoue, je goûte assez peu le voisinage d’un Soral qui n’a de cesse de clamer sa haine des juifs en général et de votre servante en particulier, de Dieudonné, ou de Stormfront, association dont j’apprends en même temps qu’elle existe et qu’elle a été fondée par un ancien du Ku Klux Klan. Et puisque tout est dans tout et inversement, on ne s’étonnera pas que sur la cartographie qui représente cette vaste « mouvance identitaire » − et que les lecteurs de Causeur ont malicieusement baptisée l’« Affiche bleue » (voir l’article de Patrick Mandon, page 16) −, on trouve aussi, pêle-mêle, le Front national, le Bloc identitaire, aux côtés de la Droite populaire et de Patrick Buisson, bref tout ce qui se trouve à la droite de NKM.

Contrairement aux confrères, j’ai peur de lasser le lecteur. Aussi me contenterai-je de rappeler les principaux points du nouvel acte d’accusation, qui ne diffère pas tant que cela du précédent. Mes co-inculpés et moi-même partageons les mêmes « phobies » − comme on le verra dans la suite de ce numéro : « le mélange, l’immigration, l’islam et tout ce qui polluerait la pureté de la  » France éternelle » ». Je ne me rappelle pas avoir écrit les mots « France éternelle » autrement que pour les récuser, mais passons. Au Nouvel Obs, on n’a pas le temps de lire ceux qu’on dénonce − comme ça, on est sûr de ne pas être influencé. Mais surtout, et cela vous concerne, chers lecteurs, drapée dans ma « liberté d’expression », j’aurais fait de Causeur « une officine de blanchiment d’idées sales enfouies sous une somme d’articles parfaitement respectables et intéressants » − et revoilà la gauche olfactive.
Apprécions, d’abord, les guillemets destinés à encadrer la « liberté d’expression ». Il faut croire que, pour les confrères, la liberté ne doit servir qu’à exprimer les idées préalablement estampillées cachères en haut lieu. Eh bien oui, n’en déplaise à l’estimable Renaud Dély, signataire de cet indigent réquisitoire, à Causeur, tout le monde, y compris ma pomme, court le risque de s’étrangler en lisant les articles des autres. Ainsi, sur l’islam, thème principal de ce numéro, il découvrirait, s’il le lisait, des points de vue divers et contradictoires, l’ensemble permettant à un lecteur adulte de se forger son opinion, mais peut-être que les lecteurs de l’Obs ne sont pas adultes et qu’ils ont besoin qu’on leur dise ce qu’ils doivent penser. S’il rééditait chaque mois l’expérience douloureuse qu’est la lecture de Causeur, Renaud Dély saurait que nous sommes capables de nous interroger sur nos « phobies », c’est-à-dire de nous demander si nous ne parlons pas trop de ces sujets dont il ne faudrait, si on l’écoutait, parler que sur le mode irénique − islam, immigration, multiculturalisme, bref les sujets qui fâchent et même qui fachisent. Nous plaidons coupables : nous publions parfois des textes choquants, blessants ou irritants pour les uns ou les autres. Et nous avons bien l’intention de continuer, parce que nous aimons vivre dans un monde où on peut être choqué, blessé ou irrité par les idées de ses contemporains. Pour l’Obs, c’est du « blanchiment d’idées sales ». Nous, on appelle ça le pluralisme. Ou la liberté d’expression. Sans guillemets.[/access]

Octobre 2012 . N°52

Article extrait du Magazine Causeur



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Fondatrice et directrice de la rédaction de Causeur. Journaliste, elle est chroniqueuse sur CNews, Sud Radio... Auparavant, Elisabeth Lévy a notamment collaboré à Marianne, au Figaro Magazine, à France Culture et aux émissions de télévision de Franz-Olivier Giesbert (France 2). Elle est l’auteur de plusieurs essais, dont le dernier "Les rien-pensants" (Cerf), est sorti en 2017.

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