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School is not cool


School is not cool

Vous pensez que le système éducatif français est au bord de l’implosion, avec ses 16 000 suppressions de postes programmées pour 2011 ? Que nos établissements de « zones sensibles » sont des ruines peuplées d’élèves en rupture de ban ? Que l’École de la République se meurt, que l’École de la République est morte ? Ce n’est pas impossible mais la lecture de Rupture, le premier roman de Simon Lelic, un jeune auteur anglais né en 1976, vous montrera qu’en la matière, le Royaume-Uni a pris une avance certaine.[access capability= »lire_inedits »]

Précisons d’emblée que Rupture est un roman noir − ou un « polar », pour parler comme ceux qui continuent à penser qu’il s’agit d’un genre secondaire. Le bon roman noir, pourtant, vaut toutes les analyses d’expert quand on veut vraiment approcher le réel d’une société. Et le roman de Lelic est un peu plus que bon : il a été salué comme un exploit littéraire outre-Manche. L’art que met l’auteur à restituer une bonne dizaine de voix différentes dans toute leur vérité est impressionnant, et Rupture en acquiert une dimension polyphonique et poignante qui vous hante durablement.

L’histoire de Rupture est simple, brutale et horrible comme un fait divers. Dans un collège de la banlieue de Londres, par un jour caniculaire, une réunion plénière se tient dans le gymnase. On va y parler de l’agression dont un élève a été victime à l’extérieur du collège. C’est alors qu’un professeur d’histoire, Samuel Szajkowski, sort un pistolet datant de la Seconde guerre mondiale et ouvre le feu. Il tue trois élèves et une enseignante avant de se suicider. L’enquête est confiée à une femme-flic, Lucia May, elle-même harcelée par ses collègues. Ce qu’elle découvre peu à peu, en recueillant les témoignages des uns et des autres, c’est que l’acte présenté par la presse comme celui d’un psychopathe aurait pu, sans doute, être prévenu. Mais dans le collège régnait la loi du silence, celle imposée par un chef d’établissement soucieux de ne pas régresser dans le classement et, surtout, de récolter des financements privés afin de pouvoir financer son autonomie, comme l’exigent les nouvelles lois.

Pour cela, évidemment, il ne faut pas faire de vagues et Lucia May comprend comment le directeur a laissé tomber le professeur d’histoire, devenu la tête de Turc des caïds de l’école, et même de certains de ses collègues. Sans compter les faux témoignages au moindre incident afin de présenter à la police, elle-même surtout soucieuse d’éviter d’éventuels affrontements, une version acceptable.

Rupture n’est pas seulement, on le voit, la simple autopsie d’un fait divers en milieu scolaire. C’est la peinture au couteau d’une société tout entière à la dérive. Et l’état de mort clinique de son École n’est qu’un symptôme de cette dérive. Sans doute le plus désespérant, car c’est dans le lieu où tout devrait naître, nous dit Lelic, que tout meurt sans gloire, par le massacre quotidien des innocents.[/access]

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Février 2011 · N°32

Article extrait du Magazine Causeur



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