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Il y a une vie après l’Assemblée

La chronique d’Emmanuelle Ménard de novembre


Il y a une vie après l’Assemblée
© AP Photo/Thibault Camus/SIPA

Le psychodrame gouvernemental n’a pas mis fin au feuilleton de la réforme des retraites. Pendant ce temps, Paris continue de s’humilier face à Alger, la Ligue des droits de l’homme poursuit ses attaques contre Béziers, et les idées pleuvent pour taxer davantage les Français. Vivement les vacances de « fin d’année » !


Trois gouvernements plus tard, on va enfin pouvoir entrer dans le vif du sujet : le vote du budget. J’attends avec impatience l’examen des 1 800 amendements déposés devant la commission des finances de l’Assemblée. Sans 49.3 à la clé, le concours Lépine des propositions les plus dispendieuses risque, comme chaque année, de nous réserver quelques surprises.

Dreyfus

« Ligue des droits de l’homme, le retour ». En plusieurs épisodes, s’il vous plaît. La Ville de Béziers pavoise son hôtel de ville avec des drapeaux tricolores plutôt qu’avec le drapeau palestinien ? La LDH attaque. Le couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans seuls dans les rues après 23 heures ? La LDH attaque. La construction d’un centre de rétention administratif pour y détenir les délinquants sous OQTF ? La LDH attaque encore… Pour moi qui ai travaillé pour la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), dont la LDH est membre, c’est incompréhensible. Ou plutôt, trop compréhensible. Leur combat n’est plus depuis longtemps celui des droits de l’homme, mais celui de certains hommes, toujours les mêmes, contre certains politiques, toujours les mêmes également. À Béziers, chaque arrêté municipal est scruté et fait l’objet d’un recours devant les tribunaux. La lutte contre les déjections canines ? Attaquée. La crèche de Noël dans l’hôtel de ville ? Attaquée. La célébration de la fête juive Hanoukka ? Attaquée aussi… Avouez qu’on est assez loin de la défense du capitaine Dreyfus, acte fondateur de leur combat. Du reste, la même organisation soutenait, il y a quelques années encore, Tariq Ramadan ou militait pour la libération du terroriste Georges Ibrahim Abdallah. Et qui, en 2022, au nom du « droit au respect de la vie familiale », défendait Hassan Iquioussen, imam auteur de discours « haineux envers les valeurs de la République » et, selon le président de la LDH en personne, de « propos antisémites absolument abjects ». Comprenne qui pourra… En français dans le texte, on appelle ça se fourvoyer. Moins gentiment, je préfère parler de forfaiture.

Magie de Noël

Après avoir proposé de « dégenrer » le Panthéon, voilà qu’on parle de changer le nom des vacances scolaires. Ce n’est pas nouveau, on a déjà vu les anciennes « vacances de Pâques » se transformer en « vacances de printemps ». Mais c’était pour cause de « zonage des vacances », qui ne coïncidaient plus forcément avec les fêtes de Pâques (dont la date change chaque année). Le 1er octobre dernier, c’est donc le Conseil supérieur de l’éducation qui a proposé de rebaptiser les vacances de la Toussaint en vacances d’automne et celles de Noël en vacances de fin d’année. Devant le tollé, le ministère de l’Éducation nationale a rapidement fait savoir que « renommer les vacances scolaires n’est pas et n’a jamais été envisagé ». En 2021 déjà, la Commission européenne avait invité ses fonctionnaires à préférer l’expression « joyeuses fêtes » à « Joyeux Noël ». Avant, là encore, de faire marche arrière. De quoi se mêlent-ils ? On tient peut-être là la solution pour éviter le mois prochain un énième procès de la LDH : installons à l’hôtel de ville de Béziers une « crèche de fin d’année » et le tour sera joué !

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Le Tartuffe ou l’imposteur

« Campus France et l’ambassade de France en Algérie félicitent les 8 351 étudiants algériens qui ont obtenu un visa pour venir étudier en France à la rentrée 2025. Ce chiffre représente une augmentation de plus de 1 000 visas par rapport à l’année 2024. » Je me souviens d’une interview de Bruno Retailleau, en juillet dernier, accordée au Figaro, dans laquelle il affirmait que « la diplomatie des bons sentiments a échoué » avec l’Algérie. Et parlant de Boualem Sansal, toujours emprisonné, il ajoutait : « Le régime algérien ne souhaite pas une relation respectueuse, mais cherche à nous humilier. Plus nous plierons, moins nous obtiendrons. » Il n’a visiblement pas été entendu par le Quai d’Orsay, ni par son successeur Laurent Nuñez. À pleurer. De rage.

Gag

Il aura fallu 26 jours à Sébastien Lecornu, pour nous pondre, peu ou prou, le même gouvernement que celui de François Bayrou. En y ajoutant quand même, fait notable, Éric Woerth et Bruno Le Maire ! Quelle trouvaille ingénieuse ! Quelle originalité ! Nominations qui ont mis le feu aux poudres et occasionné le coup de sang de Bruno Retailleau, suivi du désormais célèbre « Je me casse » de l’ancien « ministre des mille milliards de dette ». Avant la démission du Premier ministre et sa re-nomination quelques heures plus tard. Vous suivez toujours ? Ah oui, j’oubliais dans tout ça l’épisode du « chaton de Marine Le Pen » à Matignon qui a opposé les tenants du « comme c’est attendrissant… » à ceux du « quel manque de respect ! ». Moi j’aimerais juste savoir si l’animal a survécu.

Martror

La présidente de l’Assemblée nationale a jugé bon de lancer à son tour sa petite bombe en affirmant qu’il fallait en finir avec « ce truc qui tombe du ciel ». Elle propose donc de davantage taxer les héritages. Pour mémoire, la France est déjà l’un des pays du monde où la fiscalité sur la transmission du patrimoine est la plus lourde. Seules la Corée du Sud et la Belgique sont à des niveaux comparables. Oui, la mort d’un proche coûte cher à ses héritiers en France.

Le problème avec nos « politiques », c’est que, chaque fois qu’on rencontre un problème, on invente un nouvel impôt. Mais « ce truc qui tombe du ciel », n’en déplaise à Yaël Braun-Pivet, a déjà été taxé à de nombreuses reprises du temps du vivant. Bref, on taxe une seconde fois au moment du décès. Cela s’appelle ni plus ni moins qu’un impôt sur les morts…

Forfaiture again…

C’est le « prix du compromis », paraît-il. Le « prix pour garder sa place » serait plus juste puisque la suspension de la réforme des retraites a été décisive dans les tractations ayant permis à Sébastien Lecornu de rester à Matignon. Tout cela sur le dos des Français à qui on tente de faire croire une nouvelle fois que nous pourrions être le seul pays à travailler moins tout en préservant nos retraites. Alors démissionnaire, l’ex-futur ministre de l’Économie, Roland Lescure, avait d’ailleurs mis en garde contre le coût d’une telle mesure : « Modifier la réforme des retraites, ça va coûter des centaines de millions en 2026 et des milliards en 2027. » Visiblement, ce n’est plus si grave quelques heures plus tard. Ça doit être ça la magie Lecornu !

Novembre 2025 – #139

Article extrait du Magazine Causeur




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Ancienne députée

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