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Laïcité : sortis par la porte, les “collabos” rentrent par la fenêtre


Laïcité : sortis par la porte, les “collabos” rentrent par la fenêtre
Jean-Louis Bianco et Najat Vallaud-Belkacem, Pantin, 2014 © EREZ LICHTFELD/SIPA/SIPA Numéro de reportage : 00699717_000036

Pédagogisme. Si vous pensiez que la cause laïque, après tant d’attentats et de provocations, allait désormais de soi, détrompez-vous : les amis de la laïcité ouverte, comme les cuisses du même nom, n’ont pas dit leur dernier mot. Et Jean-Louis Bianco est leur prophète, si je puis dire…


À peine débarqué de l’Observatoire de la laïcité, le « machin », comme aurait dit De Gaulle, mis sur pied jadis par Jean-Marc Ayrault pour donner un job à Jean-Louis Bianco, l’ex-président a fondé une « Vigie de la laïcité » dont le souci immédiat, à en croire sa première newsletter, est de mettre des bâtons dans les roues du projet de Jean-Michel Blanquer de formation à la laïcité des enseignants. Mais il en est de même de tous les hommes de (petit) pouvoir. Bianco ronronnait depuis huit ans dans son Observatoire, l’idée d’une mise à pied le chagrine. Alors, il sonne la charge — et si possible l’hallali.

Cible première, le rapport fourni au ministre par Jean-Pierre Obin, que j’évoquais ici-même la semaine dernière

Le Café pédagogique, cet Observatoire de la doxa qui a anéanti l’École depuis vingt ans, avait prévenu : « Toute l’action de Jean-Michel Blanquer depuis 2017 vise la destruction de la culture pédagogique française et le remplacement des personnalités qui l’incarnent. Pourtant, toute cette communication ministérielle sur une laïcité d’exclusion a peu d’avenir dans le système éducatif. » Et d’insinuer qu’il s’agit juste pour le ministre de « préparer les élections » de l’année prochaine — en imaginant que Blanquer sera toujours là. 

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Approche « idéologique », dit la Vigie. Rappelons que selon la définition immortelle de Hannah Arendt, l’idéologie est ce qui n’a aucun rapport avec la réalité. Il faut donc prendre les déclarations de la « Vigie » comme une boussole qui indique le Sud. 

Jean-Pierre Obin lors d’une interview sur France Inter en septembre 2020. Capture d’écran YouTube

Raisonnement en deux temps :

– On cite l’adversaire en le tronçonnant et on lui offre sans preuve un démenti global :

Sans citer la moindre source, l’auteur affirme :
« Les dérives idéologiques que l’on connaît et qui affectent certains départements universitaires de sciences humaines ont pénétré quelques instituts (…) En guise de formation à la laïcité, on inflige parfois aux étudiants des cours ou des mémoires portant sur la ‘déconstruction’ du discours officiel sur la laïcité, prétendant mettre à jour le « racisme systémique » d’un État « post-colonial » et « islamophobe ». » M. Obin conclut en demandant un « contrôle » direct, par « le ministère chargé de l’Éducation nationale (…) sur la formation » délivré dans les INSPÉ, une fois encore, sans jamais simplement mentionner le nécessaire respect des règles de droit.

– Et on en tire la conclusion qu’à cette prémisse idéologique correspond une conclusion — l’action future du ministre — qui ne l’est pas moins :  

« En conséquence, si l’objectif de formation des personnels de l’Éducation nationale à la laïcité ne peut qu’être soutenu (mais il a en réalité déjà fait l’objet de nombreuses préconisations antérieures), l’orientation générale proposée par le rapport de M. Obin est particulièrement problématique. Elle substitue à l’idée de formation fondée sur le droit, les outils d’une véritable « police de la pensée » en contradiction avec l’idée même d’une « République indivisible, laïque, démocratique et sociale ». »

« Fondée sur le droit »… Le droit est malheureusement devenu, entre les pattes des manipulateurs de réel, un atelier à faire mentir les faits. La police de la pensée est dans tous les lieux d’exercice de la « cancel culture » : dans les universités où les projets de thèse sur le « genre » et ses avatars se multiplient, à l’IHESS, nid d’islamo-gauchistes convaincus que leurs convictions font office de réalité, et dans les médias, où les journalistes « de gauche » (il semble bien que ce soit un pléonasme) suggèrent que l’on fasse taire leurs confrères de droite — ou supposés tels. Voir Léa Salamé, qui à la remarque de Valérie Pécresse sur le fait qu’il fallait choisir entre la République — elle — et un néo-fascisme vert-rouge, s’est exclamée : « Ah, carrément ! » — ce qu’elle n’aurait pas lancé à tout homme politique selon son cœur évoquant le fameux « front républicain » destiné à bloquer Marine Le Pen. Voir Geoffroy de Lagasnerie, suggérant que l’on interdise de médias tous ceux qui ne pensent pas comme lui, et délimiter un périmètre de la pensée, comme le dit très bien Eugénie Bastié dans le Figaro, qui soit circonscrit à ses amis : à fasciste, fasciste et demi. Voir Jean-Louis Bianco et sa Vigie.

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La laïcité est en si piteux état, après des années de concessions et de coups de canifs dans la loi de 1905, que je n’ai pas le cœur à ironiser davantage. C’est bien d’une guerre qu’il s’agit, et il faut être clair : il n’y a pas de liberté pour les ennemis de la liberté, et les sous-marins de l’islam wahhabite, qui se parent de belles plumes universitaires ou journalistiques, mériteront un jour ou l’autre de s’expliquer devant le peuple, qui encaisse longtemps jusqu’au jour où il ne fait plus de cadeaux.

PS. Je sais que les liens hypertexte alourdissent un peu la lecture. Mais d’un côté, les affirmations de ces adorateurs de la charia à venir sont si incroyables qu’il vaut mieux citer les références. Et d’autre part, retenez-bien leurs noms, il faudra quelque jour leur demander des comptes et leur présenter l’addition.



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Normalien et agrégé de lettres, Jean-Paul Brighelli a parcouru l'essentiel du paysage éducatif français, du collège à l'université. Il anime le blog "Bonnet d'âne" hébergé par Causeur.

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