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J’admire Macron, mais je vote Le Pen


J’admire Macron, mais je vote Le Pen
Une militante colle l'affiche de campagne d'Emmanuel Macron à Saint-Jean-de-Luz, avril 2017. SIPA. AP22045457_000033
Une militante colle l'affiche de campagne d'Emmanuel Macron à Saint-Jean-de-Luz, avril 2017. SIPA. AP22045457_000033

Inutile d’épiloguer sur l’échec de François Fillon. Nicolas Sarkozy avait raison de le comparer au pilote suicidaire de la Germanwings enfermé dans sa cabine de pilotage et insoucieux de la vie des passagers de l’avion. Autant le candidat vaincu m’a agacé en s’arrogeant le droit de nous donner une consigne de vote au soir de la défaite, autant il m’a paru digne le lendemain en déclarant qu’il s’effaçait et redevenait un simple « militant de cœur ». David Cameron a disparu du paysage politique anglais, François Fillon doit désormais s’habiller de vert et se fondre dans les charmants bocages de l’Ouest. « Vae victis », comme on disait avant que Najat Vallaud-Belkacem ne désapprenne le latin aux Français.

Macron n’est pas Hollande

La perspective de voir Emmanuel Macron conquérir l’Elysée ne doit pas nous rendre hystériques. L’argument « Emmanuel Hollande », qui consistait à le faire passer pour le simple continuateur d’un président impuissant qui a presque tout raté dans son quinquennat, relevait de la polémique de campagne. On peut bien l’avouer maintenant : cet argument ne valait rien car tout oppose les deux personnalités. Le jeune homme audacieux n’a rien à voir avec le vieux velléitaire, le pragmatique n’a rien à voir avec le conformiste qui n’a pas osé rompre avec la stérile idéologie de gauche, l’autoritaire qui commence à percer sous le masque de gentil garçon n’a rien à voir avec le perpétuel indécis, l’obstiné chercheur du « point d’équilibre » qui a perdu son temps à marier la carpe Valls et le lapin Hamon.

Le gouvernement déliquescent de M. Cazeneuve a intérêt à faire croire que le macronisme n’est que la continuation du hollandisme sous un visage plus avenant. La fulgurante ascension d’Emmanuel Macron ne résulte pas d’un complot socialiste, mais d’une trahison bienvenue et d’une rupture assumée avec un gouvernement incapable de la moindre réforme. Hollande et Cazeneuve peuvent bien répéter à propos du favori de l’Elysée la fameuse phrase de Cocteau : « Puisque ces mystères nous dépassent, feignons d’en être les organisateurs », personne n’est dupe.

Emmanuel Macron semble posséder quatre qualités importantes pour le redressement de la France : il est audacieux, il est pragmatique, il est autoritaire, il est évolutif. Et pourtant je ne voterai pas pour lui, comme je m’en expliquerai.

Il ne se croit pas obligé d’avoir l’air de gauche

Il a eu l’audace de quitter son poste de ministre de l’Economie et de lancer seul le mouvement En marche !, contre toutes les routines et contre l’avis de tous ceux qui prévoyaient l’éclatement de sa « bulle ». Croit-on que l’audace de Macron retombera dès qu’il sera installé dans son fauteuil à l’Elysée ? Macron, à défaut d’être le fils de François Hollande serait-il celui de Jacques Chirac qui déployait des trésors d’énergie à chaque élection présidentielle et ne faisait plus rien pendant ses mandats sinon attendre la prochaine échéance électorale ? Preuve de l’audace de Macron : il prévoit de retirer l’assurance chômage et la formation professionnelle de l’emprise des « partenaires sociaux », les syndicats de patrons et d’employés et de le confier à la gestion gouvernementale. Sans les milliards de la formation professionnelle, les syndicats seront forcés de faire la manche dans le métro. Voilà une mesure parfaitement thatchérienne, qui se révèlera excellente pour l’emploi. On peut faire la même démonstration avec le projet d’aligner les retraites du secteur public et celles du secteur privé. Macron est un Thatcher qui s’avance masqué, il a l’énergie suffisante pour mettre fin au chômage de masse et faire changer d’avis les Français sur le libéralisme. Ce malheureux peuple est éduqué à l’antilibéralisme depuis des années. Que Nathalie Arthaud soit professeur d’économie est une preuve très inquiétante de la gauchisation de l’Education nationale. Les cours d’économie en lycée sont une autre fabrique du crétin que Brighelli n’a pas pensé à dénoncer.

>> A lire aussi: Macron : un “new deal” entre la société et l’Etat

Macron est pragmatique et se moque des idéologies. Il a sur tous les hommes politiques qui se trouvent à sa gauche, de Valls à Philippe Poutou, une énorme supériorité : il ne se croit pas obligé d’avoir l’air de gauche. Avoir l’air de gauche, obéir aux innombrables prescriptions idéologiques du politiquement correct est un impératif plus fort dans la tête des socialistes que le bien de la France. Le travail du dimanche aurait créé beaucoup d’emplois, mais il fait partie des tabous de gauche, il n’a donc été mis en place que de façon homéopathique. Et tant pis pour les jeunes gens qui restent sur le carreau sans pouvoir démarrer leur vie, construire une famille ou acheter un appartement. Emmanuel Macron n’a pas de surmoi de gauche, ouf, quel soulagement ! On peut rêver du jour où il s’apercevra que l’Aide médicale d’Etat (AME) coûte très cher, qu’elle attire en France des populations qui feraient mieux d’exiger de leurs gouvernements respectifs la mise en place de vrais systèmes de santé publique. La France est le seul pays au monde où être clandestin vous procure un statut, mais tout esprit formaté par la gauche se refusera à l’idée de supprimer cette dépense. Le pragmatique Emmanuel pourra l’envisager le jour où il sera solidement arrimé au pouvoir.

Le retour de la verticale du pouvoir

Emmanuel Macron est autoritaire, et on devine chez lui un goût certain pour l’exercice solitaire du pouvoir. On ne voit guère de bras droit dans son équipe et je pense qu’il nommera Premier ministre le 8 mai un parfait inconnu, incapable de faire ombrage au chef. Je l’approuve. Les modernes, imprégnés de socialisme même quand ils se croient de droite, sont volontiers grégaires et ne croient qu’aux solutions élaborées à coups de consensus et de « démocratie participative ». « Nuit debout » a donné une illustration parfaitement caricaturale de cette tendance. Macron n’a rien de participatif, il prend ses décisions tout seul et dissimule ce bonapartisme à la fois par l’étalage effréné de son couple et par les cérémonies vaudou où il met ses partisans en état de transe collective.

Derrière ce rideau de fumée, le paradigme change complètement : la verticale du pouvoir revient discrètement après cinq ans de mare aux grenouilles parfaitement horizontale. Les gentils sourires de play boy feront place le 8 mai à la mâchoire crispée de l’homme de pouvoir. Pour faire des sourires et des ronds-de-jambe, il pourra toujours engager François Hollande comme secrétaire d’Etat aux Cérémonies d’Hommages aux Prochaines Victimes du Terrorisme. Ordonnateur des pompes funèbres est le vrai talent de notre bientôt ex-président de la République. Si Macron ne veut pas de lui, il pourra faire un tabac chez Roc-Eclair et on se le disputera pour animer les cérémonies de crémation.

Emmanuel Macron est évolutif, justement parce qu’il est pragmatique. Il ne restera pas bloqué dans ses naïvetés de Bisounours sur l’immigration massive et le danger de la destruction de la France par l’hyperviolence venue du Moyen-Orient et l’hypernatalité venue d’Afrique. Si par malheur il avait tendance à s’endormir sur ces questions cruciales, le prochain attentat du terrorisme islamiste sur le sol français le réveillerait en fanfare.

Marine, le vote utile… pour enhardir Macron

D’ailleurs, c’est justement pour lui faire prendre conscience de la gravité des menaces qui pèsent sur l’identité française que je vais voter pour Marine Le Pen le 7 mai. 30% pour le Front national et 70% pour En Marche ! , ce score permettrait de répéter les mêmes inepties sur cette minorité de fascisants, de haineux et de sous-diplômés ruraux qui sont prêts à marcher au pas de l’oie. A 40% pour la blonde et 60% pour le blond, ça aurait un autre poids, et les esprits les plus obtus commenceraient à comprendre qu’il existe un problème grave, que le Front national souligne l’existence de questions qui ne peuvent être réglés par les incantations chamaniques de la gauche. Et puis, je ne peux résister au fabuleux plaisir que je vais prendre le 7 mai à ne pas suivre les consignes des deux François. François Fillon, le pilote de la Germanwings, a fait écraser notre avion avec plusieurs millions d’électeurs à bord contre une montagne des Alpes, il n’a donc aucune légitimité pour donner quelque conseil que ce soit. Je suis, par ailleurs, scandalisé chaque fois que j’entends François Hollande mettre les Français en garde contre le Front national. Que n’a-t-il pris les mesures nécessaires pour le faire reculer, c’est lui qui était au pouvoir il me semble ? La recette est simple et je la lui confie gratuitement : pour arrêter le Front national, il fallait arrêter le chômage et arrêter l’immigration de masse. Les mesures libérales, celles qui auraient rassuré les entrepreneurs et qui leur auraient permis d’embaucher, ont été ridiculement insuffisantes. Quant à la fin du regroupement familial et du droit du sol, ce sont des tabous absolus que la gauche, de son vivant, n’a jamais osé abolir.

Marine Le Pen, malgré ses solutions incohérentes, a pris la figure de la Madone des Humiliés et des Offensés, de ceux qui n’ont pas de travail, pas de piston, pas de diplômes, pas de relations, de tous les petits Blancs qui se sentent submergés et rejetés par des nouveaux-venus qui les chassent peu à peu de leurs  quartiers et de leurs villages. On entre bien dans les raisons des terroristes, pourquoi n’entrerait-on pas dans les raisons de Marine Le Pen et de tous ceux qui votent pour elle ? Le 7 mai je serai assis dans la poussière avec les chômeurs et les dépossédés, je ne banquèterai pas à la table des puissants.

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est romancier et professeur de lettres agrégé.

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