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Rideaux de fumée


De toute ma vie, je n’ai jamais grillé une seule cigarette. Il m’est répugnant de voir ou de toucher un mégot. A ma connaissance, seul l’ayatollah Khomeiny manifestait une horreur du tabac comparable à la mienne.
Adolescent, j’ai vu mes camarades se mettre à fumer pour la pire des raisons : le conformisme social. Le tabac n’est qu’une fumigation nauséabonde à laquelle on cède sans plaisir, pour faire comme les autres. Les mille additifs/addictifs concoctés par l’industrie se chargent ensuite de transformer les jeunes moutons en vaches à traire.
Ceci pour attester que ce qui suit n’est pas sponsorisé par ladite industrie.

Jusqu’à l’âge de trente ans, j’ai dû endurer la fumée sans piper mot. Cette peine est désormais remplacée par une autre : devoir supporter un conformisme contraire encore plus arrogant.
Sachez donc, tabagistes traqués, que ma maison vous est ouverte. Personne n’y sera relégué sur le balcon. Les brassards jaunes et les crécelles pour lépreux, très peu pour moi !
La traque à la fumée est symptôme d’une préoccupante folie. Toutes les dérives totalitaires, sans exception, partent d’un souci d’hygiène et de pureté morale, et prospèrent sur des hallucinations.
Dans le beau film sur Le mystère Silkwood (1983), traitant des crimes de la mafia nucléaire, un Kurt Russell goguenard dit à Meryl Streep, dénonciatrice des empoisonneurs mais qui aligne clope sur clope : « Si tu veux éviter le cancer, arrête plutôt de fumer ». Il y a trente ans déjà, la nocivité du tabac était un lieu commun, mais qu’on traitait sur le mode nonchalant. Sa récente montée en épingle n’est pas une question de santé, mais d’idéologie.
Tout est affaire de probabilités, ou plutôt de leur interprétation. La généralisation du tabagisme correspond aussi, en Occident, à l’explosion de l’espérance de vie moyenne : en conclura-t-on que le tabac prolonge la vie ? Par ailleurs, même une probabilité de 99,99 % ne vous garantit pas qu’une chose va arriver. Or le principe de précaution, qui transforme notre société en un hospice infantile, traite un risque comme une certitude dès le plus infime degré de probabilité. On en arrive ainsi, par un remarquable obscurcissement mental, à traiter le tabac comme du plutonium. La moindre inhalation serait potentiellement mortelle !
Le cordon sanitaire tendu autour de ce vice bénin est lui-même un rideau de fumée. Si le tabac était du plutonium, il faudrait l’interdire. Or on en est loin. On l’utilise comme arme pour culpabiliser et conditionner la population. La focalisation sur des enjeux secondaires tels que le tabac ou le terrorisme permet de rogner les libertés sans opposition et sans risque. Pendant ce temps, la dissémination massive d’uranium appauvri, les incidences suspectes de l’électrosmog ou de certains vaccins sur le métabolisme sont totalement ignorés.

Une consolation toutefois : nous assistons à une prolifération rapide des cancers — sans cause apparente selon les autorités. Lorsqu’ils toucheront plus de la moitié de la population, au moins saurons-nous que ce n’est pas à cause du tabac !



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est directeur des éditions Xenia et rédacteur en chef d’Antipresse.net.

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