Notre chroniqueur voit dans les attentats de Paris mais aussi de Bruxelles le prix de « l’humanisme » solitaire et autoritaire d’Angela Merkel.
La crise migratoire de 2015 a ouvert la voie aux attentats de Paris et de Bruxelles. En décidant unilatéralement d’ouvrir les frontières de l’Europe, Angela Merkel porte une lourde responsabilité dans ces tragédies. L’exode lié au conflit syrien avait débuté en 2012 et s’était amplifié au fil des années. À l’été 2015, la situation devint critique, avec une accumulation de migrants en Grèce et en Hongrie. Le 4 septembre 2015, Angela Merkel prit seule la décision historique de suspendre temporairement le règlement de Dublin — qui impose le traitement des demandes d’asile dans le premier pays d’entrée — et d’autoriser les réfugiés bloqués en Hongrie à rejoindre l’Allemagne. Ni ses partenaires européens, ni le Parlement allemand ne furent consultés. Elle lança alors sa phrase devenue emblématique : « Wir schaffen das » (« Nous y arriverons »).
La photo d’Aylan, tournant émotionnel
Presque simultanément, l’image du petit Aylan, retrouvé mort sur une plage grecque, bouleversa l’opinion publique. Dès lors, toute critique devint impossible : les médias européens rivalisèrent pour présenter l’accueil des migrants comme un impératif moral. Cette photo joua un rôle comparable à celui du cliché de la fillette fuyant un bombardement au napalm pendant la guerre du Vietnam. Pourtant, la diffusion d’une telle image était inhabituelle : la presse occidentale s’interdit généralement ce type de représentation. On n’a jamais vu d’images des victimes des attentats de Paris, Nice, Bruxelles ou Berlin. Marine Le Pen fut même poursuivie pour avoir diffusé sur Twitter une photo de la décapitation du journaliste américain James Foley, accompagnée du commentaire : « Daech, c’est ça ».
Des migrants majoritairement économiques
Après l’épisode Aylan, plus d’un million de migrants arrivèrent en Europe, principalement en Allemagne, mais aussi en Autriche, Belgique, Suède, France. Or, les Syriens ne représentèrent jamais plus de 40 % des demandeurs d’asile, la plupart étant déjà réfugiés dans les pays voisins suite au conflit. Beaucoup profitèrent de cette fenêtre d’opportunité pour rejoindre l’Europe. En Irak, en Iran, en Afghanistan, mais aussi au Maghreb et en Afrique subsaharienne, des dizaines de milliers de personnes prirent la route, vendant leurs biens pour payer les passeurs, à des tarifs allant de 3 000 à 10 000 €.
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Merkel, l’humaniste consacrée
Ce geste « humanitaire » transforma l’image de la chancelière. Critiquée jusque-là pour sa rigueur imposée à la Grèce et aux pays endettés, elle devint l’icône des médias, auréolée d’un prestige quasi intouchable. Son aura s’éteindra plus tard, avec la guerre en Ukraine et la critique des accords gaziers avec la Russie.
Brexit, montée de l’AfD, fracture européenne
Les conséquences de l’ouverture des frontières furent considérables. L’arrivée massive d’hommes jeunes, la plupart non réfugiés de guerre, provoqua des réactions hostiles dans plusieurs pays. La campagne du Brexit en 2016 fut fortement influencée par cette crise. En Allemagne, l’AfD fit une percée historique en 2017, obtenant 13 % des voix et 94 sièges au Bundestag. Angela Merkel imposa ensuite, avec la Commission européenne, une politique de quotas de répartition obligatoire des réfugiés, accentuant les tensions. La crise de 2015 creusa un fossé entre l’Est et l’Ouest de l’Europe et entraîna une recrudescence inquiétante de l’antisémitisme, notamment en Suède, en Allemagne et en Belgique.
Les djihadistes dans le flot migratoire
À court terme, le plus grave fut l’organisation, depuis Raqqa, des attentats de Paris (13 novembre 2015) et de Bruxelles (22 mars 2016). Les médias refusèrent longtemps d’envisager l’hypothèse qu’ils furent rendus possible par le flot migratoire, qualifiée de « rumeur », « fantasme » ou « intox ». Pourtant, un an plus tard, Le Monde dut admettre : « La plupart des kamikazes ont suivi la route des Balkans jusqu’en Hongrie, plate-forme de transit des réfugiés, avant de rejoindre Bruxelles, base opérationnelle des terroristes[1]. » L’ouverture des frontières permit à l’État islamique un « basculement stratégique » : des attentats de grande ampleur furent conçus depuis Raqqa et des combattants aguerris empruntèrent la route des migrants, la plus sûre ! Pour les djihadistes, le flux migratoire de 2015 devint un véritable tapis rouge vers l’Europe. Sans lui, il est probable que les massacres de Paris et de Bruxelles n’auraient pas eu lieu. Certes, les coupables furent les djihadistes de l’État islamique. Mais, en ouvrant les frontières de manière unilatérale et imprudente, Angela Merkel porte une responsabilité majeure, tout comme ceux qui, dans les médias et le monde politique, ont nié ou minimisé un risque pourtant évident.
[1] https://www.lemonde.fr/attaques-a-paris/article/2016/11/12/comment-les-terroristes-des-attentats-de-paris-et-de-bruxelles-se-sont-infiltres-en-europe_5030004_4809495.html
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