Pourquoi tant d’Israël?


Pourquoi tant d’Israël?

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Quand j’étais petit, dans ma famille, on ne faisait pas « un voyage en Israël », mais « un pèlerinage en Terre Sainte ». Mes grands-parents m’en avaient rapporté un chapelet en bois d’olivier. Et la Palestine, c’était le pays où se déroulaient la plupart des histoires qu’on me lisait à la messe, le dimanche. J’ai très vite compris que ces trois appellations désignaient le même endroit, mais il fallait bien l’avouer : c’était aussi mystérieux que la Sainte Trinité.

Plus tard, j’ai appris à l’école – c’est-à-dire très sommairement – l’histoire de la naissance d’Israël, le pays tel qu’il existe « pour de vrai » aujourd’hui. Tout ce que j’en ai retenu, ou presque, c’est qu’il avait été créé pour accueillir les juifs qu’on n’avait pas exterminés. « On », ça voulait dire les nazis, pendant la Seconde Guerre mondiale. Parce que, entre temps, j’avais vu en classe Nuit et brouillard, et étudié en détail les horreurs commises par le IIIe Reich.

Quant à la Palestine, j’en ai longtemps entendu parler sans parvenir à cerner ce qu’elle désignait dans le monde actuel. Jusqu’au jour, bien sûr, où j’ai entendu parler d’intifada. Je connaissais par cœur la chanson de Renaud  Miss Maggie, et notamment une phrase : « Palestiniens et Arméniens témoignent du fond de leur tombeau qu’un génocide c’est masculin, comme un SS, un toréro. » J’en ai sans doute déduit, inconsciemment, que dans le conflit israélo-palestinien les victimes persécutées étaient les Arabes, et les Juifs les bourreaux sanguinaires. Mais cette histoire ne m’intéressait pas plus que ça.[access capability= »lire_inedits »]

Ce n’est qu’en commençant à travailler comme journaliste à Paris que j’ai dû me faire une raison. En parlant avec une collègue, la première Israélienne que je rencontrais – et qui se vantait de savoir manier un M16 – j’ai compris qu’il fallait avoir une opinion, un point de vue à défendre sur LA question. Qu’un tsunami vienne de ravager les côtes de toute l’Asie du Sud-Est ou qu’un enfant ait été congelé par sa mère au fin fond d’un village de province, rien ne semblait plus important. « Sharon assassin, le sionisme c’est l’apartheid ! », scandaient les foules de manifestants que j’entendais défiler depuis mon bureau. Ça avait l’air grave, mais j’essayais de rester concentré sur l’actualité, qui était loin de se limiter à ce conflit lointain.

Une dizaine d’années plus tard, je suis toujours journaliste, et j’entends de nouveau parler tous les jours ou presque du conflit israélo-palestinien. Toujours les mêmes banderoles affublant le drapeau israélien de la croix gammée, et les mêmes cris vengeurs contre les « sionistes, assassins ! ». Le soir, je ne peux plus finir un dernier verre en terrasse sans que mon voisin ne s’immisce dans la conversation pour me demander mon avis, avant de me rappeler que les résolutions de l’ONU n’ont jamais été suivies d’effet… et que le 11-Septembre ne s’est pas passé comme ça, faut pas croire ce que racontent les « journalistes du système » !

Et puis j’ai fini par me documenter un peu plus, et découvrir, comme je l’imaginais, qu’il s’agissait d’un conflit violent et tragique, dont bien peu des protagonistes ont les mains propres, comme tant d’autres. Je n’ai pas décidé de m’y intéresser parce que le sujet m’aurait soudainement passionné, mais seulement pour ne pas risquer de dire une bêtise, à force d’être sans cesse sommé d’en parler. De guerre lasse, si je puis dire.[/access]

*Photo : Stephen Coles.

Septembre 2014 #16

Article extrait du Magazine Causeur



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