Accueil Politique Opération recadrage chez Hollande

Opération recadrage chez Hollande


Photo : Parti socialiste

La presse nous l’apprend presque en temps réel : François Hollande a « recadré » son équipe de campagne mercredi soir sans colère, ni cris, ni noms d’oiseaux. Raison de la séance : un cafouillage de plus à propos des 60 000 postes d’enseignants « créés » ou « redéployés » après 2012 en cas de victoire de la gauche à la présidentielle.
La raison de l’ire pré-présidentielle ? L’aile gauche du parti, de Benoît Hamon à Marie-Noëlle Lienneman, a publié un communiqué de presse assez offensif sur les fameux postes de profs, exigeant qu’ils soient purement et simplement crées et non redéployés donc.

Embarras, flottement, attaques de droite et donc recadrage. Notons qu’à l’issue de cette opération autorité-vérité, on n’a toujours pas bien compris quel était le sort réservé à ces 60 000 profs. Mais peu importe. A cent jours de la présidentielle, la question qui se pose est celle de l’autorité du candidat Hollande sur son armée en campagne. Ce qui a malgré tout une petite importance si on veut bien arrêter de croire qu’il va gagner l’Elysée les doigts dans le nez, comme le proclame partout son numéro deux, l’inénarrable Pierre Moscovici.

Posons un préalable : les « recadrages », ne sont pas des signes de faiblesse ou de mauvaise gestion d’une campagne. Ce sont des actes normaux, qui visent à serrer les boulons. On a beau avoir inventé les éléments de langage, les porte-parole ont toujours tendance à outrepasser leur mission sacrée. Emportés par la fougue de leur jeunesse et leur plaisir des bons mots. Non, je déconne…

Ainsi on apprend que Nicolas Sarkozy aurait recadré cette semaine, à la fois son ministre de la Défense Gérard Longuet, auteur d’une saillie comparant François Hollande au capitaine naufrageur du Costa Concordia. Il avait auparavant déjà torpillé le président de l’Assemblée nationale, Bernard Accoyer, lequel avait un peu gaillardement comparé la France à un pays en situation de guerre mondiale si les socialistes arrivaient au pouvoir (ce que nous n’avons pas entendu stricto sensu assistant au premier rang du discours à l’Assemblée, mais on était peut-être distraite). Ceci ne pose pas tellement problème. Le sniper est un sniper. S’il rate sa cible, on l’engueule pour les dégâts collatéraux et on lui change son arme. Avant de le renvoyer au front.

Chez les socialistes, on semble être plus hésitant sur la sniperisation du combat politique. D’un côté on dit, allez hop au charbon, allez taper sur Sarkozy et sa bande. N’ayez pas peur. Et de l’autre on veut montrer qu’on est au-dessus de tout ça en refusant le spectre d’une « campagne de caniveau ». Messieurs les UMP, tirez les premiers et tout le tralala. Entre deux options, le tout est de choisir.

Préalable numéro deux : si on recrute des snipers, mieux vaudrait être sûr qu’ils ont leurs brevets de tir à jour. En français, qu’on a des bons à aligner face aux contradicteurs de droite. Un exemple ? Il suffisait d’écouter le débat opposant ce mercredi Philippe Marini à Marisol Touraine sur Europe 1, sur les suites du sommet social ou de la TVA du même métal. A ma droite un vieux briscard roué, techno mais pas trop. A ma gauche… A ma gauche je cherche toujours. Madame Touraine est sans doute une députée de talent, qui connaît-bien-ses-dossiers, comme on dit quand on ne veut pas fâcher. Mais faire reposer la doctrine sociale et fiscale du candidat sur ses épaules, ça craint. On en vient à se dire qu’il manque à la gauche une armée de Nadine Morano, popu, vulgaires (tant pis), brutales et politiques. Au lieu de ces technos froides totalement dénuées de la souplesse et de la fourberie nécessaires à ce genre d’exercice. Il n’y a donc personne à envoyer au front pour faire de la politique, faire le show, et au passage gagner quelques voix ? Non, si j’en juge par la liste des porte-parole thématiques du candidat Hollande.

Mettons que pour l’instant, surfant sur une avance sondagière confortable, il peut encore se le permettre. Mais on en vient à regretter Ségolène Royal, qui tapait, et parfois juste. A tout prendre, il serait peut-être temps que la gauche organise un grand casting de chiens fous, qu’il faudra éventuellement recadrer en haussant le ton. Ce qui sera toujours mieux que les caresses dans le dos de gens qui ne paraissent pas à la hauteur de la guerre qui s’annonce. La guerre en gants blancs, c’est beau sur les tableaux du musée des Invalides. Qui n’est qu’à trois pas du QG de campagne de François Hollande…



Vous venez de lire un article en accès libre.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !

Article précédent Égypte, chronique d’une révolution mort-née
Article suivant Vies et destins des patients de Freud
est journaliste

RÉAGISSEZ À CET ARTICLE

Le système de commentaires sur Causeur.fr évolue : nous vous invitons à créer ci-dessous un nouveau compte Disqus si vous n'en avez pas encore.
Une tenue correcte est exigée. Soyez courtois et évitez le hors sujet.
Notre charte de modération