Un très beau cadeau de Noël: Napoléon vu par Abel Gance sorti en Blu-ray haute définition par Potemkine Films[1]. Tout le génie cinématographique d’Abel Gance au service de la grandeur de Bonaparte et de la France…

Je n’avais jamais vu ce film mythique. Depuis 50 ans, j’attendais le moment de découvrir la vison de Napoléon vu par Abel Gance après avoir vu des extraits de versions non satisfaisantes. Le travail méticuleux et subtil de reconstitution du film dans sa Grande Version inédite et définitive accompli pendant seize ans par Georges Mourier et son équipe est exceptionnel. Cette restauration est au plus près du montage originel dans la rythmique musicale, voulue par Abel Gance, très proche de la copie Apollo montrée en 1927.
Abel Gance, un inventeur du cinéma
Abel Gance est avec Jean Epstein, Cecil. B. DeMille et David Wark Griffith l’un des grands cinéastes inventeurs de formes du cinéma muet. Indéniablement, c’est un réalisateur inspiré et novateur dont le style empreint de lyrisme tranche avec la production de l’époque.
J’Accuse (1919) et La Roue (1923) deux chefs-d’œuvre de l’art cinématographique le consacrent comme un metteur en scène reconnu qui a tourné de nombreux beaux films durant la période du cinéma muet, puis des œuvres intéressantes mais parfois moins convaincantes après la naissance du cinéma parlant et sonore.
Une fresque monumentale
Napoléon vu par Abel Gance est une fresque monumentale datant de 1927, qui retrace la vie du futur empereur depuis son enfance jusqu’aux premiers feux de la campagne d’Italie.
Genèse et production du film
La recherche de financement pour sa production et l’écriture du scénario s’étalent de 1923 à 1924. Abel Gance pensait réaliser six films racontant l’histoire complète de Napoléon. Il s’associe avec Pathé, monte la société Les Films Abel-Gance puis écrit le premier volet du film. Le tournage démarre le 15 janvier 1925, aux studios de Billancourt. Il dure quatorze mois (entre Paris, la Corse et le château de Versailles…) et nécessite des tonnes de matériel dont dix-huit caméras…
Un laboratoire d’innovations pour une œuvre hors norme
Pour servir au mieux la mise en scène de son film, Gance innove sans cesse et trouve de nouvelles solutions techniques : caméras sur des filins et des balançoires, caméras portées, installées sur des chevaux au galop, fabrication d’objectifs spéciaux, surimpressions, essais sur la couleur et tournage du film en Polyvision (pour une projection sur trois écrans)… Le montage, assuré par Abel Gance et Marguerite Beaugé, exige un an de travail.
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Napoléon vu par Abel Gance est une œuvre cinématographique, artistique, historique et politique d’une envergure sans pareille. L’épopée napoléonienne d’Abel Gance est un poème épique d’une audace et d’une inventivité folle au service de la grandeur de la France et d’un homme qui l’aimait : Napoléon Bonaparte. L’histoire de France vue par Abel Gance tient de la force et de la beauté du roman national servi par la vision acérée et précise du cinéaste, la justesse d’interprétation de tous les acteurs en particulier celles d’Albert Dieudonné (Napoléon Bonaparte), Abel Gance (Saint-Just), Alexandre Koubitzky (Danton), Edmond Van Daële (Robespierre), Antonin Artaud (Marat), Gina Manès (Joséphine de Beauharnais), Annabella (Violine)…
Esthétique, musique et mise en scène
La mise scène est ample, rigoureuse et attentive. Ses plans et images flamboyants sont servis par un noir et blanc contrasté parfois teinté de bleus, rouges, verts, jaunes ou bistres illustrant les tensions dramatiques du récit. La musique extraordinaire de justesse confiée à Simon Cloquet-Lafollye et interprétée par l’Orchestre National de France, l’Orchestre Philharmonique et le Chœur de Radio France, sous la direction de Frank Strobel est faite de plages de calme et de tensions, de moments lyriques et d’envolées magnifiques. Le compositeur a puisé dans plus de deux cents ans de musique symphonique subtilement réarrangé pour la bande musicale du film.
Humanité et violence
Gance filme avec une grande tendresse les scènes où la vie privée des personnages principaux de l’aventure napoléonienne sont en jeu. Relations familiales, amour maternel et filial et passion amoureuse donnent à cette œuvre une vérité humaniste. Lorsqu’il s’agit de filmer la violence et la terreur de la Révolution française ou la barbarie de la guerre – prise de Toulon, bataille d’Italie – il montre sans concession par des procédés visuels de surimpression et de colorisation, l’horreur en marche.
Un aboutissement cinématographique
Tous ces éléments liés à l’attention particulière du cinéaste aux sentiments, désirs, pensées et souffrances de ces personnages qui ont écrit l’histoire de notre nation font de ce film un véritable enchantement pour qui aime la France, l’esthétisme cinématographique, la musique.
Le triptyque final de la bataille d’Italie est un morceau de bravoure et d’anthologie cinématographique bouleversant, grâce à sa beauté et son inventivité formelle.
Un film muet où l’on voit et entend le bruit et la fureur de l’Histoire. Une véritable prouesse, un chef-d’œuvre absolu ou la forme et le fond se rejoignent.
1927 – 7h20 – film historique – muet
[1] Coffret du film restauré par la Cinémathèque française. Contient :- 3 Blu-ray, le livre Napoléon vu par Abel Gance, des éditions La Table Ronde (2024, 312 pages), un livret avec la liste des musiques utilisées pour la bande son.
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