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La mondialisation? Non coupable


Début 2010, la fermeture de l’usine Continental de Clairoix dans l’Oise a laissé 1 113 salariés sur le carreau. Depuis, la lutte des « contis » symbolise le combat désespéré de tous les ouvriers qui cherchent à protéger leur emploi face aux prétendus méfaits de la mondialisation.
Un millier de tragédies personnelles à Clairoix ont donc polarisé l’intérêt des journaux, qui firent la part belle aux discours imputant la responsabilité de la désindustrialisation à la mondialisation des échanges.

C’est faire bien peu de cas de la situation industrielle hexagonale. Entendons-nous bien : je ne minimiserai pas la douleur des « contis ». Etant doué d’empathie, je mesure le drame humain que représente la perte d’un emploi, a fortiori dans un contexte de chômage structurel qui démontre l’échec de nos gouvernements successifs.

Mais d’après l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII), pendant que l’usine Continental fermait ses portes l’an dernier, les entreprises étrangères ont créé 25 403 emplois en France et en ont sauvé 6 412 en reprenant des sociétés françaises en difficulté[1. Agence française pour les investissements internationaux, Bilan 2010.]. De 2000 à 2010, la même mondialisation qui a mis les « contis » au chômage a ainsi généré ou préservé 30 816 emplois par an. De cela, vous n’avez certainement jamais entendu parler ! De même, le nom d’Enercon GmbH ne vous dit très probablement rien. Cette société allemande vient de poser la première pierre de sa future usine de mâts d’éoliennes à Longueil-Sainte-Marie, une commune située dans le même département que les contis (l’Oise). D’ici l’été 2012, elle y emploiera 90 salariés. A quelques centaines de kilomètres de là, l’équipementier automobile canadien Magna International investit 18 millions d’euros sur son site lorrain d’Henriville et s’apprête à y embaucher 75 personnes supplémentaires.

Je pourrais multiplier les exemples d’entreprises étrangères installées en France dont vous ignorez jusqu’à l’existence. Pour la seule année 2010, l’AFII a en effet recensé 782 projets créateurs d’emplois initiés par des sociétés étrangères. Prises individuellement, ces créations d’emplois paraissent anecdotiques mais, en termes d’embauche globale, équivalent à 28 usines Continental de Clairoix par an. Selon les données d’Ernst & Young [2. Ernst & Young, Baromètre Attractivité du site France 2010.], la France constitue le deuxième marché européen le plus attractif en matière d’investissements étrangers, derrière le Royaume Uni. Fin 2008, l’Insee recensait près de 20 000 filiales de groupes étrangers installées en France, ce qui représente plus de deux millions d’emplois.
Notez d’ailleurs que Continental AG, qui avait créé des emplois à Clairoix, est une entreprise allemande .

Certes, certaines industries comme le textile ou l’électroménager ont massivement délocalisé leur production vers des pays à bas salaires mais ce phénomène ne forme que la partie visible de l’iceberg. La plupart du temps, la mondialisation permet à des entreprises étrangères de s’installer en France, soit pour y trouver des compétences dont elles ne disposent pas chez elles (par exemple, dans le domaine de la recherche et développement), soit pour accéder au marché français et européen (à l’instar d’Enercon GmbH). Et s’il reste extrêmement difficile d’évaluer précisément la création nette d’emplois liés à la mondialisation, ce chiffre est vraisemblablement très positif.

Ajoutons que l’internationalisation et l’augmentation de la taille des marchés ont fait spectaculairement baisser les prix des produits textiles et des appareils électroniques, sans parler des autres biens de consommation. Partant, nous devons nos gains de pouvoir d’achat à la mondialisation.

A l’heure où nombre de nos concitoyens se laissent bercer par le chant des sirènes protectionnistes de quelques politiciens aux discours simplistes, rappelons enfin cet aphorisme de Frédéric Bastiat : « si les marchandises ne traversent pas les frontières, les soldats le feront ».



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