Après le «non» grec, Berlin ne fera pas de quartier


Après le «non» grec, Berlin ne fera pas de quartier

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Le premier dirigeant allemand qui s’est exprimé, lorsque l’issue du référendum grec ne laissait plus de place au doute, a été Sigmar Gabriel, vice-chancelier, ministre de l’économie et président du Parti social-démocrate (SPD). Ses propos ont été sans équivoque : pour lui, Alexis Tsipras a « rompu les derniers ponts qui le reliaient à l’Europe ».  Il considère, par ailleurs que « la poursuite des négociations avec Athènes est difficilement imaginable ». Cette intervention, et celle allant dans le même sens, quelques minutes plus tard de son camarade de parti Martin Schulz, président du Parlement européen, dispensait les « faucons » conservateurs allemands, comme la chancelière Angela Merkel, et surtout son inflexible ministre des Finances Wolfgang Schäuble de monter en première ligne pour sonner l’hallali contre les rebelles athéniens. Les seules voix qui s’élèvent outre-Rhin pour réclamer de la mansuétude envers la Grèce se situent à l’extrême gauche, dans le parti Die Linke, durablement enfermé dans le ghetto des nostalgiques de l’ex-RDA. Les critiques les plus vives concernant l’action de la chancelière dans l’affrontement au sein de la zone euro entre Tsipras et les «institutions» (UE, BCE, FMI) proviennent de la droite,  comme le quotidien conservateur Die Welt, qui estime que le « non » grec est une défaite pour une chancelière ayant naïvement espéré qu’un sursaut de la raison, celle du portefeuille, allait permettre au « oui » de l’emporter.

Dans les couloirs du Parlement européen, où les députés allemands de la CDU et du SPD donnent le «la», il n’est question que de l’organisation d’un «Grexit» ordonné, qui soit le moins dommageable possible pour les autres membres de la zone euro. Si l’on ajoute à cela la colère des Néerlandais, des Baltes, des Slovènes, Slovaques et même des Portugais, Maltais et Espagnols contre un gouvernement d’Athènes qui prétend à un traitement de faveur, on ne voit pas bien quel cadeau Angela Merkel pourrait apporter dans ses valises pour le dîner de lundi soir à l’Elysée, et le sommet de l’eurozone, mardi à Bruxelles. Certains commentateurs français, comme Laurent Neumann de BFMTV voulaient voir dans le fait  qu’Angela Merkel se déplace à Paris pour renouer les fils du dialogue franco-allemand au bord de la rupture un signe d’assouplissement de la position germanique. Mais non, ballot! Angela Merkel, pragmatique et peu sensible aux chichis de préséance, préfère que son « nein » à de nouvelles concessions à Tspiras soit acté à Paris plutôt qu’à Berlin! On trouvera bien quelques clauses de style pour donner l’impression que François Hollande n’a pas mangé son chapeau, mais la détermination de Mme Merkel, portée par une opinion publique allemande chauffée à blanc, est inébranlable.

Le scalp de Varoufakis (métaphore, bien sûr!) offert par Tsipras à Merkel et ses amis apparait, dans ce contexte, comme une nouvelle ruse visant à semer la confusion dans les rangs européens. Les éléments de langage qui émergent maintenant en Allemagne annoncent un changement de paradigme : la question grecque, pour nombre de responsables allemands, sort du champ politique pour entrer dans celui de l’aide humanitaire. L’Europe doit maintenant aider les Grecs les plus pauvres à se nourrir et  se soigner, et laisser ses dirigeants irresponsables avec leurs chimères idéologiques. «Il faut que les Grecs comprennent que jamais nous n’accepterons une Europe socialiste!» tonnait, dimanche soir un journaliste conservateur lors de l’émission phare de l’ARD, la première chaîne publique allemande de télévision. Cela, même les sociaux-démocrates allemands l’ont compris.

*Photo : Michael Sohn/AP/SIPA. AP21711161_000030.



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