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L’affaire Sarkozy et le malaise de nos élites

Le billet politique d’Ivan Rioufol


L’affaire Sarkozy et le malaise de nos élites
Paris, 25 septembre 2025 © Christophe Ena/AP/SIPA

Sarkozy entrainera la Justice dans sa chute, prédit Ivan Rioufol


La classe politique, affaiblie, entraine la Justice dans sa chute. Avec la prochaine détention de Nicolas Sarkozy, décidée jeudi par le tribunal correctionnel de Paris dans l’affaire libyenne, c’est l’ensemble du système en place depuis un demi-siècle qui est ébranlé. L’édifice résistera-t-il encore longtemps aux coups de boutoir des réalités ?

Absence de preuves et d’aveux

Celles-ci obligent de plus en plus les élites à descendre de leurs nuages pour s’attacher aux faits, aux évidences, à la vie des gens. Or une même déconnexion unit l’exécutif, le législatif, le judiciaire : ils se sont étourdis de leurs leçons de morale sans toujours être eux-mêmes exemplaires. L’ancien président de la République a été condamné à cinq ans de prison, avec mandat de dépôt à effet différé de quelques semaines, en dépit d’une absence de faits, de preuves, d’aveux. Le réel est une donnée qui, une fois de plus, est restée à la porte du raisonnement du tribunal. Les relaxes sur les trois accusations de corruption, de recel de détournement de fonds libyens et de financement de la campagne présidentielle de 2007 confirment d’ailleurs le vide du dossier. Il avait été ouvert de surcroit en 2012 par la publication par Mediapart d’un document soupçonné d’être un faux par le tribunal. Ce dernier a néanmoins voulu sanctionner une « association de malfaiteurs » dans le dessein d’humilier un homme politique. Mais ce règlement de compte, mené sous la présidence d’une juge qui aurait elle-même manifesté contre Sarkozy en 2011, a toutes les apparences d’un abus de pouvoir.

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Les citoyens regardent ailleurs

Les sondages le répètent : les Français n’ont pas davantage confiance en leurs juges qu’en leurs dirigeants ou leurs représentants. Cette « guerre » entre le pouvoir politique et le pouvoir judiciaire, dénoncée ce vendredi matin par Henri Guaino sur RTL, n’est pas celle des citoyens : ils restent les spectateurs affligés de ce monde qui pourrit de l’intérieur. La « révolution d’atmosphère » à laquelle se prête le tribunal correctionnel en faisant embastiller prochainement un ancien président de la République est un leurre. Avec leur coup de force corporatiste, les juges se dévoilent dans les rôles usurpés de prêcheurs de vertu qui saturent la vie publique depuis trop longtemps.

D’autant que ces justiciers, qui condamnent sans preuve, ne sont pas exempts de cette corruption morale qu’ils reprochent à Sarkozy. Non seulement il est risqué de critiquer les décisions des juges, abrités derrière un État de droit à usage flexible, mais personne ne les jugera en retour pour leurs possibles fautes. S’il est une révolution à souhaiter, c’est celle qui mettra un terme aux fantômes en place. Des trois pouvoirs existants depuis Montesquieu – exécutif, législatif, judiciaire – il en manque un quatrième : le pouvoir du peuple. C’est vers lui que le système en décomposition doit se tourner pour retrouver le réel.



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Journaliste, éditorialiste, essayiste. (ex-Le Figaro, CNews, Causeur)

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