Accueil Politique Napoléon les dérange-t-il tous?

Napoléon les dérange-t-il tous?

Entretien avec David Saforcada, président du mouvement politique France Bonapartiste


Napoléon les dérange-t-il tous?
Image d'illustration Nicolas HIPPERT / Unsplash

Des esprits contemporains étriqués, appliquant une lecture féministe ou indigéniste à l’histoire, voient d’un mauvais œil les commémorations du bicentenaire de la mort de Napoléon…


Tel un bulldozer anéantissant tout sur son passage, la culture de l’annulation, appelée « cancel culture » outre Atlantique, ne cesse de prendre de l’ampleur jusqu’à atteindre la figure historique de Napoléon Bonaparte. Selon David Saforcada, président du France Bonapartiste, ce phénomène s’inscrit dans un mouvement de « détricotage du récit national » et relève d’un « anachronisme éculé.»

Quand la « cancel culture » part à l’assaut de Napoléon Bonaparte

De Colbert à Napoléon Bonaparte, en passant par Christophe Colomb ou encore les Belges Léopold II et Annie Cordy, une vaste entreprise de « déconstruction » épargne peu de figures historiques occidentales.

En France, l’Année Napoléon, et les commémorations entourant le bicentenaire de sa disparition, suscitent de nombreuses critiques par une partie de la gauche et de la classe politique. Aurélien Taché, député du Val-d’Oise, va jusqu’à déclarer que « Napoléon, c’est comme si l’OAS était au pouvoir en Algérie. » Une semaine auparavant, Danièle Obono, députée LFI, déplorait le choix du gouvernement de célébrer une « figure autoritaire et réactionnaire. » C’est « l’un des plus grands misogynes » de l’histoire, déclarait Elisabeth Moreno, ministre déléguée en charge de l’Égalité entre les femmes et les hommes, à l’occasion de la Journée Internationale des Droits des Femmes.

Assurément, l’Empereur est loin d’être dans les bonnes grâces d’une partie de la classe politique. David Saforcada, président du mouvement politique France Bonapartiste a eu l’amabilité de nous éclairer sur cette nouvelle tendance. Pour lui, le bonapartisme a toujours un sens aujourd’hui et n’est ni une attitude passéiste, ni la nostalgie d’un monde révolu.

David Saforcada D.R.
David Saforcada D.R.

Causeur. Êtes-vous surpris par cette polémique créée par une frange de la gauche, autour de l’Année Napoléon ?

David Saforcada. Je ne vous étonnerai pas en vous répondant non. Cela fait partie de son détricotage du récit national. Je vous avouerai que je ne suis pas non plus surpris de l’attitude d’une partie de la droite molle ou de celle qu’on nomme nationale. Napoléon les dérange tous.

A lire aussi: Selon le «New York Times», Napoléon était un… suprémaciste blanc!

Qu’avez-vous pensé des récentes déclarations d’Aurélien Taché, faites sur Cnews ?

Je pense que monsieur Taché devrait ouvrir de véritables livres d’histoire et ne pas venir déverser des tombereaux d’âneries sur l’histoire napoléonienne, il devrait aussi éviter les anachronismes éculés qui n’amènent rien au débat. C’est affligeant d’entendre autant de malhonnêtetés et de niaiseries.

Ce dernier prend soin de distinguer « commémoration » et « célébration », puis établit un parallèle entre l’Empereur et l’OAS en Algérie, que pensez-vous de cette analogie, et de ses éventuelles conséquences sur la population issue des pays du Maghreb ?

Concernant la « polémique » commémorer ou célébrer Napoléon, à chacun de prendre la définition qui l’intéresse mais vu ses connaissances historiques je lui conseille de ne rien faire … Pour ce qui est de l’OAS, j’ai beau tourner dans tous les sens l’histoire de Napoléon Ier je n’arrive pas à voir où il veut en venir. S’il veut parler d’Algérie et de Napoléon, alors qu’il nous parle de Napoléon III qui fut le seul à avoir une véritable vision politique, avec son ami l’émir Abdelkader, au sujet de l’Algérie. Ce serait donner beaucoup d’importance à monsieur Taché que de croire qu’il peut avoir une influence sur la population issue du Maghreb.

A lire aussi, enquête: L’étrange projet de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage

Selon Elisabeth Moreno, ministre déléguée en charge de l’Égalité entre les femmes et les hommes, l’empereur Bonaparte serait un « grand misogyne », qu’avez-vous à répondre à ce genre de déclarations ?

Je voudrais juste demander à madame Moreno ce qu’ont fait Gambetta, Ferry, Clémenceau, Jaurès ou Blum pour la condition de la femme ? Il faudra attendre le général de Gaulle pour voir la femme être libérée. Et aujourd’hui que fait-on concrètement pour le droit des femmes dans certains quartiers, dans le monde du travail ? Napoléon misogyne, pas plus pas moins que son époque et sûrement moins que certains depuis 1815…

Quelles seraient selon vous les conséquences de ce mouvement de « déconstruction de l’histoire », notamment pour l’unité de la France ?

Détruire son histoire c’est prendre deux risques :

Le premier, faire de la France une nation sans âme et donc une nation sans force ce qui à l’heure actuelle amènerait à son effacement complet sur la scène mondiale alors que de nombreux pays voient encore celle-ci comme un phare. Le second serait d’empêcher toute intégration et assimilation, car comment vouloir devenir Français ou simplement respecter la France si celle-ci n’est pas capable d’assumer son Histoire, de mettre en avant ses grandeurs, ses gloires, civiles, scientifiques, militaires, sociales, de célébrer ses grandes figures ?



Vous venez de lire un article en accès libre.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !

Article précédent La France au Sahel: quels objectifs pour quelle guerre?
Article suivant Six Français sur 10 favorables au nucléaire
Prof contractuelle. Installée en France depuis l'an 2000, j'ai effectué un troisième cycle d'études littéraires à l'Université de Nice, je suis aussi auteur, traductrice littéraire et journaliste.

RÉAGISSEZ À CET ARTICLE

Le système de commentaires sur Causeur.fr évolue : nous vous invitons à créer ci-dessous un nouveau compte Disqus si vous n'en avez pas encore.
Une tenue correcte est exigée. Soyez courtois et évitez le hors sujet.
Notre charte de modération